Le christianisme ou le défi "des communs"

Actes 4:32-5:11

Culte du 14 juin 2020
Prédication de Béatrice Cléro-Mazire

Vidéo du culte entier

Culte à l'Oratoire du Louvre

Dimanche 14 juin 2020

 Le christianisme : ou le défi « des communs »
Actes 4:32 à 5:11


Jour 35 du dé-confinement progressif
Temple ouvert à un public restreint selon les consignes sanitaires en vigueur


Liturgie par le Pasteur Agnès Adeline-Schaeffer
Prédication par le Pasteur Béatrice Cléro-Mazire
Musique par Aurélien Peter, organiste

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Musique : Plein jeu du Gloria de la Messe des couvents de F. Couperin

Salutation 

En ce dimanche,  jour de joie, grâce et paix vous sont données, ici et maintenant, de la part de Dieu, Père de tous les hommes et de la part de Jésus-Christ, frère de tous les hommes, dans la consolation de l’Esprit-Saint, souffle de tous les hommes.

Accueil 
Bienvenue pour ce culte ! Nous sommes heureuses de vous retrouver au temple de l’Oratoire du Louvre.
Nous saluons celles et ceux qui nous regardent de leur domicile, en France ou l’étranger.
Le temps du dé-confinement s’assouplit de plus en plus et nous voyons l’activité renaître dans notre société. Nous continuons d’espérer un monde différent, et chaque jour, tous, nous restons attentifs aux nouvelles qui arrivent de tous les pays, pour y déceler un chemin, une lumière, une initiative, un projet commun entre tous.
Mais l’avenir reste incertain pour un très grand nombre d’entre nous.
 
Lorsqu’un homme marche dans l’obscurité
et qu’il a une lampe à la main,
s’il voit une pierre, il ne la heurte pas,
s’il voit un trou, il n’y tombe pas. Cette parole de sagesse commente
le verset des Psaumes qui dit :

« Ta Parole est une lampe à mes pieds,
une lumière sur mon chemin » (Psaume 119/105)

Aujourd’hui, les pièges et les pierres ne manquent pas.
Les tentations sont grandes pour nous faire baisser notre garde, et nous faire oublier le virus, toujours tapi dans l’ombre.
Que ce culte qui nous rassemble, au près comme au loin, soit un moment de paix,  un temps lumineux et une rencontre prometteuse pour l’avenir.
 
Louange       
Louons Dieu :
 
Loué sois-tu mon Dieu, pour tous ces autres
Qui peuplent la terre avec moi.
Pour ces prochains et ces lointains
Sans qui je ne serais qu’un Robinson
Prisonnier de son orgueil solitaire.
Loué sois-tu pour tout ce qui nous est commun,
Au long des siècles et des continents,
Tissant la longue tapisserie de l’humanité.

Loué sois-tu aussi pour tout ce qui nous fait différents
Et dont les couleurs font chanter le tissu de la vie.
Donne-moi d’accueillir la richesse de ces diversités
Et d’y saisir la dimension de ton amour.
Pour ceux qui me sont les plus proches,
Famille, amis, voisins, camarades, collègues,
Qui cheminent à mes côtés au long des jours,
M’apportant chaleur, réconfort, ou souci,
Pour eux tous, je veux te louer.
Te louer aussi  simplement
Pour la vie qui continue,
Parce que le monde n’a pas commencé
Ni se terminera avec moi.

Loué sois-tu, quand tu ouvres mes yeux
Quand je m’enferme ou m’isole,
Loué sois-tu quand tu m’envoies des compagnons fraternels
Quand je déprime ou désespère.
Loué sois-tu, ô mon Dieu,
Quand tu me donnes d’être ce petit chaînon joyeux
De la grande caravane humaine
En marche vers cet avenir que ton Fils nous a dépeint
Aux couleurs de l’espérance.  
Amen, alléluia !
(d’après un texte de Michel Wagner).

