Désormais, toutes les générations m’appelleront « celle qui est heureuse »

Luc 1 :26-55

Culte du 24 décembre 2009
Prédication de pasteur Marc Pernot

( Luc 1 :26-55 )

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Veillée de Noël 2009 à l'Oratoire du Louvre
prédication du pasteur Marc Pernot

Tout l’Évangile est déjà contenu dans ce que l’ange Gabriel dit à Marie, et dans la transformation de cette jeune fille toute simple en mère de Jésus.

« Je te salue, toi à qui une grâce a été faite; le Seigneur est avec toi…
Marie, n’aie pas peur, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu »

L’Évangile c’est cette bonne nouvelle qui nous est adressée à chacun de nous en particulier, comme il est adressé ici à Marie. Car cette parole de salut est adressée par Dieu à chacun de nous, c’est chacun de nous qu’il appelle tendrement par son nom pour nous dire sa grâce.

Et si l’Évangile cite ici le nom de Marie, c’est sans doute parce que tel était le nom de la mère de Jésus, c’était un nom féminin très courant en Israël car c’était celui de la sœur de Moïse, sœur qui était prophète et qui était l’auteur d’un beau cantique après la libération de l’esclavage en Égypte. Mais dans un texte aussi dense que les évangiles, il n’y a rien d’inutile, rien d’anecdotique. Ce nom de Marie signifie littéralement « la rebelle, la révoltée ». C’est bien pour cela qu’il est question de grâce et c’est pour cela que ce texte fondamental de l’Évangile est une bonne nouvelle pour nous. C’est que tout, dans ce texte, annonce la grâce de Dieu. Il nous offre de vivre, de vivre bien, de vivre heureux, de vivre une vie incroyablement utile et bonne… même si nous ne sommes pas très très performant aujourd’hui, même si nous sommes rebelle, révolté, paresseux, superficiel, même si nous sommes aujourd’hui haineux, pinaillant pour trouver des poux dans la tête des autres, énervé par tout, égoïste, redresseur de torts, égocentrique… Dieu rend visite à Marie, à ce rebelle que nous sommes, et c’est normal, c’est ça, la grâce. Le salut est fait pour les pécheurs, par pour les nannanges.

D’ailleurs, ce texte insiste sur la grâce. Par définition, la grâce n’est pas faite pour les justes, mais pour les rebelles, pour les révoltés, pour les coupables. La grâce, par définition, c’est immérité, c’est in-juste, c’est pour offrir une nouvelle chance au pécheur, une chance de se redresser, d’accueillir cette grâce, et d’en vivre, d’en vivre enfin ! La grâce c’est la fin de la peur, de cette peur de Dieu qu’avaient les pécheurs avant que ne résonne dans le monde l’Évangile du Christ, la bonne nouvelle de l’amour de Dieu, de son amour que rien ne lasse, rien n’épuise, même s’il est tant et tant déçu.

« La grâce »… depuis lors, chacun de nos cultes commence par cette annonce, et cela suffit presque, d’entendre cette annonce de la grâce de Dieu ; d’entendre ce premier mot qui nous libère de toute crainte de Dieu, ce mot qui nous permet de compter sur lui, de nous appuyer sur lui, d’espérer en lui même si nous sommes pécheur. « La grâce », ce mot est fait pour le pécheur que nous sommes, pour nous qui n’arrivons pas à nous libérer de ce qui nous enchaîne, à nous libérer de notre énervement contre la vie et contre les autres, qui n’arrivons pas à nous libérer de notre peur qui nous transforme en un écureuil égoïste, qui nous transforme en redresseur de torts implacable, qui nous enferme dans notre solitude.

Le salut de Dieu, l’annonce de la grâce nous ouvre à une toute nouvelle fécondité de vie, à une joie nouvelle, profonde et vraie.

D’abord le « je te salue », en grec, littéralement « réjouis-toi » et l’ange ajoute, tendrement, personnellement : « Ne sois plus dans la crainte» :

  • ne sois plus dans la peur, peur de ta petitesse, peur de ta faiblesse, peur de ce qui peut arriver…
  • Ne sois plus dans la peur des autres, peur de leurs haines contre nous, peur de leur habileté à voir le mal, à dire du mal, à blesser, à diminuer l’autre.
  • Ne sois plus dans la peur de Dieu.

