Pâques 2021 : Vendredi Saint

Jean 19:17-22

Culte du 2 avril 2021
Prédication de Dominique Hernandez

Vidéo de la partie centrale du culte

Lecture de la Passion
selon Jean


Oratoire du Louvre
Lecture dialoguée d’après la traduction
de l’Évangile de Jean
par Florence Delay et Alain Marchadour (éd. Bayard)

Méditation de la Pasteure Dominique Hernandez

Avec, à l'orgue, Sarah Kim, organiste co-titulaire,
et avec la participation musicale de
Samuel Zattoni Rouffy, soliste,
et du Choeur de l’Oratoire du Louvre
dirigé par Fabien Aubé

Lecteurs : Micheline Bocher le Milon
Juliette Wasson, Quentin Bourgault, Aurore Saglio-Thébault

MEDITATION

Voici l’heure. C’est l’heure.
Cette heure annoncée depuis le début de l’évangile de Jean quand, à Cana, alors que la noce manque de vin, Jésus répond à sa mère : Mon heure n’est pas encore venue.
C’est l’heure.
Celle inscrite au premier verset du chapitre 13, au commencement du récit de la Passion, nous l’avons lu hier: Avant la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venue de passer de ce monde à son Père, Jésus aima les siens qui étaient de ce monde et les aima jusqu’à l’extrême.
C’est l’heure du passage, l’heure de passer du monde au Père : c’est l’heure d’une Pâque. Le commencement de Pâques. Pour l’évangéliste Jean, la mort de Jésus est ainsi interprétée : l’envoyé retourne vers Celui qui l’a envoyé.

En cette heure, Pilate s’agite. Il sort du prétoire, il y entre, intérieur, extérieur, vers les grands-prêtres et la foule, vers Jésus. Il questionne, il parle à l’un, aux autres, sans recevoir de réponse claire, sans convaincre qui que ce soit.
Lui, le gouverneur représentant le maître du monde, l’empereur de Rome, ne prononce qu’une parole sans autorité et sans écho.
Lui, que Philon d’Alexandrie décrit comme un homme cruel, inflexible et buté, méprisant et colérique, est pris de peur. Celui qui a été amené devant lui représente une étrangeté qu’il ne comprend pas. Celui qui a été amené devant lui ne peut être inscrit dans aucune case, selon aucun code du monde de Pilate dont les représentations, les repères, les convictions semblent soudain de si peu de poids, fumée, vanité, illusion. Pilate fait face au vertige d’un au-delà du monde connu qui surgit dans la présence de cet homme singulier qui distingue la vérité de la religion et la justice du pouvoir, un homme qui ne craint ni les armes ni les outrages ni la mort. Un homme de liberté et de don.
En cette heure, Pilate cède, il livre Jésus à la mort, prolongeant ainsi jusqu’à la croix le geste de Judas. Il fallait bien que la parole de Jésus sur la mort qu’il allait subir se réalisât.
Cède-t-il face aux cris de mort, aux menaces des grands-prêtres qui s’en sont remis à César ?
Cède-t-il devant l’inébranlable liberté de Jésus, devant cette volonté de déposer sa vie, volonté qui surplombe la volonté de ceux qui veulent prendre sa vie ?

Pilate écrit. Lui dont la parole n’a pas eu de poids, lui dont l’autorité n’a pas été reconnue ni par les grands-prêtres, ni par Jésus, il grave quelques mots sur un panneau accroché à la croix où Jésus est crucifié : Jésus le Nazoréen, le roi des juifs.
Non seulement il l’écrit, mais il veut le faire connaître le plus largement possible : l’inscription est rédigée en trois langues, hébreu, grec et latin, et tout le monde, le monde entier peut la lire. Jésus le Nazoréen, le roi des juifs.
Comme si le fait d’écrire conférait à la déclaration la densité qui manquait aux paroles prononcées.
Comme si la déclaration d’identité s’inscrivait ainsi dans une forme plus résistante que celle de l’oralité.

L’inscription est contestée, mais Pilate la maintient. Pilate s’accroche à ce qu’il a écrit plus qu’à ce qu’il avait dit. C’est son dernier mot : J’ai écrit ce que j’ai écrit.
Lui, le magistrat qui n’a pas prononcé de verdict de jugement, veut-il indiquer ainsi le motif de la condamnation de celui qui n’était pas condamnable ?
Ou est-ce une manière de rendre aux grands-prêtres la monnaie de leur pièce ? Ils l’ont manipulé, menacé. Cet écriteau représenterait une manière de venger l’affront, de mettre en défaut les grands-prêtres au lieu même de sa défaite.
Ou est-ce une manière d’avertissement pour tout prétendant à la royauté sur Israël ? L’empereur romain fait et défait les rois, sur Israël comme ailleurs : toute velléité de contestation de la paix romaine entraîne une répression.
Ou encore est-ce une manière de rendre compte d’un bouleversement intérieur éprouvé par le gouverneur ? Une manière un peu détournée d’exprimer au moins un doute, doute qu’une légende transformera en conversion de Pilate, jusqu’au martyre, la décapitation ordonnée par l’empereur Tibère en personne.
 
Quoiqu’il en soit, ce qu’écrit Pilate, même avec l’obstination de l’écriture, est extrêmement réducteur car Pilate reste dans ses catégories habituelles :   
     L’origine de Jésus est indiquée : de « Nazareth » . Une origine géographique, de cette géographie de découpage, de territoires, d’invasion et de domination, cette origine géographique qui provoque mépris, exclusion, et des vies brisées, écrasées, englouties.
      « Roi des juifs » : c’était la première question de Pilate à Jésus : es-tu le roi des juifs ? cette titulature s’en tient à l’idée mondaine d’un règne de pouvoir, d’injonctions, d’intérêts et de corruption. Ce que ni David ni Salomon n’avaient évité.
 