Chant d'assemblée
Dans le recueil « le Psautier Français »,  nous vous invitons à poursuivre notre louange par le chant du  psaume 97, Dieu le Seigneur est roi, strophes 1, 2 3 et 4

Dieu  le Seigneur est roi ! Terre, réjouis-toi !
Iles, soyez en fête ! Un temps nouveau s’apprête.
Sa gloire emplit les cieux, elle éblouit nos yeux.
Il vient nous délivrer, et sur le droit fonder,
Son pouvoir merveilleux.

Les cieux chantent leur roi ; le monde entier perçoit
L’éclat de sa justice ; tous les faux dieux pâlissent.
On voit les monts crouler, les puissants ébranlés ;
Ce dont l’homme était fier, s’évanouit dans l’air :
Tout est renouvelé.

Son peuple entend sa voix ; il accourt plein de joie ;
On voit l’espoir qui brille dans les yeux de ses filles.
Que son royaume est beau ! Il s’élève très haut,
Tel un cèdre imposant, qui sur le monde étend
La paix de ses rameaux.

Dieu sur les hommes droits attachés à sa loi
Fait lever sa lumière, et sa joie les éclaire.
Venons tous le servir et que notre désir
Soit de louer Seigneur, l’amour libérateur,
Qui vient nous réunir.

Volonté de Dieu 
Écoutons encore la volonté de Dieu pour aujourd’hui et les jours qui viennent :

Préparez le chemin du Seigneur, proclamait dans le désert  la voix du prophète Esaïe. (Esaïe 40/3)

Voici le jeûne qui me plait, dit Dieu :
"Brise les chaînes injustes;
Dénoue les liens de tous les jougs,
Délivre ceux qu'on opprime;
Mets fin à toute servitude.
Partage ton pain avec celui qui a faim;
Recueille dans ta maison le malheureux sans asile;
Couvre celui qui a froid;
Ne te détourne pas de ton frère".
Alors ta lumière jaillira comme l’aurore, et tes forces reviendront vite.
Devant toi marchera ta justice, et la gloire du Seigneur fermera la marche.
(Esaïe 58, 4 à 9).

Confession du péché 

Eternel, Dieu de la vie,
Je voudrais tant vivre de ta vie éternelle.
Quand cela va-t-il m’arriver ?
Aujourd’hui, j’ouvre la fenêtre de ma vie.
Et je jette tous mes encombrants :
Ces habitudes, ces conformismes,
Ces vanités et ces inutilités.
Ces tricheries, ces compromissions,
Ces petits arrangements, hors de ta vue.
Parce que tout cela m’enchaine,
Me prend le temps que je pourrais consacrer à vivre en libéré
Et à aimer les prochains que tu m’as donnés.
Aide-moi à me libérer du regard des autres sur moi,
Et de la peur que cela engendre.  
Viens à mon secours.
Aujourd’hui, j’inscris sur mon calendrier
Que ma vie nouvelle a commencé.
Amen.
(d’après un texte de Michel Wagner).
 
Annonce du pardon 

Je vous invite à vous lever pour accueillir le pardon de Dieu :
Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils, afin qu’en lui, nous ayons la vie.
Il nous offre la grâce de vivre autrement.
Sa grâce renouvelle nos vies et transfigure nos relations.
Car le Seigneur nous dit :
« Mon enfant, relève-toi ! Ne laisse pas le soir descendre sur toi.
N’aie pas peur, crois seulement.
Va, ta foi t’a sauvé ».  
Chantons à Dieu notre reconnaissance !

Chant spontané : Psaume 92, strophe 2
Combien grande est ta gloire, en tout ce que tu fais,
Et combien tes hauts faits sont dignes de mémoire !
Tes œuvres sans pareilles ont réjoui mon cœur,
Je veux chanter, Seigneur, tes divines merveilles !

Confession de foi 
Nous affirmons notre foi, (avec un texte de Michel Bouttier).

Pour le monde et pour moi, j'ai confiance en Jésus de Nazareth.
Il est le seul sauveur et maître.
Il a été l'homme véritable,
Comme nul homme ne peut l'être par lui même.
Il est mort sur une croix
pour les autres et pour le monde,
comme pour moi.
Il est ressuscité,
il est présent parmi les hommes
et, pour les servir, il recrute son Église
sans tenir compte de nos distinctions.
Il agit par les hommes et les femmes dans l'histoire
pour l’amener à son but :
un univers réconcilié dans l'amour.
Aussi, je ne crois à la fatalité,
ni de la guerre, ni de la haine,
ni de la catastrophe, ni de la mort,
parce que je crois que Jésus nous libère
pour des décisions libres.