Pourquoi ? Parce que « le Seigneur est avec toi, tu as complètement trouvé grâce à ses yeux ». Il n’y a donc absolument rien à craindre de Dieu. Il a, nous ne savons pourquoi (c’est comme ça), une extraordinaire sympathie pour nous, il est tombé sous notre charme irrésistible. Et nous sommes donc, individuellement, personnellement, le meilleur ami de Dieu (comme nous le dit Jésus-Christ Jean 15 :15). C’est une grâce individuelle, comme ici, ce n’est pas une grâce accordée à l’humanité, mais à une femme particulière, Marie de Nazareth. En Christ nous savons que cette grâce est accordée à chacun, même au plus petit. L’Éternel, le Dieu de l’univers, est avec nous, et il nous comble de sa grâce.
Souvent, c’est par crainte que nous sommes si méchants. La grâce de Dieu chasse la crainte. Oh, pas comme un coup de baguette magique, mais peu à peu, jour après jour. C’est comme une conception, comme une grossesse, comme une naissance, comme une croissance, jour après jour, année après année. C’est une maturation. Il en faut du temps à Marie, « la révoltée » pour devenir « la servante » de Dieu, puis, un peu plus loin, « celle qui est heureuse ».

Car cette annonce de la grâce de Dieu et l’attitude humble de Marie n’est pas la fin de l’histoire, ce n’est pas la fin de ce processus qu’est l’Évangile. En Christ, nous ne sommes pas choisis par Dieu pour être son esclave, mais pour devenir bien autre chose, même si cela prend un certain temps, quelques jours ou quelques mois comme pour Marie, quelques années pour d’autres.

Mais déjà, cette grâce de Dieu la fait se lever, littéralement « elle ressuscite », cette expérience de l’attachement que Dieu a pour elle la rend vivante. Elle n’est plus Marie « la rebelle », elle n’a pas encore conscience d’être la fille de Dieu, mais elle est déjà debout, en marche.

Bien entendu, l’homme que je suis ne sera jamais enceint d’un enfant, qu’importe. Ce texte est pour chacune & chacun, comme tous les textes de l’Évangile, homme ou femme. Cette promesse de fécondité est pour chacun de nous, même si nous n’avons pas d’enfant, c’est selon notre vocation personnelle, selon nos choix, selon nos qualités propres, selon les circonstances également.

C’est avec Dieu que nous donnerons la Vie. Et cette Vie dont nous parlons ici n’est pas cette chose fragile qu’est une vie biologique, mais la Vie avec un V majuscule, la Vie qui est engendrée quand un peu d’Esprit Saint donne une dimension ultime à cet éphémère tissu de molécules que nous sommes aussi en ce moment. Et cet assemblage prend Vie avec un V majuscule quand une part de foi, d’espérance et d’amour transcendante notre seule survie biologique.

Tout homme est appelé, comme Marie, à recevoir l’Esprit de Dieu pour que son existence humaine soit porteuse d’un être nouveau, capable d’aimer, capable d'être fidèle, capable de pardonner même unilatéralement. Capable parfois d’une parole ou d’un geste qui ouvre à la Vie avec un grand V, la Vie éternelle.

Quel est le secret de cette force incroyable, de cette vie qui est en Christ, de son amour plus fort que la mort? Nous en avons quelques éléments dans ce texte:

  • Le premier point d'être serviteur des autres, comme Marie choisit d'être humble servante, comme le Christ se fait serviteur.
  • Le second point c'est probablement de se savoir « béni » en particulier par Dieu, comme Marie l’apprend d’Elisabeth, qu’elle n’est pas seulement une servante, pas un simple outil interchangeable dans la main de Dieu, mais une vraie personne aimée en tant que telle. C’est alors que jaillit du cœur et de la bouche de Marie ce chant de louange et de joie qu’est « magnificat ». Elle n’est plus une servante, mais une femme libre. Elle n’est plus un ventre, un outil, elle est une personne.

