Non pas la paix, mais l’épée

Matthieu 10:24-36

Culte du 30 août 2020
Prédication de Agnès Adeline-Schaeffer

Vidéo du culte entier

Culte à l'Oratoire du Louvre

Dimanche 30 Août 2020
Non pas la paix, mais l'épée.
Matthieu 10 : 34-36

Culte par le Pasteur Agnès Adeline-Schaeffer
Musique : David Cassan, organiste co-titulaire

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Orgue
 
Annonce de la grâce

La grâce et la paix nous sont données de la part de Dieu notre Père en son Fils Jésus notre frère.
Bienvenue à vous tous dans cette maison de prière. Nous sommes rassemblés ce matin comme chaque fois que nous célébrons un culte, pour rendre gloire à Dieu, exprimer notre reconnaissance et lui confier ce qui nous anime. Et si ce matin c’est un culte spécial parce que nous commémorons une date importante de l’histoire de notre église : le 24 Août 1572, début du massacre de la Saint Barthélémy, cela reste un culte rendu à Dieu seul. Il est bon de garder en mémoire l’histoire des hommes pour se replacer sans cesse dans la grâce de Dieu et rester vigilant quant aux violences qui sont faites aux humains, et malheureusement souvent au nom de Dieu lui-même.
Indépendamment de cela, et en vertu des consignes sanitaires de nouveau en vigueur depuis quelques jours, voici quelques recommandations pour ce  culte et pour tous les cultes en général :
Si vous ne faites pas partie du même foyer que votre voisin, voisine, merci de vous déplacer et de laisser une chaise vide à côté de vous.
Merci de garder votre masque pendant toute la durée du culte, y compris pendant les chants.

Réunissons-nous dans la communion fraternelle avec le 1er chant spontané
Répons : Bénissons Dieu le seul sauveur. (Ps 134).
 
Bénissons Dieu le seul Seigneur, nous qu’il choisit pour serviteurs.
Levons nos mains dans sa maison, pour bénir et louer son nom.

Louange
Psaume 8, texte original de Clément Marot, révisé par Roger Chapal en 1970
 
Ton nom, Seigneur, est un nom magnifique,
Sans fin, la terre en reprend le cantique ;
Elle répond de toute sa beauté,
A la splendeur du ciel illuminé.

Mais tu choisis la louange parfaite,
Des plus petits, des enfants qu’on allaite,
Pour révéler le secret de ton nom.
Ainsi, leurs voix, à l’orgueilleux répond.

J’ai vu ta main peupler le ciel immense,
De tant de feux qui tournent en silence.
Et j’ai pensé, cet homme, si petit,
Qu’est-il , grand Dieu, que tu en aies souci ?

Eternel, Dieu de la vie, nous te louons et nous te chantons !
 

Chant d'Assemblée
Dans le recueil « le Psautier Français », nous chanterons le psaume 68, B : "Que Dieu se montre seulement", dont nous chanterons les strophes 1, 2, 4 et 5.

1. Que Dieu se montre seulement,
Et l'on verra en un instant
Abandonner la place.
Le camp des ennemis épars,
Epouvanté de toutes parts,
Fuira devant sa face.
On les verra soudain s'enfuir
Comme l'on voit s'évanouir
Une épaisse fumée ;
Comme la cire fond au feu,
Ainsi des méchants devant Dieu
La force est consumée.

2. Mais en présence du Seigneur,
Les justes chantent sa grandeur
Et sa gloire immortelle ;
Car sur la nue il est porté,
Son nom est plein de majesté :
Le Seigneur il s'appelle.
Réjouissez-vous devant lui :
Il est de la veuve l'appui,
Des orphelins le Père ;
Aux captifs il porte secours
Et de l'affligé, tous les jours,
Il entend la prière.
4. Que les monts les plus orgueilleux,
Devant ce mont où règne Dieu
Laissent toute arrogance :
Elevé sur cette hauteur,
Celui qui est notre Seigneur
Agit avec puissance.
Venez vers ce roi glorieux,
Portez lui vos dons précieux,
Tressez une couronne ;
Venez, chanteurs et musiciens,
Et que nos chants et que nos mains
S'offrent au Dieu qui donne.