Grâce à lui, Dieu a un visage,
Il a un nom, celui de Père.
Grâce à lui, ma vie a un sens,
l'univers aussi.
Pour le monde et pour moi,
j'espère en Jésus de Nazareth.
Il vient.

Chant spontané : Louange et Prière, Cantique 69, strophe 1
Grand Dieu, nous te bénissons,
Nous célébrons tes louanges,
Éternel, nous t’exaltons,       
De concert avec les anges,
Et prosternés devant toi, nous t’adorons, ô grand Roi !
Et prosternés devant toi, nous t’adorons, ô grand Roi !

Doxologie « Gloire à Dieu dans les cieux et sur la terre, et d’éternité en éternité »

Prière d’illumination

Dieu notre Père, nous avons faim et soif de ton pardon, de ta présence, de ton amour.
Nous sommes devant toi, prêts à écouter ta Parole, qui rassasie, qui vivifie, qui renouvelle nos forces.
Envoie sur chacun, chacune de nous le souffle de ton Esprit, afin que nous prenions conscience de ta présence dans nos vies, et que nous puissions accueillir la Parole que tu nous destines aujourd’hui. Amen.

Lecture biblique
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Musique : Menuet de la sonate K.282 de W. A. Mozart

Prédication

Le christianisme : ou le défi « des communs ».

Actes 4:32 à 5:11

« Un seul cœur et une seule âme (…). Personne ne disait que ses biens lui appartenait en propre, mais tout était commun entre eux. ( …) personne n’était dans le dénuement. (…) On distribuait à chacun selon ses besoins. »

    En lisant cette description de l’Église primitive, on a l’impression d’un communisme qui aurait réussi. Une équité complète, une confiance parfaite, un abandon de la propriété privée au profit de la communauté et un bonheur pour tous : on se croirait dans une communauté hippie des années 70, la libération sexuelle et les stupéfiants en moins.
    Mais, évidemment, un incident vient troubler cette parfaite harmonie et la transforme en utopie : Ananias vend son champ et garde une partie du produit de la vente pour lui. Et sa femme est complice.
    Ce récit biblique relève davantage du conte philosophique que du récit historique, bien sûr. Les deux fauteurs de trouble tombent morts, comme les deux fils d’Aaron avaient eux-mêmes été terrassés dans le livre du Lévitique (Lv 10, 1-2), à cause de leur confusion entre le profane et le sacré, et ils sont emportés par des jeunes gens, comme eux, pour être ensevelis.
    Mais en réfléchissant, on comprend Ananias qui est sans doute un homme raisonnable et qui se dit : si je donne tout et que d’autres s’en vont avec la caisse, que deviendrai-je ? C’est même ce qu’on appellerait de la prudence. Cette histoire nous plonge dans la questions du bien commun et de notre capacité à faire communauté.

