Noël selon Jean

Jean 1:1-18 , Jean 3:1-16

Culte du 25 décembre 2012
Prédication de pasteur Marc Pernot
Prédication de pasteur James Woody

(Jean 1:1-18 ; Jean 3:1-16)

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Culte du jour de Noël 2012 à l'Oratoire du Louvre
prédication à deux voix par les pasteurs James Woody & Marc Pernot

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1. Nous avons tous reçu grâce sur grâce
( Jean 1 :1-18 )

prédication du pasteur Marc Pernot

Cette géniale méditation qui ouvre son Évangile a valu à Jean de se voir attribuer la figure de l’aigle, pour sa hauteur extraordinaire de vue, comme si Jean nous donnait ici un point de vue céleste, presque divin, sur la réalité du monde, sur notre vie et sur ce qu’apporte le Christ. Les autres évangélistes se sont vu donner les 3 autres faces des anges tétramorphes évoqués par Ézéchiel, le lion, l’homme et le taureau. On voit la différence.

La parole (de Dieu) a été faite chair,
et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité (14)…
Et de sa plénitude nous avons tous reçu,
 et grâce pour grâce (16)…

Voilà l’Évangile de Noël, voilà en réalité l’Évangile tout court, en quelques mots. Nous avons tous reçu de cette plénitude de la Parole de Dieu faite chair. Tous, sans qu’aucune exception ne soit posée. Tous : les bons chrétiens comme les moins bons, les chrétiens comme les autres croyants, les croyants comme les athées, les gens généreux et bons mais aussi les méchants, selon ces paroles de Jésus qui nous affirme que Dieu aime jusqu’à ses ennemis, qu’il bénit ceux qui le maltraitent et qu’il fait du bien même à ceux qui le persécutent ! (Matthieu 5 :44)

« Nous avons tous reçu de la plénitude,
et grâce pour grâce. »

Qu’est-ce que cela veut dire, grâce pour grâce ? Nous avons dans ce prologue de Jean quatre fois ce mot de « grâce » (cariv) et ce sont les quatre seules fois de tout cet évangile, la finale étant sous le signe de la « joie» (cara) en plénitude (15:11; 16:20-24; 17:13; 20:20) que nous donne le Christ, le fruit de cette grâce en plénitude.

  • La grâce, dans la Bible, c’est comme quand un roi pardonne à l'un de ses sujets. La grâce est ainsi la promesse que Dieu nous garde fidèlement.
  • La grâce, dans la Bible, c’est comme quand ce roi donne un cadeau au-delà de ce qui est simplement dû. Et venant de Dieu ces dons sont comme des miracles surgissant dans nos vies.
  • La grâce, c’est quand quelqu'un est attirant sans être nécessairement beau, on dit qu'il a de la grâce, ou du charme... En réalité c’est surtout cela, la grâce de Dieu. Il est amoureux de nous, et cela explique tout le reste. Cette absence de chantage et cette générosité. Nous voyons bien en Christ que Dieu est fou amoureux de nous. Ce regard positif qui pardonne et voit le bien en nous, c’est cet amour. Ces dons plus éternels que mille diamants, c’est cet amour, cette fidélité de Dieu.

« Sa Parole a été faite chair et elle a habité parmi nous » en Jésus de Nazareth. Il n’est pas une idée abstraite, ni un conte pour enfant, mais un homme qui a habité sur terre. Jean en a été témoin avec bien d’autres hommes et femmes. Et le monde en a été bouleversé. Mais cette expression « la Parole a été faite chair et a habité parmi nous » est une phrase à double sens, et quand une expression est ambiguë dans la Bible, c’est rarement par maladresse, mais c’est en général une ambiguïté pleine de sens, pleine de vérité. Ici, « parmi nous » peut se traduire aussi « en nous ». « la Parole a été faite chair et elle a habité en nous », en chacun de nous puisque nous avons tous reçu de cette plénitude de grâce et de vérité. Jésus-Christ nous fait découvrir que Dieu est tendresse et fidélité, mais aussi que la Parole créatrice de ce Dieu s’est incarnée en nous, au plus profond de nous. Qu’elle est ce qu’il y a de plus vivant et de plus beau en nous, de plus personnel. Il nous a montré que cette Parole prend chair parmi nous, dans ce qu’il y a de plus beau dans nos relations avec les autres. Dans cet amour dont nous sommes un petit peu capable, parfois, amour qui est plus fort qui l’emporte sur toutes les négativités, et même sur la mort.