6. O Seigneur tu nous a fait voir
Et ton amour et ton pouvoir
Dans mainte délivrance.
Fais-nous voir encore aujourd'hui
L'oeuvre que ton amour construit
Et quelle est ta puissance !
Toute la terre et tous les cieux
Ensemble tournés vers leur Dieu
Célèbrent sa présence :
A toi qui fais notre bonheur,
A toi, grand Dieu, soient tout honneur,
Force et magnificence.

Volonté de Dieu
Ecoutons la volonté de Dieu à notre égard, pour aujourd’hui et les jours qui viennent.
Dans l’Evangile de Marc,  nous lisons :

Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, 
de toute ton âme, de toute ta pensée et de toute ta force.
C'est là le grand et le premier commandement,
et voici le second, qui lui est semblable :Tu aimeras ton prochain comme toi-même.
Il n’y a pas d’autres commandements plus grands que ceux-là.

Répons : "Parle, parle Seigneur, ton serviteur écoute…"

Parle, parle Seigneur, ton serviteur écoute :
Je dis ton serviteur, car enfin je le suis.
Je le suis, je veux l’être, et marcher dans ta route,
Et les jours et les nuits.

Prière de repentance
Tels que nous sommes, présentons-nous maintenant devant Dieu :

Eternel,  pardonne nos silences,  quand il fallait parler.
Pardonne  nos vaines paroles, quand il fallait écouter
Pardonne encore nos discours, quand il fallait agir.
Pardonne-nous d’avoir confondu ton Évangile avec nos sagesses.
Pardonne-nous d’avoir restreint notre service à ceux qui nous plaisent.
Pardonne encore notre médiocrité, notre manque d’amour et de générosité.
Pardonne-nous nos offenses comme nous tentons de pardonner à ceux qui nous ont offensés.
Et apprends-nous à pardonner sans blesser ceux que nous pardonnons,
Nous te le demandons, au nom de ton amour pour nous tous, le Christ, notre frère.  AMEN.
 
Répons : « J’aime mon Dieu, car il entend ma voix ».

J’aime mon Dieu car il entend ma voix,
Quand la frayeur ou le tourment m’oppresse,
Quand j’ai prié au jour de ma détresse,
Dans sa bonté, il s’est tourné vers moi.

Annonce du pardon
Dieu renouvelle pour nous sa grâce et il dit à chacun et chacune de nous :
Mon enfant,
Tes péchés sont pardonnés, 
Va, ta foi t'a sauvé, 
Avance en paix.

Chantons à Dieu notre reconnaissance :
Répons « Combien grande est ta gloire (ps 92).

Combien grande est ta gloire, en tout ce que tu fais, 
Et combien tes hauts faits sont dignes de mémoire !
Tes œuvres sans pareilles  ont réjoui mon cœur,
Je veux chanter, Seigneur, tes divines merveilles !
 
Confession de foi
Nous partageons une confession de foi,  attribuée au pasteur Charles Wagner :
"Je crois qu’il nous a aimé le premier".

Je crois en Dieu.
Je crois qu’il nous a aimé le premier ; avant que nous existions, avant nos pères, avant les débuts obscurs dont sortit l’humanité, il nous a aimés.
Mieux qu’une mère en espérance d’enfant qui pense à l’inconnu qui sommeille en elle, je crois que Dieu nous a aimés d’avance et portés.
Car nous sommes son espérance et nous sommes sa crainte, sa joie et sa douleur.

Je crois que malgré l’immense peine qu’il subit par nous, Dieu nous a voulus et nous veut encore, toujours.
A travers les obstacles, les chemins perdus, les gouffres, les ombres de mort, je crois que Dieu nous veut, nous mène et communie avec nous.

Je crois que Dieu en Jésus-Christ nous aime victorieusement, avec une puissance devant laquelle tout cèdera.
Il boira avec tous les calices, il combattra tous les combats, il descendra dans toutes les tombes, jusqu’à la fin et à la fin sera bonne.
Oui, je crois que Dieu est amour et que son Esprit nous anime et nous porte.

Amen.

(D’après une prière de Charles Wagner - Evangile et liberté n° 239. Mai 2010).                                                  
Répons : Grand Dieu, nous te bénissons…

Grand Dieu, nous te bénissons, nous célébrons tes louanges,
Eternel, nous t’exaltons, de concert avec les anges,
Et prosternés devant toi, nous t’adorons, ô grand Roi !
Et prosternés devant toi, nous t’adorons, ô grand Roi !
 