    L’économie, les sciences politiques ou la philosophie, ont développé cette question sous l’angle de ce que l’on appelle : « les communs ».
    Les communs peuvent émerger n’importe où. Ils existent dès lors qu’une communauté ou un groupe décide de gérer une ressource de manière collective ; avec en vue un accès et une utilisation équitable de celle-ci. On pourrait dire que les communs sont des choses qui n’appartiennent à personne et sont partagées par tout le monde. [Lire à ce sujet le livre passionnant de David Bollier : La renaissance des communs, pour une société de coopération et de partage, Éditions Charles Léopold Mayer, 2014).
    Ce type d’organisation sociale existe depuis la nuit des temps : la forêt où tous pouvaient aller chercher son bois de chauffe ; la rivière où tous pouvaient aller laver leur linge ; le lac ou tous pouvaient aller pêcher ; tous ces exemples nous intéressent particulièrement aujourd’hui, dans notre société où la propriété privée semble avoir pris le pas sur tout espace ou toute ressource partagée.
    Et aujourd’hui, « les commoneurs », comme on appelle les acteurs des communs, peuvent être aussi bien des femmes de communautés rurales indiennes qui mutualisent leurs semences agraires, que des développeurs numériques qui imaginent des systèmes libres de droits pour partager des connaissances, des informations ou toute autre ressource virtuelle mais essentielle à la vie humaine. Internet, que l’on accuse souvent de beaucoup de maux, est en fait aussi un magnifique outil pour développer des communautés humaines autour d’idées, de projets participatifs, ou d’entraide.
    Ainsi, penser « les communs », ce n’est pas penser une doctrine, une idéologie, ou une secte, mais une façon de faire ensemble, dans la coopération et l’équité, en n’étant dépendant ni d’un État, ni d’un marché. Il n’y a pas de modèle a priori du commun ; il s’invente en fonction des gens qui le créent et des aspirations de ces gens.
    Évidemment, une telle forme d’organisation est toujours menacée par un Ananias qui ne joue pas le jeu. Pierre lui demande, d’ailleurs, s’il ne pouvait pas garder son champ plutôt que de le vendre et de mentir ainsi à toute la communauté avec laquelle il s’était engagé.
    Là est bien la question, quel engagement requiert l’appartenance à une communauté ? Ananias n’était en rien obligé de vendre son champ et de donner le produit de la vente à la communauté. Son bien est son bien, et dans le cas présent, le droit romain garantissait à Ananias la jouissance de ce bien en propriété privée.

    Alors que nous révèle l’histoire d’Ananias?
    Où est véritablement la transgression ?

    Sans doute dans le fait de dire qu’il s’engage et que son bien devient le bien de la communauté, et en même temps, faire une réserve pour assurer son départ unilatéral de la communauté sans prendre le moindre risque pour sa subsistance.
    On pourrait juger Pierre comme le gourou d’un abominable courant sectaire, si l’on ignorait ses paroles qui rappellent la liberté pleine et entière d’Ananias. Il pouvait garder son champ en propriété pleine et entière ; et, même le champ vendu, Ananias pouvait avoir autorité sur son prix. Ce qui rejoint l’organisation commune des communs, car qui donne à la communauté, de son temps, de son argent, de son savoir-faire, est aussi celui qui décide, de façon collégiale, ce qu’on en fera ensemble.
    La transgression d’Ananias, ici, tient au fait de mentir sur ses intentions dans une communauté où chacun est libre d’entrer et de sortir de la relation de dépendance entre tous selon son engagement propre.
    Ce que Pierre pointe, c’est le péché contre l’Esprit Saint. Venant de Pierre, on se doute bien qu’il ne s’agit pas de prôner la perfection ; Pierre est celui qui a renié, qui a été lâche, et menteur. Mais il est d’autant mieux placé sur ce que le mensonge d’Ananias implique. Ananias n’a pas de crainte à avoir, contrairement à Pierre dans le jardin du prétoire, il est dans une communauté basée sur la confiance et suivant le principe d’un amour fraternel. Pourquoi, alors, introduire de la défiance dans ce système ?
    Faisant un acte avec une intention contraire à celle qu’il affiche, Ananias a été de mauvaise foi. Se disant membre de la communauté et ne lui faisant pas confiance, se disant engagé et se tenant prêt à tout moment à la lâcher.
    Sans doute Pierre aurait supporté la crainte d’Ananias d’engager tous ses biens dans cette nouvelle vie communautaire, s’il lui en avait parlé. Mais en mentant, Ananias a agi selon les règles du monde dans une communauté spirituelle. Il a donc mêlé le profane et le sacré comme les fils d’Aaron l’avaient fait en offrant un faux sacrifice à Dieu, et le résultat est la même pour Ananias et Saphira que pour les Fils d’Aaron : la mort subite.
    Évidemment, il est difficile de croire à une telle mort subite sanctionnant le péché contre l’Esprit, dans la réalité ; mais le symbole est assez fort pour nous poser la question : quelle est cette mort qui frappe Ananias et sa femme ?
    N’est-ce pas la vie éternelle promise dans le service sincère et la cohérence de l’engagement que la communauté des premiers chrétiens pouvait leur donner, qui s’éteint ainsi brutalement ? N’est-ce pas une mort spirituelle qui a lieu plutôt qu’une sanction d’un Dieu revanchard ou d’un Pierre impitoyable ? Ananias et Saphira induisent par leur mensonge, l’idée que la communauté pourrait ne pas être digne de confiance. Il détruisent ainsi l’unité ; ils divisent. Et l’allusion au Satan montre bien cette division de la communauté, non par le doute d’Ananias, mais par son mensonge.
    Le péché contre l’Esprit Saint n’est pas le doute dans la foi, c’est promettre et ne pas faire ; c’est s’engager et quitter le navire à la première avarie ; c’est se renier soi-même, se diviser soi-même et en faire payer le prix aux autres.
    La première communauté de chrétiens décrite par le livre des Actes, toute caricaturale ou utopique qu’elle puisse paraître nous pose la question de notre engagement dans le christianisme et plus généralement dans l’humanité.
    Ces derniers mois nous ont montré les limites d’un individualisme strict. Nous avons mesuré la valeur des relations humaines, et combien nous sommes liés à notre environnement de vie. Nous avons reconnu le commun précieux qu’est notre système de santé et l’avons soutenu ; nous avons mesuré la nécessité d’une entraide active dans  un moment de grande vulnérabilité ; nous savons tous combien il est important de pouvoir compter sur une communauté humaine et spirituelle.
    La crise révèle la nécessité de l’engagement collectif, et de la fidélité à ses engagements. La crise est d’ailleurs un des ressorts essentiels des « communs ». Ils surgissent souvent là où des hommes et des femmes ont des problèmes communs à régler ou là où ils ont un bien commun à défendre. Le christianisme est particulièrement concerné par les circonstances de crise, puisqu’il trouve son origine dans une crise humaine tragique : la mort du juste, Jésus,  et son abandon par sa communauté lors de sa passion.  La résurrection est en grande partie une réparation de la promesse non tenue.