Jean nous dit que cette Parole faite chair a habité parmi nous. Et cette habitation est ici littéralement comme dans la tente qu’un nomade dresse aujourd’hui pour le temps de l’étape, avant de se remettre en route. Et c’est vrai que Jésus est vite passé en ce monde, comme une étoile filante, et pourtant, les échos de son passage ont profondément transformé le monde et peut transformer notre monde en joie pleine.

Bien sûr, cette qualité, cette transcendance n’existe en nous que comme un petit enfant, nous dit Jean, mais elle existe, ne le sentez-vous pas ? Ne la reconnaissez-vous pas dans cette autre personne que vous croisez ?

De cette plénitude, nous avons tous reçu « grâce pour grâce », nous dit Jean. Cette expression « grâce pour grâce » (carin anti caritov) est elle aussi ambiguë. Et là encore, c’est une ambiguïté qui est vraiment riche de sens.

1) Nous avons reçu grâce sur grâce, au sens d’une accumulation, d’une telle avalanche de cadeaux que la grâce de Dieu n’a jamais fini de surgir en nous et parmi nous, dans nos relations. Que Noël nous donne d’ouvrir les yeux chaque jour sur une grâce supplémentaire que Dieu a préparé pour nous, grâce qui nous surprendra par sa nouveauté.

2) Nous avons reçu grâce après grâce, au sens d’une succession ininterrompue, venant accompagner chaque moment de notre transhumance en ce monde. Nous pleurons souvent sur ce que nous avons perdu, il y a tant de trahisons, de déceptions, de pertes, de fragilité… Mais Dieu ne se lasse jamais. À chaque période, à chaque seconde de notre vie, Dieu nous donne une grâce nouvelle. En Christ, nous voyons Dieu s’approcher de chacun pour le guérir, le ressusciter, l’interpeller et nous accompagner ainsi. Le don de la Loi était une grâce, reçue avec Moïse. L’Esprit qui a fait parler les prophètes était une grâce, de tout cela nous sommes bénéficiaires. Christ est une nouvelle étape, décisive, ultime, pleine de vie pour le monde.

3) Nous avons reçu d’être habité par la grâce en échange, en réponse à une grâce première. Et c’est cela également. En Christ nous découvrons ce que c’est que la grâce de Dieu non seulement pour l’humanité mais pour nous et pour chacun. Il n’y a plus de chantage possible, l’amour de Dieu est donné sans condition, la vie nous est donnée, à chacun, sans condition, la vie éternelle. En Christ nous savons que tout est déjà accordé, promis. Si nous faisons le bien, si nous honorons Dieu de notre élan vers lui et vers notre prochain ce sera alors nous-mêmes par grâce. Notre grâce à nous répondant à la grâce de Dieu manifestée de façon si éclatante en Christ.

Oui, la Parole de Dieu a été faite chair. Avec une incroyable plénitude en Jésus de Nazareth. Dans sa chair.  Mais le mot chair, lui aussi, est à double sens dans l’hébreu de la Bible. Le mot grec sarx traduit l’hébreu bassar, dont la racine (rsb) signifie à la fois la chair (bassar) que l’évangile, la bonne nouvelle (bessorah). En Jésus, la Parole de Dieu a été faite chair et elle a été faite Évangile, bonne nouvelle. Jusqu’au jour de Pâques de l’an 33, la Parole a été faite chair en plénitude, pour une fois. Pour nous, la Parole de Dieu demeure, elle a été faite Évangile, bonne nouvelle portée par les paroles de Jésus mais aussi par la bonne nouvelle de sa façon d’être qui nous parlent de la grâce de Dieu. Grâce qui seule rend possible de vivre à notre tour par grâce. Aimant pour le plaisir de faire du bien, pour la joie d’aimer.

Amen.