Doxologie
« Gloire à Dieu dans les cieux et sur la terre, et d’éternité en éternité »

 
Lecture du passage de la Bible médité.

Evangile de Matthieu, chapitre 10, versets 34 à 36.

 « Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre ! Je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée. Car je suis venu mettre la division entre l’homme et son père, entre la fille et sa mère, entre la belle-fille et sa belle-mère, et l’on aura pour ennemis les membres de sa famille. »

 
Cantique : Louange et Prière, n°183, "Daigne en cette heure, ô tendre Père !"
Strophes 1, 2 et 3.

1. Daigne en cette heure, ô tendre Père,
Te révéler à tes enfants!
Viens exaucer notre prière !
Reçois l'hommage de nos chants !

Refrain
Remplis nos coeurs, par ta présence,
De foi, d'amour et d'espérance!
2. Pour qu'à l'appel de ta voix sainte
Nos coeurs se rangent sous ta loi,
Et qu'au sortir de cette enceinte
Nous nous sentions bénis de toi..

3. Viens nous parler de ton Royaume
Où nous appelle ton amour,
Et pour livrer nos luttes d'hommes,
Arme nos bras jour après jour.

Prière :

Eternel, Dieu de la vie,  nous entendons à nouveau ces mots de la Bible, des mots connus, peut-être trop connus et  usés par nos habitudes ; peut-être trop entendus et abimés par nos désobéissances. Mais ce matin, donne-nous d’y entendre ta Parole vivante, que ton esprit nous atteigne au plus profond de  nous-mêmes qu’il lève nos défenses, nos méfiances et nos doutes afin que ta parole rencontre nos intelligences, nos cœurs et nos vies, qu’elle les éclaire et les nourrisse. Amen (Pasteur Marcel Manoël).

Lecture biblique : Matthieu 10, versets 34 à 36.
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Orgue

Prédication

Amis, frères et sœurs, 

Décidément, il n’est vraiment pas facile de se repérer dans les paroles des Evangiles ! 

Dans ce même évangile de Matthieu,  au chapitre 5, on peut lire,  par exemple dans le texte de Béatitudes : « Heureux les artisans de paix, ils seront appelés «fils de Dieu », ou encore dans le Sermon sur la montagne,  une exhortation de Jésus à aimer ses ennemis, puis quelques chapitres  plus loin, on trouve  ces mots, « Je ne suis pas venu apporter la paix mais l’épée ».

Le texte de l’Evangile d’aujourd’hui est rude. Si nous pensions que Jésus était venu apporter la paix, nous nous trompons, il est venu apporter l’épée ! 

En ce jour de commémoration de la Saint-Barthélémy, ne serait-ce pas un choix un peu provocateur de la part du prédicateur de choisir ce texte polémique ? C’est possible….

Parce que tout de même, dans ce passage, Jésus s’en prend à la famille, qui est censée nous être chère ! En tout cas, il s’en prend aux relations familiales, dont nous savons pertinemment que ce n’est pas si simple au fond. D’une façon ou d’une autre, nous savons qu’il n’y pas même pas besoin de Jésus pour qu’un fils se dresse contre son père, ou qu’une fille tienne tête à sa mère, et peut-être est-ce une situation plus connue officiellement, qu’une belle-fille se positionne contre sa belle-mère…Alors aujourd’hui…serait-ce l’évangile de la discorde que nous entendons ? Oui, peut-être…

Si nous prenons ce texte au pied de la lettre, on peut y entendre des mots subversifs, et même un appel justifié à la révolte. Et dans l’ensemble des familles que sont les nôtres, avec les diversités humaines, culturelles et  religieuses qui les composent, chacun sait que si on veut finir un repas tranquillement, c’est mieux d’éviter les sujets de politique, d’argent et de religion. 

De ce passage,  nous ne retenons que la phrase qui choque, et c’est justifié : « Je ne suis pas venu pour apporter la paix mais l’épée». 

Les traductions sont loin d’être unanimes : à la place de l’épée, on trouve le glaive. Dans le texte parallèle de l’évangile de Luc, on trouve la division, et même le combat, la guerre. 

Alors, que faut-il comprendre exactement ? 

De quel glaive, de quelle épée ou de quelle guerre s’agit-il ? Guerre contre les autres ? Guerre sainte à la manière d’une croisade ? 

