Méditation sur Jean 19/1-15
Jean 19:1-15
Culte du 30 mars 2018
Prédication de Vincens Hubac
Vidéo de la partie centrale du culte
Pour des raisons évidentes, Pilate n’a pas bonne presse auprès des chrétiens. Malgré des essais de réhabilitation, il reste très controversé. Pourtant, Jean lui prête des paroles étonnantes : « Qu’est-ce que la vérité ? » et « Voici l’homme ».
C’est sur cette dernière parole que je vous invite à réfléchir aujourd’hui. Parole qui a fait le tour du monde et dont on n’a pas fini d’épuiser le sens.
« Voici l’homme ». « Ecce homo » en grec « Idou o anthropos » … Ce type d’affirmation devrait être positif. Ne dit-on pas de manière admirative « Quel homme ! », « Voici un homme ! », « Un grand homme » … et même « Cette femme est un grand homme ! » … Mais la parole de Pilate n’est pas admirative, même si Pilate doute toujours au sujet de Jésus. En fait, Pilate est dépassé par ce qu’il dit, car il ne présente pas Jésus en affirmant « idou o andros », voici l’homme masculin, mais en disant anthropos, il utilise « homme » au sens générique « d’être humain » et il faudrait traduire « Voici l’être humain ». Ici se dévoile une humanité dans son essence même. L’homme vrai que Dieu révèle en Jésus-Christ et dont Pilate, à son insu, est prophète.
En quoi Jésus est-il l’humain en plénitude, en vérité ?
• Une situation de destruction qui met à nu Jésus
Trahi et vendu par Judas, et renié par Pierre – des hommes les plus proches de Jésus (n’oublions pas que Judas est trésorier du groupe des disciples), Jésus est arrêté lors d’une échauffourée. On sait aussi qu’il est angoissé à l’idée de la Passion (cf « si tu peux éloigner de moi cette coupe » …). Arrêté, il est jugé à « la va vite » au cours d’un procès plus ou moins truqué. Il est fouetté, épreuve dont certains mouraient. Couronné d’épines, il est revêtu du manteau royal par dérision mais non sans vérité, battu par les soldats, humilié, moqué, il va être crucifié par les romains sur la demande d’une partie du peuple manipulé par les grands prêtres et les sadducéens.
Dégringolade vers le néant qui finit par la mise à nu (pudiquement cachée par un linge dans nos représentations, mais non conforme à la réalité), sur la croix avec la souffrance insupportable qui va avec.
Jésus est là, présenté à tous face à une foule qui se renie en criant « Nous n’avons de roi que César ! » - on frise le blasphème ! Pilate est inconséquent et quelque peu lâche, et les disciples sont dans la nature.
Nu, seul et mourant « Voici l’homme », une situation qu’aucun être humain n’aimerait vivre … C’est ce qu’on appelle la kénose, l’abaissement de Dieu en Jésus-Christ. Dans ce néant, que reste-t-il de Jésus ? Que reste-t-il, quand il ne reste rien ?
• L’abaissement de Jésus dans le néant, la mise à nu, nous révèle à travers ce qui semble un pantin sanguinolent, un essentiel. Envers et contre tout, il reste la vie, une présence, un souffle. Le regard de certains dans la foule est un lien, l’expression d’une compassion, peut-être d’un espoir enfoui … Car si Pilate dit « Voici l’homme » en parlant de Jésus, il affirme une vérité car dans la Passion où Jésus « aime jusqu’à l’extrême », Jésus meurt pour les autres, pour le monde, pour ses bourreaux même ! Jean nous dit là que l’homme est humain quand l’homme est pour les autres, dans le don de sa vie pour les autres. L’homme est « être humain » quand il est « l’être pour l’autre » et dans la Passion, Jésus est en plénitude l’« être pour l’autre ». L’Amour s’exprime là, indépassable, irraisonnable, éternel et indestructible.
Dans cet « être pour l’autre », la Passion ouvre un temps nouveau : celui de Dieu qui s’investit dans les souffrances des hommes (toutes les formes de souffrances sont dans la Passion), ne laissant personne à l’abandon. Temps de l’Amour de Dieu dont nous avons conscience par la vie du Christ, pour la vie du monde … Quelque chose de Pâques transparaît déjà là où l’on saisit que néant et mort ne détruiront pas un Amour qui fait vivre …
Temps aussi de l’action qui nous permet « d’être pour l’autre », d’être des humains chaque fois que nous abandonnons une part de nous-mêmes pour faire vivre l’autre – C’est une lumière du Royaume. Cette lumière opaque qui brille dans la nuit du Vendredi, et nous révèle une humanité toujours renouvelée dans l’Amour divin.
Amen
Lecture de la Bible
Jean 19/1-15
1 Alors Pilate emmena Jésus et le fit fouetter.
2 Les soldats, qui avaient tressé une couronne avec des épines, la lui mirent sur la tête et ils jetèrent sur lui un manteau de pourpre.
3 Ils s’approchaient de lui et disaient : « Salut, le roi des Juifs ! » et ils se mirent à lui donner des coups.
4 Pilate retourna à l’extérieur et dit aux autorités juives : « Voyez, je vais vous l’amener dehors : vous devez savoir que je ne trouve aucun chef d’accusation contre lui. »
5 Jésus vint alors à l’extérieur ; il portait la couronne d’épines et le manteau de pourpre. Pilate leur dit : « Voici l’homme ! »
6 Mais dès que les grands prêtres et leurs gens le virent, ils se mirent à crier : « Crucifie-le ! Crucifie-le ! » Pilate leur dit : « Prenez-le vous-mêmes et crucifiez-le ; quant à moi, je ne trouve pas de chef d’accusation contre lui. »
7 Les autorités juives lui répliquèrent : « Nous avons une loi, et selon cette loi il doit mourir parce qu’il s’est fait Fils de Dieu ! »
8 Lorsque Pilate entendit ce propos, il fut de plus en plus effrayé.
9 Il regagna la résidence et dit à Jésus : « D’où es-tu, toi ? » Mais Jésus ne lui fit aucune réponse.
10 Pilate lui dit alors : « C’est à moi que tu refuses de parler ! Ne sais-tu pas que j’ai le pouvoir de te relâcher comme j’ai le pouvoir de te faire crucifier ? »
11 Mais Jésus lui répondit : « Tu n’aurais sur moi aucun pouvoir s’il ne t’avait été donné d’en haut ; et c’est bien pourquoi celui qui m’a livré à toi porte un plus grand péché. »
12 Dès lors, Pilate cherchait à le relâcher, mais les autorités juives se mirent à crier et disaient : « Si tu le relâchais, tu ne te conduirais pas comme l’ami de César ! Car quiconque se fait roi, se déclare contre César. »
13 Dès qu’il entendit ces paroles, Pilate fit sortir Jésus et le fit asseoir sur l’estrade, à la place qu’on appelle Lithostrôtos – en hébreu Gabbatha.
14 C’était le jour de la Préparation de la Pâque, vers la sixième heure. Pilate dit à ces Juifs : « Voici votre roi ! »
15 Mais ils se mirent à crier : « A mort ! A mort ! Crucifie-le ! » Pilate reprit : « Me faut-il crucifier votre roi ? » Les grands prêtres répondirent : « Nous n’avons pas d’autre roi que César. »
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