Désacralisation

Jean 4:19-24

Culte du 17 novembre 2013
Prédication de Laurent Gagnebin

Vidéo de la partie centrale du culte

Culte à l'Oratoire du Louvre

Désacralisation
17 novembre 2013

Prédication du professeur Laurent Gagnebin.


Chers amis,

Nous connaissons les trois grands principes qui animent qui illumine la piété et la spiritualité protestante depuis le XVIe siècle.

À savoir,

  1.  le salut par la grâce seule, 
  2. la foi seule,
  3. l'Écriture seule, c'est-à-dire, la Bible seule.

Mais il y a une autre réalité propre au protestantisme et qui l'anime dès le XVIe siècle. Elle marque non seulement, sa spiritualité, sa piété, mais l'ensemble de la société. C'est là peut-être sa spécificité, son originalité, et son importance pour nous aujourd'hui et pour dire le protestantisme aux hommes et aux femmes d'aujourd'hui. Cette réalité, c'est une vaste entreprise de désacralisation et c'est à cela que j'aimerais consacrer la prédication de ce matin, qui sera à bien des égards, comme souvent, une prédication à thème.

Désacralisation du temps d'abord.
Avec une réduction drastique des jours de fête des jours fériés — et la confession de foi de La Rochelle, en 1571, rejette, comme elle dit "l'observation cérémonielle des jours" : on renonce aux fêtes patronales dédié en semaine à des saints locaux. Tous les dimanches deviennent ordinaires et on désacralise le calendrier des saints, puisqu'on refuse désormais le culte des saints. On garde ce calendrier parfois comme une sorte de mémorial puisque, les saintes et les saints peuvent demeurer des exemples. L'apôtre Paul déclare dans la première épître aux Thessaloniciens : "priez sans cesse", ce qui a certains égards est absurde et impossible, mais il veut dire par là que nous pouvons prier n'importe quand.

Et aussi ajouterai-je, n'importe où.

Désacralisation de l'espace.
Il n'y a plus de lieux sacrés pour les protestants, les églises, les temps ne sont pas des lieux sacrés, pas plus que ce qui s'y trouve. L'autel devient une table de communion. Il n'y a plus de culte ou de vénération des reliques. Oui, comme dit Jésus à la femme de Samarie, "l'heure vient ou ce ne sera ni sur cette montagne" — c'est-à-dire le mont Gharisim, où se trouvait un temple des Samaritains — "ni à Jérusalem" — autre colline où se trouvait le temple des Juifs — "que vous adorerez le Père". 

Et quand on compare des représentations de ce temple de l'Oratoire, l'intérieur du temple de l'Oratoire, avec ce qu'il était avant du temps où il était une église catholique, on voit qu'une des premières transformations est la suppression du cœur. Le chœur était un espace sacré, réservé aux seuls prêtres, interdit aux fidèles ; un espace où avait lieu le sacrifice de la messe. Cet espace était séparé des fidèles par une grille, voire par un jubé, une clôture architecturale en pierre qui interdisait même de le voir. Comme vous le savez, on s'assied dans le chœur, dans le temple de l'Oratoire. Ce n'est pas par hasard qu'il y a une vingtaine d'années, j'ai publié un petit traité de liturgique intitulé Le culte à chœur ouvert. Avec un jeu de mots !

Et puis désacralisation des personnes.
Avec l'infirmation d'un sacerdoce universel. Nous sommes tous prêtres : il n'y a plus entre Dieu et nous la médiation obligatoire de clergé. Nous avons un accès direct à Dieu, auquel nous disons "tu". Les pasteurs sont des laïques comme les autres, même s'ils ont un ministère spécifique. C'est là l'abolition de l'autorité et du pouvoir clérical. 

Vivre dans un monde où il n'y a plus de sacré, c'est véritablement vivre dans une société et dans un monde autre. On a pu dire du christianisme qu'il était "la religion de la sortie de la religion", parce qu'il contenait potentiellement en lui cette dynamique de la sécularisation, à laquelle nous assistons en effet depuis plusieurs années. On pourrait dire que le protestantisme est la religion de la sortie de la sacralisation, et cela dès ses origines. 

Or ce qu'on souligne insuffisamment, c'est qu'il y a un lien très fort — et même plus qu'un lien — entre l'affirmation d'un sacerdoce universel et la volonté — grâce au progrès de l'imprimerie — de mettre la Bible dans toutes les mains, sous tous les yeux.

Lecture de la Bible

Évangile selon Jean 4, 16-24

16 Va, lui dit Jésus, appelle ton mari, et viens ici. 17 La femme répondit: Je n'ai point de mari. Jésus lui dit: Tu as eu raison de dire: Je n'ai point de mari. 18Car tu as eu cinq maris, et celui que tu as maintenant n'est pas ton mari. En cela tu as dit vrai. 19 Seigneur, lui dit la femme, je vois que tu es prophète. 20 Nos pères ont adoré sur cette montagne ; et vous dites, vous, que le lieu où il faut adorer est à Jérusalem. 21 Femme, lui dit Jésus, crois-moi, l'heure vient où ce ne sera ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. 22 Vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous, nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs. 23 Mais l'heure vient, et elle est déjà venue, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; car ce sont là les adorateurs que le Père demande. 24 Dieu est Esprit, et il faut que ceux qui l'adorent l'adorent en esprit et en vérité.

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