C’est cela qui est accroché sur la croix au-dessus de Jésus : la définition d’un homme, le pouvoir de définir un homme, qui est, toujours, un jour, prétexte pour vouloir se débarrasser de lui.
Jésus le Nazoréen, le roi des juifs
L’origine géographique reste silencieuse sur l’origine vitale de Jésus, origine en Dieu, origine de Dieu.
Le titre manque la dimension véritable et universelle, la vérité du royaume qui n’est pas de ce monde.
Mais sur la croix, depuis cette croix, le passage est ouvert de ce monde à la vérité du royaume.

L’heure du passage de Jésus vers le Père, c’est
     l’heure de la crise des pouvoirs religieux, politique et personnel,
     l’heure de la crise des idoles et de la fausse gloire qu’elles procurent,
     l’heure de la crise des identités qui cloisonnent l’humanité et la hiérarchisent.
Elle indique le passage ouvert vers une autre manière d’être vivant, d’être humain dans le monde des humains, une autre économie : économie de don, de service d’autrui, économie de vie offerte, une économie d’amour jusqu’à l’extrême.
Voici l’heure. C’est l’heure.


LIVRET DU CULTE

Lecture de la Passion selon Jean

Oratoire du Louvre

Lecture dialoguée d’après la traduction de l’Évangile de Jean

Par Florence Delay et Alain Marchadour (éd Bayard)

Méditation de la Pasteure Dominique Hernandez

Avec la participation musicale de
      Samuel Zattoni Rouffy, soliste
      Sarah Kim, organiste
et le Choeur de l’Oratoire du Louvre
     dirigé par Fabien Aubé

Lecteurs : Micheline Bocher le Milon
Juliette Wasson, Quentin Bourgault, Aurore Saglio-Thébault

Chant d’assemblée :

Cantique L&P n°143 "Oh! Jésus ta croix domine"

Orgue : Franz Liszt - Weinen, Klagen, Sorgen, Zagen (extrait)

Lecture : Jean 18, 28-38

Orgue : Samuel Barber, Adagio

Lecture : Jean 18, 38-40

Jean-Sébastien Bach : Erwäge
par Samuel Zattoni Rouffy

Considère, comme son dos teinté de sang,
en tous points ressemble au ciel!
du flot de nos péchés se sont retirées,
le plus beau de tous les arcs-en-ciel
se tient en signe de la grâce de Dieu!

Lecture : Jean 19, 6-11

Choral 22 "Durch dein Gefängnis"

Par Ta captivité, ô Fils de Dieu,
nous est venue la liberté ;
Ta prison est le trône de la grâce,
l'asile de tous les dévots ;
car si Tu n'étais entré en servitude,
éternelle eût dû être notre propre servitude.

Lecture : Jean 19, 12-16

Orgue : Michelangelo Rossi, Toccata Septima

Lecture : Jean 19, 17-22

Méditation par la Pasteure Dominique Hernandez

Offrande

Choral 26 "In meines Herzens Grunde"

Dans le fond de mon coeur,
ton nom et ta croix seuls
resplendissent en tout temps et en toute heure;
de cela je puis me réjouir.
Montre-moi en image,
pour me consoler dans ma détresse,
comment toi, Seigneur Christ, si doucement
tu as saigné jusqu'à la mort.

Lecture : Jean 19, 25-30

Choral 37 « Hilfe, Christe »

O fais, Christ, Fils de Dieu,
par Ta souffrance amère,
que constamment soumis à Toi
nous évitions tout vice ;
Que Ta mort et sa cause,
avec fruit nous méditions
et faiblement,
nous T'offrions nos sacrifices.

Lecture : Jean 19, 31-42.

Choral : « Ruht Wohl »

Repose en paix, sainte dépouille
que désormais je ne pleure plus.
Repose en paix
et mène-moi aussi vers le repos.
Le tombeau, tel qu'il vous est destiné
et qui en outre ne recèle aucune détresse.
m'ouvre le ciel
et ferme les enfers.

Choral final 40 "Ach Herr, lass dein lieb Engelein"

Ah, Seigneur, laisse tes chers angelots,
à la dernière extrémité, mon âme
porter (par eux) dans le sein d'Abraham;
mon corps, dans sa petite chambre de repos,
bien doucement, sans aucun tourment ni peine,
(laisse) reposer jusqu'au dernier jour!
Alors, de la mort éveille-moi,
que mes yeux te voient
en toute joie, ô fils de Dieu,
mon Sauveur et Trône de grâce!
Seigneur Jésus Christ, exauce-moi;
je veux te louer éternellement!

Lecture de la Bible

Evangile de Jean, chapitre 19, versets 17 à 22

17  Jésus, portant sa croix, arriva au lieu du crâne, qui se nomme en hébreu Golgotha.
18  C'est là qu'il fut crucifié, et deux autres avec lui, un de chaque côté, et Jésus au milieu.
19  Pilate fit une inscription, qu'il plaça sur la croix, et qui était ainsi conçue: Jésus de Nazareth, roi des Juifs.
20  Beaucoup de Juifs lurent cette inscription, parce que le lieu où Jésus fut crucifié était près de la ville: elle était en hébreu, en grec et en latin.
21  Les principaux sacrificateurs des Juifs dirent à Pilate: N'écris pas: Roi des Juifs. Mais écris qu'il a dit: Je suis roi des Juifs.
22  Pilate répondit: Ce que j'ai écrit, je l'ai écrit.

Vidéo du culte entier

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