    Alors qu’est-ce qu’être engagé dans la communauté chrétienne ? Il y a beaucoup de façons d’être chrétien.
    Est-ce qu’être chrétien se résume à adhérer aux idées du Christ ? Ananias pouvait rester chez lui avec sa femme et son champ, et se trouver en accord avec les idées du Christ, sans rien faire de plus.
    Est-ce qu’être chrétien c’est appartenir à une Église qui prône une certaine compréhension et une certaine expression de la foi en Jésus le Christ et en faire son identité ? Ananias aurait pu se dire chrétien et ne rien changer à sa vie d’avant.
    Ou bien est-ce qu’être chrétien c’est s’engager dans une communauté avec d’autres êtres humains qui font ensemble advenir un monde nouveau, comme le souhaitait l’homme Jésus et comme le Christ en contient la promesse ? Dans ce cas, l’adhésion aux idées ne suffit pas, l’appartenance identitaire ne suffit pas ; c’est un autre type de relation au christianisme qui est en jeu ici ; car ce christianisme là ne préexiste pas à mon action ; il est créé par mon action, par mon engagement, par ce que, avec Jésus et les autres frères et sœurs, je vais réaliser pour qu’il advienne enfin. C’est cela qu’Ananias avait commencé à faire en vendant son champ mais sans y croire vraiment et donc sans s’engager vraiment dans la communauté.
    Envisager la vie chrétienne sous l’angle « des communs », est intéressant, car c’est ce que nous pouvons pratiquer dès maintenant dans nos associations cultuelles, en nous engageant dans la communauté comme donateurs, comme bénévoles, et souvent les deux à la fois. On ne vient pas à l’Église consommer de l’Évangile, sans se soucier des autres, ceux qui constituent avec nous la communauté et qui recherchent avec nous un mieux vivre, un monde meilleur, une égalité plus grande, une fraternité plus grande et une liberté plus grande.
    La communauté décrite dans le livre des Actes était sans doute en dialogue avec les institutions de son temps comme nous le sommes aujourd’hui. Le commun que constitue une association cultuelle est en dialogue avec ces trois notions chères à notre République. Comment arriver à créer plus d’égalité entre les Hommes ? Sans doute par le partage équitable des richesses, monétaires, mais aussi spirituelles, culturelles et intellectuelles. Donner le meilleur à tous sans discrimination, voilà ce qui est égalitaire dans l’œuvre de notre Église.
    Comment arriver à offrir une plus grande liberté à nos contemporains ? Sans doute en offrant des lieux de formation spirituelle et intellectuelle qui permettent d’envisager sa vie autrement que selon les dictats sociaux qui nous enferment trop souvent et nous assignent une identité sociale selon nos mérites, notre valeur marchande ou nos origines.
    Comment arriver à une plus grande fraternité ? Sans doute en nous considérant les uns les autres comme des frères et sœurs du Christ, tous enfants d’un Dieu qui aime ses enfants au-delà de ce qu’ils peuvent prouver par eux-mêmes de leur valeur. Ce modèle social de la communauté ecclésiale a beaucoup à apporter à notre société.
    En mentant à la communauté, Ananias n’a rien compris à l’engagement qui lui était demandé. Il croyait pouvoir s’engager en façade, mais sans croire lui-même au modèle que créait la communauté chrétienne. Son attitude montre qu’il n’est pas dans la logique de la communauté. Il ne se laisse pas changer par elle. S’engager dans cette communauté impliquait de la transparence, de la confiance, de l’honnêteté. Sa façon d’agir montre qu’il n’est pas impliqué pour le bien commun, car il n’a pas compris, ou pas admis qu’à partir du moment où on attendait le fruit de la vente de son champ, la communauté devenait dépendante de cette ressource et pouvait envisager l’avenir avec. La vie en communauté qui nous est montrée ici est une foi vécue, une foi en actes, qui respecte la foi des autres, qui espère en leur honnêteté, qui place sa confiance dans leur sincérité : une foi qui espère en l’homme.
    Alors, oui, frères et sœurs, on peut vivre sans s’engager dans aucune communauté humaine, on peut vivre sans s’engager dans aucune communauté chrétienne ; évidemment on le peut, et c’est la liberté de chacun. Mais alors, on ne peut prétendre à faire advenir le royaume de Dieu.
    S’engager à la suite du Christ, c’est d’abord ne pas se mentir à soi-même. Comme ce jeune homme riche qui voulait la vie éternelle et ne pouvait pas abandonner les richesses de sa vie profane. S’engager, c’est toujours abandonner un peu de sa liberté pour accepter une interdépendance dans laquelle les uns comptent sur les autres.