Marie n’est plus « la révoltée ». Marie n’est plus « la servante », elle reçoit un nouveau nom : « désormais, toutes les générations m’appelleront heureuse » (1 :48)

En Christ, nous ne sommes plus sous le simple signe de l’obéissance à Dieu, mais fondamentalement, ce que le Christ apporte à l’humanité, c’est une libération, c’est un nom nouveau qu’il nous donne, c’est un état d’esprit nouveau.

Désormais, nous ne serons plus appelés « serviteur » de Dieu, si nous le sommes ce sera bénévolement, pour le simple plaisir d’être avec Dieu.

Désormais, nous seront appelés « heureuse » ou « heureux ». Car il y a un vrai bonheur, une paix à vivre reconnu et aimé par Dieu, reconnu comme unique et irremplaçable par Lui dans l’univers tout entier.

Ce bonheur, ce n’est pas un bonheur pour plus tard, mais pour tout de suite, même si cette joie est en partie paradoxale, en tension avec la création tout entière qui souffre les douleurs d’un accouchement.

Mon âme exalte le Seigneur,
Et mon esprit se réjouit en Dieu, mon Sauveur,
parce qu’il a jeté les yeux sur nous,
en Christ, par son amour, il nous donne le bonheur et la vie.

Joyeux Noël à chacun de vous !

Amen.

Lecture de la Bible

Luc 1:26-55

Au sixième mois, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, appelée Nazareth, 27 auprès d’une vierge fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph. Le nom de la vierge était Marie.

28 L’ange entra chez elle, et dit: Je te salue, toi à qui une grâce a été faite; le Seigneur est avec toi.

29 Troublée par cette parole, Marie se demandait ce que pouvait signifier une telle salutation.

30 L’ange lui dit: Ne crains point, Marie; car tu as trouvé grâce devant Dieu. 31 Et voici, tu deviendras enceinte, et tu enfanteras un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus. 32 Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut, et le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père. 33 Il règnera sur la maison de Jacob éternellement, et son règne n’aura point de fin.

34 Marie dit à l’ange: Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d’homme?

35 L’ange lui répondit: Le Saint-Esprit viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre. C’est pourquoi le saint enfant qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu. 36 Voici, Elisabeth, ta parente, a conçu, elle aussi, un fils en sa vieillesse, et celle qui était appelée stérile est dans son sixième mois. 37 Car aucune parole n’est impossible à Dieu.

38 Marie dit: Je suis la servante du Seigneur; qu’il me soit fait selon ta parole! Et l’ange la quitta.

39 Dans ce même temps, Marie se leva, et s’en alla en hâte vers les montagnes, dans une ville de Juda. 40 Elle entra dans la maison de Zacharie, et salua Elisabeth.

41 Dès qu’Elisabeth entendit la salutation de Marie, son enfant tressaillit dans son sein, et elle fut remplie du Saint-Esprit. 42 Elle s’écria d’une voix forte: Tu es bénie entre les femmes, et le fruit de ton sein est béni. 43 Comment m’est’est-il accordé que la mère de mon Seigneur vienne auprès de moi? 44 Car voici, aussitôt que la voix de ta salutation a frappé mon oreille, l’enfant a tressailli d’allégresse dans mon sein. 45 Heureuse celle qui a cru, parce que les choses qui lui ont été dites de la part du Seigneur auront leur accomplissement.

46 Et Marie dit: Mon âme exalte le Seigneur, 47 Et mon esprit se réjouit en Dieu, mon Sauveur, 48 Parce qu’il a jeté les yeux sur la bassesse de sa servante. Car voici, désormais toutes les générations me diront bienheureuse, 49 Parce que le Puissant a fait pour moi de grandes choses. Son nom est saint, 50 Et sa miséricorde s’étend d’âge en âge Sur ceux qui le craignent.

51 Il a déployé la force de son bras; Il a dispersé ceux qui avaient dans le coeur des pensées orgueilleuses. 52 Il a renversé les puissants de leurs trônes, Et il a élevé les humbles. 53 Il a rassasié de biens les affamés, Et il a renvoyé les riches à vide. 54 Il a secouru Israël, son serviteur, Et il s’est souvenu de sa miséricorde, - 55 Comme il l’avait dit à nos pères, -Envers Abraham et sa postérité pour toujours.

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