2. A quoi bon fêter Noël si, toi, tu ne viens pas au monde ?
( Jean 3:1-16 )

prédication du pasteur James Woody

Nicodème était un chef des Juifs, un pharisien remarquable, qui n’avait probablement plus grand-chose à prouver. Il avait un niveau de connaissance digne des meilleurs théologiens, mais ce savoir restait à la surface de sa vie. Tout ce qu’il pouvait savoir sur Dieu, sur la vie en plénitude, tout cela ne le touchait pas au cœur, cela ne l’avait jamais changé de fond en comble. Il savait, mais il n’y croyait pas. C’est ainsi que j’explique que Nicodème, tout respectable qu’il était aux yeux des hommes, n’eut pas le courage d’aller à la rencontre de Jésus en plein jour. C’est au cœur de sa nuit qu’il vint auprès de Jésus pour s’entretenir des questions qui lui tenaient à cœur. C’est de cet épisode qu’est née l’expression « nicodémite » pour désigner ceux qui n’osent pas vivre leur foi au grand jour.

Jésus l’invite immédiatement à naître de nouveau, à naître d’en haut. Il lui fait comprendre qu’il faut arrêter de vivre seulement en fonction de ses peurs, jamais de ses désirs. Jésus lui explique qu’à vivre à hauteur d’homme on ne s’élève jamais plus haut que ce que nous sommes capables par nos propres moyens.

A quoi bon fêter Noël si, toi, tu ne viens pas au monde, si tu restes enfermé dans ton tourment intérieur ? Car Noël, n’est pas l’histoire d’une naissance qui reste dans l’ombre, cachée au cœur de la nuit. Noël, dès le départ, va connaître ce que nous appellerions aujourd’hui un buzz, un bruit médiatique assez important pour que la nouvelle gagne de proche en proche toute la région et plus tard le monde entier. Fêter Noël, c’est donc fêter la fin de la vie cachée, de la vie avec la peur au ventre, de la vie avec la honte vissée au creux des reins. Fêter Noël, c’est participer à cette publicité de la vie ; c’est mettre en lumière la beauté d’une naissance et la grandeur d’une existence. A quoi bon fêter Noël si c’est pour rester enfermé dans ses craintes, ses obsessions, si c’est pour ne vivre qu’un bout de ce que Dieu nous permet ?

Etre libre

A quoi bon fêter Noël si toi, tu ne viens pas au monde, si tu n’es pas libre de ta parole, de tes choix, de ton éthique ? L’Esprit qui te porte, l’Esprit qui est ton souffle, nul ne peut le maîtriser, nul ne peut le prévoir. Il échappe à nos pronostics, aux prédictions des Mayas, des analystes, au FMI, au gouvernement, aux professeurs ronchons. L’Esprit qui est notre capacité à nous mettre en relation avec autrui et à produire du fruit, ne peut pas être mis en équation, il est indéterminé, libre comme l’air qu’il remue sans cesse.

Naître d’en haut, agir selon l’Esprit, c’est laisser notre créativité donner toute sa démesure. C’est découvrir que nous sommes autorisés à aimer sans limite, sans frein, sans peur et sans honte. Se sentir autorisé, c’est l’œuvre de la foi, de la confiance dans notre capacité à entreprendre de grandes et belles choses. C’est aussi considérer que nous ne sommes pas nés une fois pour toutes. Dans le dialogue entre Nicodème et Jésus, quelque chose de neuf se crée. Nicodème découvre un nouvel aspect de la vie auquel son intelligence, son savoir, ne l’avaient pas rendu sensible jusque là : il n’est pas vrai que nous n’en finissons pas de vieillir ! Il est vrai que nous n’en finissons pas de venir au monde.

C’est dans cette perspective qu’il est juste et bon de fêter Noël : il s’agit de célébrer la vie qui excède tout ce qu’on en a dit jusque là, tout ce que les plus grands cerveaux ont pu concevoir. Par les nouvelles rencontres que nous faisons, par les nouvelles entreprises que nous initions, nous ne nous contentons pas de ce que nous pouvons faire individuellement, mais nous nous ouvrons à ce que nous pouvons accomplir ensemble, sur cette terre où Dieu nous donne d’évoluer.

Le monde, un lieu pour vivre toujours à nouveau

Si nous prenons au sérieux cette déclaration d’amour de Dieu pour le monde, alors notre vie, ici et maintenant, ne peut que s’intensifier, gagner en qualité. Si nous prenons au sérieux la déclaration d’amour de Dieu pour le monde, nous pouvons expérimenter d’ores et déjà cette vie éternelle qui consiste à vivre de manière absolue, sans avoir à regretter ensuite notre trajectoire. Dans notre face à face avec le divin, nous pouvons atteindre des sommets de l’existence qui seront à jamais constitutifs de notre être, que rien, ni personne, ne pourra jamais nous retirer.