    Alors, quel est notre engagement Commun ?
    J’ai souvent entendu dire que l’Oratoire du Louvre n’était pas une Église comme les autres. C’est vrai. Mais pas à cause d’une sorte de snobisme qui ignore les règles habituelles de la communauté chrétienne. L’Oratoire du Louvre est un commun fondé sur une vision délibérément inclusive de la tradition chrétienne. Ce qui veut dire qu’ici on peut être individuellement et librement ce qu’on souhaite être sans avoir à entrer dans des normes dogmatiques ou morales. Mais cette liberté est le ciment d’une communauté vécue et solidaire. Libéralisme ne rime pas avec individualisme, sinon quelle serait la cohérence de l’inclusion ? Pour qu’une telle communauté existe, il faut que tous nous nous engagions pour la créer chaque jour.
    S’engager à la suite du Christ, c’est croire en Dieu assez pour être capable de croire en l’Homme, c’est à dire avoir dans la tête et dans le cœur une anthropologie optimiste et travailler à sa manifestation. C’est produire de l’égalité en aidant les plus précaires à rejoindre les plus nantis et en aidant les plus nantis à rejoindre les plus précaires pour que, ensemble, ils réduisent l’écart des inégalités. C’est produire de la liberté là où la pauvreté, les discriminations en tout genre, les handicaps physiques, psychologiques ou sociaux freinent la libération des individus. C’est produire de la fraternité, en réduisant les distances et les incompréhensions entre les genres, les générations, les milieux sociaux, les cultures différentes. Mais ce n’est pas possible tout seul, il faut donc risquer la communauté. Faire confiance à tous pour transformer en Bonne nouvelle les dons de chacun.
   C’est bien une communauté chrétienne que nous formons ici, peut-être pas une communauté hippie, mais une véritable communauté inclusive. A nous d’y engager se que nous sommes, ce que nous croyons, ce que nous avons à offrir pour qu’elle rayonne dans ce monde.                                                          AMEN.