L’épée est d’abord considérée comme une arme qui tue. Ce texte a servi d’alibi à de nombreuses évangélisations douteuses par delà le monde, au nom de Dieu.  Les manuels d’histoire sont remplis de ces théâtres d’horreur. 

Et tout cela à cause d’une traduction, non pas mal faite, mais d’une traduction d’un mot qui a subi les transformations nécessairement dues au temps : initialement, le mot épée,  en grec « machaïra », veut dire d’abord un couteau, cela ne veut pas dire «  ce qui tue », mais ce qui sépare, ce qui tranche. Par exemple, en hébreu biblique,  on dit d’un mariage non pas qu’il est scellé, mais qu’il est tranché. On tranche une alliance avec quelqu’un. L’alliance est coupée, tranchée, symboliquement par un couteau. Contre toute attente, cela veut dire qu’elle est solide, parce qu’il s’agit d’une fusion sans confusion, c’est à dire une fusion qui appelle l’autonomie, et même l’indépendance, parce que deux personnes disjointes, ont des points communs favorables à une union sans que pour autant elles perdent leur propre identité dans cette union. 

Alors : ce couteau est là pour symboliser non ce qui tue, mais ce qui sépare, même si parfois, ce qui sépare passe par la violence verbale ou la violence physique, conséquences de la nature humaine, imparfaite. 

Avec le Christ, une nouvelle façon d’appréhender la foi en  Dieu est en train de naître. Il se met en place une audace qui fera naître des conflits à l’intérieur des familles. Conflits que nous connaissons aussi à notre niveau, lorsqu’à l’intérieur de nos propres familles, il y a ceux qui croient et ceux qui ne croient pas, ou qui croient différemment, ceux qui pratiquent et ceux qui ne pratiquent pas. Mais ici, il s’agit d’une nouveauté extrême. Le Christ propose la liberté de l’esprit, l’affranchissement personnel dans  la foi, la libération même des liens religieux. Il vient remettre en question la pratique religieuse de son époque, il vient réveiller un judaïsme empêtré dans ses contradictions, dans sa suffisance, dans sa supériorité. Il vient soulever des questions théologiques, et replacer tout le monde devant la Loi de Dieu. Il discute la Parole de Dieu. Au 16ème siècle, on aurait dit qu’il « dispute » la Parole, par les textes bibliques. Parce qu’une  parole de la Bible qui ne soulève plus de questions ou qui ne suscite plus d’interrogations ou de remise en question est une parole déjà jetée aux oubliettes. Elle n’est plus une parole vivante,  mais une lettre morte. 

Une parole vivante provoque des discussions, qui peuvent aller parfois jusqu’au conflit de générations. Et au moment où ce texte de l’Evangile est écrit, les familles juives sont en train d’éclater, avec la génération qui reconnaît en Jésus le Messie, contre celle qui reste fidèle à la loi de Moïse et des Prophètes. 

C’est sans doute pour cela que l’évangile de Matthieu met dans la bouche de Jésus ces paroles de conflits de génération inévitables. Cette libération passe par la douleur de la résistance, de part et d’autre. 

Résistance de la génération des Anciens qui ont toujours cru d’une certaine manière, légitimés par le passé,  et qui souhaitent rester fidèles à la Parole reçue, sans changer une virgule,  face à la provocation de la nouvelle génération, qui souhaite tout remettre en question, encouragée par le Christ lui-même, qui montre l’exemple, jusqu’à donner sa propre vie, comme accomplissement même de ce qu’il annonce et de ce qu’il vit. 

Pourtant, il y a bel et bien un côté positif dans ce passage biblique. Parce que ce texte est au fond, un appel à la bonne santé spirituelle :   Jésus vient donner une identité propre à l’intérieur de la famille. Il demande, en tout cas, il suggère que le cordon ombilical spirituel soit coupé. C’est ce que la psychanalyste et exégète, Marie Balmary propose dans son livre : «Le sacrifice interdit » : le couteau sépare symboliquement et positivement une personne de l’autre ; le fils n’est pas son père et la fille a le droit d’être différente de sa mère…*