A quoi bon fêter Noël si, toi, tu ne viens pas au monde ? Car le miracle par lequel le monde est sauvé, c’est la natalité, écrivait Hannah Arendt. En effet, c’est par la naissance que notre humanité est à même de produire quelque chose de singulièrement neuf, capable de sauver le monde de la reproduction stérile d’un état qui est, pour l’heure, loin d’être satisfaisant. Aimer le monde, à la suite de Dieu, c’est agir pour qu’il soit un peu plus vivable, un peu plus propice à être source de joie pour ceux qui l’habitent. Cela n’est possible qu’à la condition que nous sortions de nos tanières, que nous vivions au grand jour, que nous cessions d’être l’ombre de nous-mêmes.

Fêter Noël, c’est célébrer notre capacité à ajouter de la vie à la vie, la capacité qui nous est donnée par Dieu de renouveler l’élan qui nous attire vers la vie éternelle. 

Amen

Lecture de la Bible

Jean 1:1-18

1 Au commencement était la Parole,
et la Parole était avec Dieu,
et la Parole était Dieu.
2 Elle était au commencement avec Dieu.
3 Toutes choses ont été faites par elle,
et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle.
4 En elle était la vie,
et la vie était la lumière des hommes.
5 La lumière luit dans les ténèbres,
et les ténèbres ne l’ont point reçue.

6 Il y eut un homme envoyé de Dieu:
son nom était Jean.
7 Il vint pour servir de témoin,
pour rendre témoignage à la lumière,
afin que tous aient foi par lui.
8 Il n’était pas la lumière,
mais il parut pour rendre témoignage à la lumière.

9 Cette lumière
était la véritable lumière, qui,
en venant dans le monde,
éclaire tout homme.
10 Elle était dans le monde, et le monde a été fait par elle,
et le monde ne l’a point connue.
11 Elle est venue chez les siens,
et les siens ne l’ont point reçue.
12 Mais à tous ceux qui l’ont reçue,
à ceux qui ont foi en son nom,
elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu,
lesquels sont nés,
13 non du sang,
ni de la volonté de la chair,
ni de la volonté de l’homme,
mais de Dieu.

14 Et la parole a été faite chair,
et elle a habité parmi nous,
pleine de grâce et de vérité;
et nous avons contemplé sa gloire,
une gloire comme la gloire du Fils unique venu du Père.

15 Jean lui a rendu témoignage,
et s’est écrié:
C’est celui dont j’ai dit:
Celui qui vient après moi m’a précédé, car il était avant moi.

16 Et nous avons tous reçu de sa plénitude, et grâce pour grâce;
17 car la loi a été donnée par Moïse,
la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ.

18 Personne n’a jamais vu Dieu;
Dieu, le Fils unique qui est dans le sein du Père, est celui qui l’a fait connaître.

Jean 3:1-16

Il y eut un homme d’entre les pharisiens, nommé Nicodème, un chef des Juifs, 2 qui vint, lui, auprès de Jésus, de nuit, et lui dit: Rabbi, nous savons que tu es un docteur venu de Dieu; car personne ne peut faire ces miracles que tu fais, si Dieu n’est avec lui.

3 Jésus lui répondit: En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu.

4 Nicodème lui dit: Comment un homme peut-il naître quand il est vieux? Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et naître?

5 Jésus répondit: En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît d’eau et d’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu. 6 Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l’Esprit est Esprit. 7 Ne t’étonne pas que je t’aie dit: Il faut que vous naissiez de nouveau. 8 Le vent souffle où il veut, et tu en entends le bruit; mais tu ne sais d’où il vient, ni où il va. Il en est ainsi de tout homme qui est né de l’Esprit.

9 Nicodème lui dit: Comment cela peut-il se faire?

10 Jésus lui répondit: Tu es le docteur d’Israël, et tu ne sais pas ces choses! 11 En vérité, en vérité, je te le dis, nous disons ce que nous savons, et nous rendons témoignage de ce que nous avons vu; et vous ne recevez pas notre témoignage. 12 Si vous ne croyez pas quand je vous ai parlé des choses terrestres, comment croirez-vous quand je vous parlerai des choses célestes? 13 Personne n’est monté au ciel, si ce n’est celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme qui est dans le ciel.

14 Et comme Moïse éleva le serpent dans le désert, il faut de même que le Fils de l’homme soit élevé, 15 afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle.

16 Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle.

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