Musique : Gymnopedie n.1 de E. Satie

Chant d'assemblée
Dans le recueil Louange et Prière, nous vous invitons à vous unir par le chant du
Cantique n°216, « Seigneur, que ton règne adorable » strophes 1, 2 et 3 :  

Seigneur, que ton règne adorable s’affermisse enfin parmi nous,
Ce règne à nul autre semblable, qu’on ne peut hâter qu’à genoux !
Règne auquel ton Esprit incline par l’attrait puissant de ta voix,
Règne où la force qui domine, c’est ton amour, ô Roi des rois !

S’il est d’abord sans apparence, s’il ne grandit que lentement,
Telle à nos yeux est la semence qu’apporte ou que chasse le vent.
Mais,  ô Dieu, tu la vivifies : voici l’arbre aux puissants rameaux ;
Et sous ses branches agrandies, s’abritent les nids des oiseaux.

O Roi que le monde désire, qu’il désire et ne connaît pas,
Etends au loin l’heureux empire  que tu veux fonder ici-bas !
Qu’il soit vaste autant que la terre, qu’il soit pur autant que les cieux,
Et que partout, ô notre Père, il rendre ton nom glorieux.
 
Musique : Choral "Ein feste Burg ist unser Gott" de D. Buxtehude

Offrande 

Pour celles et ceux qui ne sont pas physiquement avec nous, vous pouvez effectuer votre don en ligne, en toute sécurité, sur le site de l’Oratoire, oratoiredulouvre.fr

Prière 

Éternel, tu nous combles de tes bénédictions, jour après jour et notre geste d’offrande d’aujourd’hui en est un modeste témoignage. Inspire-nous d’autres gestes d’offrande, qui ne soient pas  que des gestes matériels mais aussi des gestes d’amitié et des marques de tendresse.  
AMEN

Prière d'intercession

Nous te prions Seigneur, pour notre communauté,
pour qu’elle annonce la Bonne Nouvelle de ton salut
par son accueil inconditionnel envers ceux qui te cherchent ;
pour qu’elle rayonne dans se monde comme un signe de paix
par son expression de foi respectueuse de tous ;
pour qu’elle offre à ceux qui cherchent ton amour un lieu où il soit vécu.

Nous te prions Seigneur, pour les hommes et les femmes de bonne volonté
qui se réunissent de par le monde dans un projet commun pour le bien de tous
qui imaginent demain avec audace
qui vont advenir les rêves dans la réalité
qui osent réaliser ce qui semblait impossible et utopique.
Révèle-nous cette audace et permets que nous puissions entrer dans de telles communions.

Nous te prions, Seigneur, pour tous les démunis de la terre,
Ceux qui sont seuls et ne trouvent pas les solidarités humaines qui pourraient les aider.
Pour eux, Seigneur, que ton règne vienne, et que nous soyons de ceux qui le font advenir.
 
Notre-Père
Ensemble, liés les uns aux autres, présents et absents, malgré les distances qui nous séparent, nous te disons d’un même cœur la prière que Jésus nous a enseignée :

Notre Père qui es aux cieux,
que ton nom soit sanctifié,
que ton règne vienne,
que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour.
Pardonne-nous nos offenses

comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés.
Ne nous soumets pas à la tentation
Mais délivre-nous du mal,
car c’est à toi qu’appartiennent
Le règne, la puissance et la gloire, aux siècles des siècles. Amen.

Exhortation 

Que jamais le bonheur de la vie n’éteigne en nous
La révolte contre ce qui la défigure,
Mais que jamais non plus le scandale du mal
N’efface en nous la louange de la vie.