Par tous ces exemples, également par les conflits de génération  auxquels il fait allusion, Jésus apprend à ses contemporains la liberté de  devenir des adultes dans la foi. Et comme sa Parole nous rejoint aujourd’hui, elle nous apprend encore à nous débarrasser de tout ce qui nous paralyse et nous empêche d’avoir notre propre relation avec Dieu et peut-être même,  nous empêche de vivre notre foi dans la tradition religieuse de notre choix.  Nous sommes donc invités à ne pas calquer notre foi, sans réfléchir, par habitude, ou par tradition, voire par facilité, sur celle de notre père ou de notre mère. Mais nous sommes invités à entrer dans notre propre relation à Dieu, en posant les questions qui dérangent, mais qui font avancer, en faisant les remarques sur ce que nous ne comprenons pas, sur ce qui nous gêne, ou ce qui nous choque, dans la Bible, et surtout, dans l’interprétation souvent phagocytée,  que les  religieux en ont faites.   D’une certaine façon, le Christ nous demande de ne pas avaler tout rond  des versets bibliques qui n’auraient aucun sens pour notre vie, et qui invariablement, nous emmèneraient sur un chemin de culpabilité inutile et hélas, bien souvent irréversible. 

Mais au fond, n’est ce pas ce qui s’est produit au moment de la Réforme ? 

Martin Luther et Jean Calvin se sont affranchis, d’une certaine manière, de l’enseignement de leurs Pères dans la foi, pour proposer de nouveaux chemins de foi, de nouvelles pratiques, sans doute pour que le christianisme de leur époque puisse devenir un christianisme d’avenir, qui parle aux générations nouvelles de leur temps. 

Alors, amis, frères et sœurs, aujourd’hui, se souvenir de la Saint-Barthélémy, 448 ans après… Est-ce si important que cela ? 

Parce que tout de même, la Saint Barthélemy n’est pas la meilleure période de l’histoire de France et encore moins celle de l’histoire des protestants. Mais c’est l’histoire de la difficulté d’un choix de conscience. Et c’est de cette façon que je ferais le lien entre cette triste partie de l’histoire de notre pays et la parole du Christ : « Je ne suis pas venu apporter la paix sur la terre, mais l’épée », en reprenant les paroles de ma consœur Béatrice Cléro-Mazire au sujet de Gaspard de Coligny, je cite : 

« Choisir en conscience nécessite de couper du tranchant de l’épée entre ce qui semble juste et ce qui semble aller contre les convictions profondes que l’on défend.
Étrangement, la cohérence intime implique, non pas une harmonie, mais une coupure. Comme l’acte de création de Dieu se fait en coupant pour sortir de la confusion et du chaos, l’acte de foi exerce des coupes nettes dans nos vies et implique des choix qui ne permettent pas de tenir tout en même temps. L’Évangile de Matthieu nous dit que le choix de suivre Jésus va jusqu’à couper les liens les plus élémentaires entre l’homme et son père ou la fille et sa mère ; il en va de la conversion comme d’une nouvelle vie, d’une nouvelle naissance, d’un nouvel ordre. Coligny n’aura pas à se couper de son frère Odet, le cardinal, au nom de la foi, puisque celui-ci deviendra lui aussi protestant peu après son frère. Mais il n’empêche qu’entrer en dissidence vers 1560 et faire célébrer ouvertement un culte protestant, représente un choix aussi grave que celui d’entrer en guerre
 ».  **

C’est un acte d’indépendance et d’autonomie religieuse, puis de résistance,  que les protestants de cette époque paieront de leurs vies. Mais qui n’arrêtera ni l’émergence de cette nouvelle compréhension de la foi chrétienne, ni son organisation ecclésiale, même clandestine pendant deux siècles. 

Mais nous savons que l’être humain a la mémoire courte. C’est sûrement à cause de cette amnésie qui le guette constamment comme une gangrène sournoise et perfide qu’il passe beaucoup de temps à se souvenir. 

Commémorer un anniversaire, que ce soit dans le domaine religieux, historique ou politique, c’est mettre en évidence le chemin parcouru.  Et dans le domaine religieux, plus particulièrement, surtout 448 ans après, il est important de retracer le chemin parcouru, et de s’en souvenir à la lumière de la foi. La vie en Eglise suppose un enracinement dans la mémoire du passé, tout en l’analysant à la lumière des textes bibliques et du contexte de l’histoire passée, puis du contexte présent. 

