L'Évangile pour tous
Actes 11:1-18
Culte du 17 mai 2015
Prédication de pasteur James Woody
(Actes 11:1-18)
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Culte du dimanche 17 mai 2015
prédication du pasteur James Woody
Chers frères et sœurs, il est intéressant de lire les Actes des Apôtres avec attention car nous y voyons les premiers chrétiens à l’œuvre. C’est d’ailleurs dans ce chapitre (v.26) qu’ils seront nommés ainsi, dans la ville d’Antioche. Nous y voyons les personnes qui ont été au plus près de Jésus, qui ont reconnu en lui les caractéristiques du Christ et qui vont se laisser transformer par cette expérience religieuse exceptionnelle. Tout au long de ce livre biblique, nous voyons le christianisme se former, de manière plurielle, par l’intermédiaire de grands personnages très différents les uns des autres et de communautés elles aussi différentes les unes des autres. Dans le passage qui retient notre attention, Pierre, le disciple auquel Jésus avait confié la responsabilité des autres disciples, va entrer en contact avec des non-juifs, avec des païens. Cette rencontre va nous permettre de découvrir deux aspects importants de la foi chrétienne. Le premier aspect est relatif à ce qu’est la parole de Dieu et le deuxième est notre rapport à ceux qui n’ont pas notre identité religieuse.
La parole de Dieu
Commençons par la parole de Dieu. Qu’est-ce qui est parole de Dieu pour un chrétien ? Beaucoup considèrent que la Bible est la parole de Dieu. Il suffirait de lire la Bible pour connaître la parole de Dieu. D’autres disent que la Bible contient la parole de Dieu. Ceux-là disent que la Bible contient des paroles de Dieu, mais que toute la Bible n’est pas parole de Dieu, par exemple lorsque les amis de Job s’expriment, ce n’est pas la parole de Dieu, mais ce que pensent les amis (et ce qu’ils pensent est éloigné des pensées de Dieu). Pierre adopte une troisième position : la Bible n’est pas la parole de Dieu, elle ne contient pas des paroles de Dieu, mais elle nous aide à découvrir ce qui peut être parole de Dieu. Détaillons cela.
Lorsque Pierre voit cette nappe contenant des animaux, il repère tout de suite que ce sont des animaux impurs, c’est-à-dire des animaux qu’il ne faut pas manger selon les prescriptions de la Bible hébraïque. Ce n’est pas casher. Pour Pierre, cet interdit est parole de Dieu, une parole qu’il faut respecter coûte que coûte. C’est un interdit qu’il ne faut pas transgresser sous peine d’être dans le péché. Pierre a été élevé dans cette idée qu’il était détestable pour Dieu de manger ces animaux qui sont considérés comme impurs.
Pourtant, dans sa vision, une voix s’adresse à lui et lui ordonne de consommer ce qu’il voit. Bien entendu, il refuse, au nom de la parole de Dieu qui lui dit que c’est mal, qu’il ne faut pas le faire. Mais la voix s’adresse une deuxième fois à lui. Et cette fois Pierre entend : « Ce que Dieu a déclaré pur, ne le regarde pas comme souillé. » Et le texte précise que la voix s’adressa encore une fois à Pierre. Les parole concernant Pierre vont souvent par trois.
Pierre se trouve dans une situation inédite : il entend une voix qui dit que Dieu déclare pur ce que la parole de Dieu déclare impur. L’embarras de Pierre doit être à son comble. C’est à se demander si Pierre ne vit pas ce genre de situation que l’on voit dans les bandes dessinées où le héros est tiraillé entre un ange et un diablotin qui lui disent, chacun, quelque chose de contradictoire. C’est la même chose pour Pierre. D’un côté il a lu dans les premiers livres de la Bible hébraïque que Dieu interdit de manger ces animaux et il entend maintenant que Dieu dit que ces animaux sont purs, qu’ils peuvent donc être mangés.