Que jamais les mots qui nous font vivre :
Tendresse, plaisir, liberté, confiance,
Ne se referment en des certitudes figées,
Mais qu’ils soient source d’une quête toujours inachevée.

Que notre foi ne soit jamais sans le doute,
Et que nos doutes ne soient jamais sans la confiance.
Que l’émerveillement de recevoir la vie
Comme un don, comme une grâce

N’altère pas nos capacités d’indignation devant l’injustice,
Mais soutient en nous la promesse
Et la passion d’un monde autre.
Tel est le désir qui nous porte !

Telle est la prière qui nous met en route !
Que la petite espérance nous prenne par la main,
Qu’elle nous entraîne sur des chemins inattendus,
Et qu’elle chante en nous, comme un défi, l’amour de la vie !  
(Gérard Delteil, pasteur)

Bénédiction
Que le Dieu de l’Espérance vous remplisse de toute joie et de toute paix, dans la foi,
Afin que vous aussi, vous débordiez d’espérance, par la puissance de l’Esprit.
Allez dans la joie de votre Seigneur, Amen.

Chant spontané : Louange et Prière, Cantique 308, strophe 5 
Bénis, ô Dieu, nos routes, nous les suivrons heureux,
Car toi qui nous écoutes, tu les sais, tu le s veux.
Chemins riants ou sombres, j’y marche par la foi,
Même au travers des ombres, ils conduisent à toi.

Musique : Toccata de la 5e symphonie de C.-M. Widor

Actes 4:32-5:11

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Lecture de la Bible

Actes 4/32-5/11

32 La multitude de ceux qui avaient cru n'était qu'un cœur et qu'une âme. Nul ne disait que ses biens lui appartenaient en propre, mais tout était commun entre eux.

33 Avec une grande puissance les apôtres rendaient témoignage de la résurrection du Seigneur Jésus. Et une grande grâce reposait sur eux tous.

34 Car il n'y avait parmi eux aucun indigent ; tous ceux qui possédaient des champs ou des maisons les vendaient, apportaient le prix de ce qu'ils avaient vendu

35 et le déposaient aux pieds des apôtres ; et l'on distribuait à chacun selon qu'il en avait besoin.

36 Joseph, surnommé par les apôtres Barnabas, ce qui signifie fils d'exhortation, Lévite, originaire de Chypre,

37 vendit un champ qu'il possédait, apporta l'argent et le déposa aux pieds des apôtres.

1 Mais un homme du nom d'Ananias, avec Saphira sa femme, vendit une propriété

2 et retint avec le consentement de sa femme une partie du prix ; puis il apporta l'autre partie et la déposa aux pieds des apôtres.

3 Pierre lui dit : Ananias, pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur, au point de mentir à l'Esprit Saint et de retenir une partie du prix du champ ?

4 Lorsque tu l'avais, ne demeurait-il pas à toi ? Et, après la vente le prix n'était-il pas à ta disposition ? Comment as-tu mis en ton cœur une pareille action ? Ce n'est pas à des hommes que tu as menti, mais à Dieu.

5 Ananias entendit ces paroles, tomba et expira. Une grande crainte saisit tous les auditeurs.

6 Les jeunes gens se levèrent, l'enveloppèrent, l'emportèrent et l'ensevelirent.

7 Environ trois heures plus tard, sa femme entra, sans savoir ce qui était arrivé.

8 Pierre lui adressa la parole : Dis-moi, est-ce à tel prix que vous avez vendu le champ ? Oui, répondit-elle, c'est à ce prix-là.

9 Alors Pierre lui dit : Comment vous êtes-vous accordés pour tenter l'Esprit du Seigneur ? Voici : ceux qui ont enseveli ton mari sont à la porte ; ils t'emporteront.

10 A l'instant, elle tomba à ses pieds et expira. Les jeunes gens, à leur entrée, la trouvèrent morte ; ils l'emportèrent et l'ensevelirent auprès de son mari.

11 Une grande crainte saisit toute l'Église et tous ceux qui apprirent ces choses.

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