Commémorer, c’est faire un travail de mémoire, certes, mais qui dépasse les simples références historiques et qui prend sa source dans une mémoire plus ancienne, inscrite dans le Premier Testament de l’histoire biblique, où les rappels de la sortie d’Egypte ponctuent comme un refrain la vie d’Israël, de génération en génération. « Souviens toi, je suis l’Eternel ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Egypte » (Ex 20/2). 

Cette mémoire n’est pas qu’une résurgence nostalgique et glorieuse du passé, mais elle devient une mémoire,  source d’action de grâces, ponctuées d’actions concrètes qui ouvrent un avenir nouveau : « Je te donnerai ce pays où coulent le lait et le miel »(Ex 33/3). 

Aujourd’hui le paysage religieux a changé. Les chemins et les parcours de foi se sont considérablement diversifiés. Nous vivons dans une société laïcisée à l’extrême où la foi, quelle qu’elle soit, est confinée, si j’ose dire, à la sphère privée. 

Il est courant de dire que la Réforme a proposé aux chrétiens du 16ème siècle de devenir des chrétiens « libres ». En fait, par sa réappropriation des textes bibliques, la Réforme a projeté en quelque sorte la lumière de l’Evangile sur la liberté que Jésus- Christ avait déjà apporté en son temps. La liberté d’être soi-même, en conscience, devant Dieu. Et cela passe par un chemin de coupure, un chemin d’affranchissement que le Christ a fait, pour lui-même, en son propre temps, jusqu’au don de sa vie. 

Les protestants sont poursuivis par leur « semper reformanda », leur  vocation réformatrice toujours à recommencer. Encore faut-il la vivre, cette vocation, non comme un retour en arrière, qui nous sécuriserait, mais plutôt comme un projet, qui nous propulse vers l’avenir. Je m’en tiendrai au domaine religieux. Personnellement, je fais toujours mienne cette idée que toute religion, y compris le protestantisme, peut devenir un lieu d’obscurantisme et de manipulation, lorsqu’elle réduit son enseignement et son témoignage, à une somme de doctrines que l’on doit croire, sans discuter, ou à un discours culpabilisant, ou encore à un rituel que l’on doit pratiquer sans se poser de questions.  Au fond, cette vocation réformatrice concerne toutes les religions.  On ne naît pas croyant libéral,  on le devient, ne serait-ce que parce que les événements de la vie nous y amènent et que la foi qui nous anime est vivante et en évolution.  C’est, me semble-t-il, une question de bonne santé,  spirituelle et religieuse, liée à la croissance de la personne.  

Nous avons donc notre propre chemin de coupure à parcourir, un chemin d’indépendance et d’autonomie, de rencontre personnelle avec Dieu sans confusion avec les hommes et les femmes de notre temps.

Au fond, « le seul couteau dont Jésus-Christ a usé, c’est celui de la parole et de la raison. Dans son sillage, notre protestantisme libéral a encore un rôle à jouer, pour promouvoir une nouvelle liberté de pensée, de critiquer et de croire, et proposer, à la suite de ses prédécesseurs, des chemins nouveaux pour un christianisme d’avenir ». **  

Amen

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Pour aller plus loin : 
Ouvrages consultés : 

  • Jean Carbonnier, Coligny ou les sermons imaginaires, éditions PUF, Paris, 1982, p. 245 à 247.
  • *Marie Balmary, Le sacrifice interdit, éditions Le Livre de Poche, Biblio essais, Paris, 1995, p. 105 à 111.
  • Lytta Basset, Aimer sans dévorer, éditions Albin Michel, Paris, 2015, p. 98 à 108.
  • Collectif : Robert Ageneau, Serge Couderc, Robert Dumont, Jacques Musset, «Manifeste pour un christianisme d’avenir», éditions Karthala, Paris 2020.
  • ** Béatrice Cléro-Mazire,  prédication du 28 août 2019, à l’Oratoire du Louvre.

Orgue

Chant d'Assemblée
Cantique Louange et Prière : n° 69, "Grand Dieu nous te bénissons", strophes 1, 2, 9 et 10.

1. Grand Dieu, nous te bénissons,
Nous célébrons tes louanges;
Éternel, nous t'exaltons
De concert avec les anges,
Et prosternés devant toi,
Nous t'adorons, ô grand Roi!
Et prosternés devant toi,
Nous t'adorons, ô grand Roi!

