Napoléon 1er et le concordat
Le "Concordat", complété par les "Articles organiques", sont des lois décrétées par l’Empereur Napoléon 1er pour réglementer la vie des Églises aussi bien protestantes que catholiques. Il ne contient aucune mesure restrictive, et pour la première fois les pasteurs seront payés par l’État. Mais le Concordat ne reconnaît que les Églises « consistoriales » de 6000 âmes, et non pas les Églises « locales », mieux adaptées à la dispersion des protestants et à leur théologie. Surtout, le Concordat ne reconnaît pas le synode national, autorité centrale traditionnelle de l’Église protestante, seule capable d’arbitrer d’éventuels conflits.
En organisant un nouveau régime politique après son coup d’État du 18 brumaire (9 novembre 1799), Bonaparte a pour but de rétablir la paix civile, et à ses yeux la politique religieuse est une question importante. Agnostique, il connaît mal le protestantisme, mais tient volontiers des propos aimables à son égard (« Nous voudrions que tout le monde fût protestant » dit-il en 1801...) pour faire contrepoids au catholicisme auquel il refuse le titre de « religion dominante » que réclamait le pape, se contentant de le qualifier de « religion de la grande majorité des citoyens français ».

Le Concordat, conclu avec le pape Pie VII et signé le 8 septembre 1801, n’entre pas immédiatement en vigueur, il ne devient loi de l’État que le 8 avril 1802 (18 germinal an X), après avoir été complété par les articles organiques, ajoutés par Bonaparte, sans concertation avec le pape, articles qui forment un ensemble de règles réglementant la vie de l’Église catholique et organisant les cultes protestants. La question du culte juif est remise à plus tard, ce délai étant alors motivé par l’idée que les Juifs forment plus un peuple qu’une religion, et leur culte ne sera réorganisé qu’en 1808.
Cependant il s’agit non pas d’une loi négociée, mais d’une décision du gouvernement : en effet, le ministre responsable (Portalis) a bien consulté quelques notables protestants luthériens ou réformés, surtout le pasteur Paul-Henri Marron et Pierre-Antoine Rabaut-Dupui membre du Corps Législatif, mais il n’a guère tenu compte de leurs avis. En fait, Bonaparte ne reconstitue pas du tout l’Église protestante - en particulier sa branche réformée - telle qu’elle existait avant les persécutions, il bouleverse son organisation, d’où de nombreuses difficultés et des facteurs de division qui verront le jour dans le protestantisme et en particulier à l’Oratoire qui était le siège de l’église consistoriale pour toute la région parisienne.
En 1811, l’empereur Napoléon a le projet d’agrandir le Louvre pour le réunir aux Tuileries. Les bâtiments se situant à l’intérieur du périmètre sont voués à la démolition, dont Saint-Louis du Louvre (Les travaux de démolition traîneront pendant quelques années). Les protestants n’ont plus de lieu de réunion. Un courrier du Conseil d’Etat conservé à la SHPF propose de leur affecter l’église des Théatins arguant que l’église de l’Oratoire pourrait être affecté à la paroisse de St-Germain l’Auxerrois. {Aucune mention retrouvée dans les archives SHPF disant qu’on leur aurait fait choisir entre la Madeleine et l’Oratoire...}
Le préfet de Paris, à l’époque, « le bon M. Frochot », favorable aux protestants, présenta habilement la situation à l’empereur suscitant «de se faire demander s’il n’y avait pas de local disponible », et obtint la permission de les établir à l’Oratoire . On dégage les décors de théâtre de l’Opéra, du Vaudeville et avec plus de lenteur du Théâtre-Français qui y étaient entreposés (il fallut l’intervention très autoritaire du délégué du Consistoire, M. Châtillon que l’on prend pour un commissaire impérial, pour qu’ils s’exécutent, ce qui fut fait entre le 17 février et avril 1811). M. Mallet avança 8000 francs pour les travaux de déménagement et d’installation, dont il ne fut remboursé qu’en 1813, quand la Ville finit par fournir les fonds promis.
Le 1er culte est célébré à l’Oratoire en avril 1811, le jour de Pâques.
Deux événements importants mirent les protestants à l’honneur :
- la Légion d’honneur est attribuée aux trois premiers pasteurs de l’Oratoire -Marron, Mestrezat et Rabaut-Pommier -par Napoléon en 1811 :, qui reconnait ainsi publiquement les protestants. En mémoire de ce geste, lors de la restauration des vitraux en 1814, une croix de la Légion d’Honneur viendra orner le vitrail de la façade
- en 1812, les spectaculaires obsèques du Vice-amiral de Winter, enterré au Panthéon, rassembleront les plus hautes personnalités dans l’Oratoire pour un culte d’action de grâce.
Vidéo d’une conférence de Patrick Cabanel, professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Toulouse-Le Mirail, membre de l’institut universitaire de France. Il dévoile comment l’Oratoire, comme d’autres anciennes église catholiques, ont été cédées aux protestants sous Napoléon :