La suite montrera que la voix que Pierre a entendue correspond à la volonté que les chrétiens ont reconnue comme divine. Aujourd’hui, nous, chrétiens, nous nous disons autorisés à manger ces viandes qui ne sont pas autorisées dans le judaïsme. Nul n’est obligé d’en manger, mais nul ne sera poursuivi par un tribunal chrétien s’il le fait. Alors, où est la parole de Dieu ? Pierre nous révèle que la parole de Dieu n’est pas dans la Bible. Elle est dans le dialogue entre la Bible et notre vie quotidienne. La parole de Dieu est dans la confrontation entre ces textes bibliques dont nous disons qu’ils sont tout particulièrement adaptés à la découverte de la parole de Dieu, et ce que nous vivons, ce que nous éprouvons, les questions qui se posent aujourd’hui. La parole de Dieu n’est ni le texte biblique, ni dans le texte biblique. Et la parole de Dieu n’est pas plus notre histoire qu’elle n’est contenu dans notre actualité. La Parole de Dieu est la rencontre de ce patrimoine de témoignages rassemblés par des croyants, et de notre présent. Autrement dit la parole de Dieu s’actualise pour nous. Et la parole de Dieu n’est pas quelque chose de définitif. Fut un temps où les enfants qui désobéissaient à leur parents recevaient une réprimande la première fois et se faisaient lapider ensuite (Dt 21/21). Pour autant que cela ait été pratiqué, ce n’est certainement pas une règle en usage dans notre tradition, en tout cas à l’Oratoire du Louvre. Cet exemple et tant d’autres montrent que la Bible n’est pas la parole de Dieu et que nous ne pouvons pas dire non plus qu’elle contient la parole de Dieu. La Bible nous est infiniment précieuse pour entendre ce qui peut être parole de Dieu aujourd’hui, mais en faisant ce travail que nous appelons interprétation ou herméneutique. Cela revient à redécouvrir dans la Bible quelles sont les dynamiques qui sont à l’œuvre pour redéployer ces dynamiques dans notre situation contemporaine. Par exemple, il serait absurde de faire sortir tous les chrétiens d’Egypte (la question serait plutôt de leur permettre d’y vivre en sécurité), mais il est absolument nécessaire de faire sortir tout le monde des situations d’esclavagisme, alors que Paul lui-même ne remettait pas en cause l’esclavagisme économique tout en prônant la liberté individuelle (Philémon). Nous avons évolué sur cette question parce que la parole de Dieu a continué à se frayer un chemin dans nos consciences en devenir, comme nous avons évolué sur d’autres sujets et que les générations suivantes continueront à le faire. La fidélité à la parole de Dieu est de ne pas la figer comme un élément de notre passé, mais de la faire advenir sans cesse dans notre vie. Jamais le christianisme n’a confessé que la parole s’était faite livre, mais qu’elle s’était faite chair, une chair dont nous confessons aussi qu’elle n’a pas été enfermée à jamais dans une Bible tombale.
Notre rapport aux non-chrétiens
Ce rapport dynamique à la parole de Dieu, nous le retrouvons aussi dans le rapport que Pierre entretient avec les non judéo-chrétiens, avec les païens de l’époque. Pour les chefs de la communauté de Jérusalem, le fait que Pierre soit entré chez les incirconcis et qu’il ait mangé avec eux est plus que suspect. En allant chez cet homme païen, Corneille, Pierre a franchi une autre limite entre le pur et l’impur. Mais le passage biblique se termine par une conclusion communément partagée par Pierre et ses contradicteurs « Dieu a donc accordé la repentance aussi aux païens, afin qu’ils aient la vie ». Cette traduction mérite deux précisions. La première est que « repentance » traduit le terme grec metanoia dont j’ai déjà eu l’occasion de vous dire qu’il est construit avec le préfixe meta qui signifie après, au-delà, et le terme noos qui signifie l’intelligence. La metanoia est donc une intelligence approfondie, une meilleure connaissance. Il ne s’agit pas de repentance au sens de « je regrette ce que j’ai fait avant ». Il s’agit d’une progression dans la compréhension de ce qu’est la vie. C’est la deuxième précision qu’il faut faire. La vie est ici zoe et non bios. Il ne s’agit donc pas de la vie par opposition à la mort clinique, mais de la vie chargée de sens, la vie au sens de l’histoire.
Ce que Pierre a découvert et que les apôtres vont accepter, c’est que les païens peuvent être au bénéfice d’une révélation divine qui ne passe pas nécessairement par la religion que nous pratiquons. Pour rester au plus près du texte, Pierre nous révèle que le divin peut s’exprimer à travers d’autres pratiques que la nôtre. Cela veut dire, par exemple, que si nous avons des amis, des camarades de classe qui n’ont pas les mêmes coutumes que nous, qui n’écoutent pas la même musique que nous, qui ont des habitudes alimentaires différentes, qui ont d’autres loisirs, rien n’empêche qu’ils soient porteurs d’une vérité divine qui leur faire découvrir ce qu’est une vie authentique. Il se pourrait même que nous ayons des choses à apprendre à leur contact. Cela nous apprend que, par delà les coutumes, les habitudes, les effets de mode, les cultures particulières, il peut y avoir une véritable communion sur les choses bien plus essentielles : par delà ces différences, nous pouvons avoir un regard commun sur le monde, sur les sujets qui comptent vraiment, sur ce qui est injuste, sur ce que nous voudrions améliorer.