2. Les saints et les bienheureux,
Les trônes et les puissances,
Tous les êtres dans les cieux
Disent ta magnificence,
Proclamant dans leurs concerts
Le grand Dieu de l'univers.
Proclamant dans leurs concerts
Le grand Dieu de l'univers.
9. Puisse ton règne de paix
S'étendre sur tout le monde,
Dès maintenant à jamais !
Que sur la terre et sur l'onde
Tous les peuples se saluent
Au nom du Seigneur Jésus !
Tous les peuples se saluent
Au nom du Seigneur Jésus !

10. Gloire soit au Saint-Esprit!
Gloire soit à Dieu le Père!
Gloire soit à Jésus-Christ
Notre Sauveur, notre Frère !
Son immense charité
Dure à perpétuité.
Son immense charité
Dure à perpétuité.

Annonces
La paroisse fait sa rentrée petit à petit, masquée et distanciée.
La nouvelle feuille rose arrivera le 15 septembre
La pause spirituelle continue chaque semaine, mais elle passe du mercredi au jeudi.
Donc prochaine rencontre : jeudi 3 septembre, de 12h30 à 13h30

Offrande pour l’église
C’est le moment de l’offrande : l’église ne vit que de dons : les vôtres !
L’offrande qui sera recueillie parmi vous, maintenant, permettra à notre église locale de continuer sa mission, annoncer la Bonne Nouvelle à tous et être ouverte pour l’accueil de tous. Que chacun donne avec joie, sans regrets ni contrainte.

Orgue
 
Prière d’intercession

Eternel, Dieu de la vie, dans la confiance nous te présentons notre monde. Nous te prions pour tous ceux que tu nous mets, aujourd’hui au coeur de notre mémoire.
Nous te remettons celles et ceux qui ont dit oui à ton appel, et qui témoignent de ton amour là où ils se trouvent, parfois jusqu’au don de leur propre vie, en particulier dans les lieux où règnent la violence et la guerre.
Nous te remettons chaque personne en souffrance, chaque être humain habité par le désespoir et le chagrin, celles et ceux atteints par la maladie, l’approche de la mort, les familles en deuil, mais aussi touchées par la solitude, déstabilisées par la perte de leur travail, ou encore celles dont le droit est bafoué.
Eternel, Dieu de la vie, nous te prions de procurer la paix aux peuples de la terre, en donnant la sagesse à ceux qui les gouvernent, responsables politiques, économiques et sociaux,  et fais de nous des citoyens attentifs, constructifs, qui mettent l'Evangile au coeur de leur vie et du monde.

« Donne-nous soif de justice, le courage de chercher la justice, la force aussi d’entendre que la justice des hommes ne sera jamais ta justice, et qu’à l’encontre de notre propre justice, en ta grâce seule, sera toujours l’incompréhensible recours ».  (cf. Jean Carbonnier, sermon pour la fête de la Réformation, 1982).

Veille sur ton Eglise invisible, qui n’a ni dénomination, ni frontières, et que toi seul connaît.
Et ensemble, nous te disons la prière que Jésus a enseignée à ses disciples :
 
Notre Père
Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour ; pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés. Ne nous soumets pas à la tentation mais délivre-nous du mal, car c’est à toi qu’appartiennent le règne, la puissance et la gloire, aux siècles des siècles. Amen.
 
Bénédiction 
Recevons la bénédiction de la part du Seigneur :

Mon frère, ma sœur, mon ami,
Que le Seigneur te bénisse et te garde !
Que le Seigneur fasse rayonner sur toi son regard et t'accorde sa grâce !
Que le Seigneur porte sur toi son regard et te donne la paix !

Répons : bénis Ô Dieu nos routes

Bénis ô Dieu nos routes, nous les suivrons heureux,
Car toi qui nous écoutes, tu les sais, tu les veux.
Chemins riants ou sombres, j’y marche par la foi,
Même au travers des ombres, ils conduisent à toi. 

Orgue

Matthieu 10 : 34-36

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Lecture de la Bible

Matthieu 10:34-36

« Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre ! Je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée. Car je suis venu mettre la division entre l’homme et son père, entre la fille et sa mère, entre la belle-fille et sa belle-mère, et l’on aura pour ennemis les membres de sa famille. »

Audio

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