En abordant l’action du Saint Esprit qui souffle au-delà de l’Eglise, au-delà des institutions religieuses officielles, l’auteur des Actes des Apôtres nous invite à avoir de la considération pour d’autres cultures que la nôtre, pour d’autres traditions, d’autres manières de vivre. Ce texte ne dit pas que tout est bon à imiter. Ce texte nous rappelle que nous n’avons pas le monopole des bonnes pratiques ni des bonnes idées. Ce texte nous rappelle que le monothéisme que nous professons est la conviction du caractère universel de la zoe, la vie en plénitude, la vie qui fait sens. Pas plus que la parole de Dieu n’est enfermée dans un livre, la vie pleinement accomplie n’est pas réservée à une communauté particulière.
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Ce que nous avons vu de la Parole de Dieu et du rapport aux non judéo-chrétiens conduit à dire que l’Evangile est pour tous. Le christianisme naissant, à travers Pierre et plus encore à travers Paul, va considérer l’Evangile comme un bien commun qui se transmet par divers canaux, officiels ou non et que personne ne peut maîtriser. L’Evangile qui s’exprime par delà les textes bibliques et les institutions chrétiennes, se révèle de manières multiples. Cela ne rend pas inutile la théologie chrétienne. Comme nous le constatons dans cet épisode, la théologie chrétienne va permettre à chacun de prendre conscience de la spiritualité qui s’éveille en lui. La théologie chrétienne se met au service de tous, inconditionnellement, pour aborder le fait religieux qui touche chacun. La théologie chrétienne aide chacun à penser son existence pour le temps présent. La théologie chrétienne révèle la possibilité de la foi et d’une vie divine par grâce seule.
Amen
Lecture de la Bible
Actes 11:1-18
Les apôtres et les frères qui étaient dans la Judée apprirent que les païens avaient aussi reçu la parole de Dieu.
2 Et lorsque Pierre fut monté à Jérusalem, les fidèles circoncis lui adressèrent des reproches, 3 en disant: Tu es entré chez des incirconcis, et tu as mangé avec eux.
4 Pierre se mit à leur exposer d’une manière suivie ce qui s’était passé. 5 Il dit: J’étais’étais dans la ville de Joppé, et, pendant que je priais, je tombai en extase et j’eus une vision: un objet, semblable à une grande nappe attachée par les quatre coins, descendait du ciel et vint jusqu’à moi. 6 Les regards fixés sur cette nappe, j’examinai, et je vis les quadrupèdes de la terre, les bêtes sauvages, les reptiles, et les oiseaux du ciel. 7 Et j’entendis une voix qui me disait: Lève-toi, Pierre, tue et mange. 8 Mais je dis: Non, Seigneur, car jamais rien de souillé ni d’impur n’est entré dans ma bouche. 9 Et pour la seconde fois la voix se fit entendre du ciel: Ce que Dieu a déclaré pur, ne le regarde pas comme souillé. 10 Cela arriva jusqu’à trois fois; puis tout fut retiré dans le ciel.
11 Et voici, aussitôt trois hommes envoyés de Césarée vers moi se présentèrent devant la porte de la maison où j’étais. 12 L’Esprit me dit de partir avec eux sans hésiter. Les six hommes que voici m’accompagnèrent, et nous entrâmes dans la maison de Corneille.
13 Cet homme nous raconta comment il avait vu dans sa maison l’ange se présentant à lui et disant: Envoie quelqu’un à Joppé, et fais venir Simon, surnommé Pierre, 14 qui te dira des choses par lesquelles tu seras sauvé, toi et toute ta maison.
15 Lorsque je me fus mis à parler, le Saint-Esprit descendit sur eux, comme sur nous au commencement. 16 Et je me souvins de cette parole du Seigneur: Jean a baptisé d’eau, mais vous, vous serez baptisés du Saint-Esprit.
17 Or, puisque Dieu leur a accordé le même don qu’à nous qui avons cru au Seigneur Jésus-Christ, pouvais-je, moi, m’opposer à Dieu? 18 Après avoir entendu cela, ils se calmèrent, et ils glorifièrent Dieu, en disant: Dieu a donc accordé la repentance aussi aux païens, afin qu’ils aient la vie.
Traduction NEG
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