Sommaire du N° 780 (2009 T4)
Éditorial
- Installations, James Woody
Dossier : sommes-nous tous calvinistes ?
- Prières de Jean Calvin
- Calvin, en chemin par l'Esprit, Marc Pernot
- Le grand commencement, Olivier Abel
- Castellion plutôt que Calvin, André Gounelle
- Calvin plutôt que Castellion Jean-Luc Mouton
- Celui que Dieu a dompté, Rémy Hebding
- Calvin, entre angoisse et libération, Denis Crouzet
- Bibliographie
Textes
- Profession de foi, Laurie Cousin
Agenda
- Calendrier des cultes
- Agenda
Nouvelles de l'Oratoire
- Reconnaissance des Conseils et installation du pasteur James Woody
- Présentation des conseillers presbytéraux élus en avril
- Bicentenaire du temple 1811-2011
Tribune des paroissiens
- Pourquoi j'aime venir au culte, Marie-Madeleine Monthé-Kameni
- La joie de dessiner, Annie Vallotton
Aide et entraide
- Accueil du mercredi, Rose-Marie Boulanger
- Devenir bénévole à La Clairière, Gilles Petit-Gats
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Dossier du mois
Sommes-nous tous calvinistes ?
Prière du soir
Seigneur Dieu, puisqu'il
t'a plu de créer la nuit pour le repos de l'homme, comme
tu as ordonné le jour pour son travail, veuille accorder
à mon corps une nuit de repos, où mon âme s'élève
à toi et où mon cœur soit rempli de ton amour.
Apprends-moi, ô Dieu, à te confier tous mes soucis
terrestres et à me souvenir sans cesse de ta miséricorde,
afin que mon âme puisse, elle aussi, jouir du repos spirituel.
Fais que mon sommeil ne soit pas excessif, mais qu'il serve à
réparer mes forces, pour que je sois plus disposé
à te servir.
Qu'il te plaise également de me conserver pur dans mon corps
et dans mon esprit, me préservant de toutes tentations et
de tout danger, afin que mon sommeil lui-même soit à
la gloire de ton nom.
Et puisque ce jour ne s'est point écoulé sans que
je ne t'aie offensé en plusieurs manières, moi qui
suis un pauvre pécheur, veuille, ô Dieu, de même
que tu caches maintenant toutes choses dans ténèbres
de la nuit, ensevelir aussi tous mes péchés, selon
ta miséricorde, afin que je ne sois pas éloigné
de ta face.
Exauce-moi, mon Dieu, mon Père, mon Sauveur, au nom de Jésus-Christ,
ton Fils bien-aimé. Amen.
Prière du matin
Mon Dieu, mon Père et
mon Sauveur puisqu'il t'a plu de me conserver par ta grâce
pendant la nuit qui vient de finir et jusqu'au jour qui commence,
fais que je l'emploie tout entier à ton service et que je
ne pense, ne dise et ne fasse rien qui ne soit pour te plaire et
obéir à ta sainte volonté, afin que toutes
mes actions se rapportent a la gloire de ton nom et au salut de
mes frères.
Et de même que pour cette vie terrestre, tu fais luire ton
soleil sur le monde, veuille aussi éclairer mon intelligence
Par la clarté de ton Esprit, afin de me diriger dans la voie
de ta justice.
Ainsi ô mon Dieu, à quelque chose que je m'applique,
que mon but soit toujours de te servir et de t'honorer, attendant
tout mon bien de ta seule bénédiction et n'entreprenant
rien qui ne te soit pas agréable.
Fais aussi, Seigneur, que tout en travaillant pour mon corps et
pour la vie présente, j'élève mon âme
plus haut jusqu'à cette vie céleste et bienheureuse
que tu réserves à tes enfants.
Calvin, en chemin par l'Esprit
Pour être honnête,
il faut bien reconnaître qu'au cours des études de
théologie protestante je n'ai eu l'occasion de lire que quelques
pages des œuvres de Calvin, et c'était dans un cours
d'histoire. C'est un peu ingrat, dans un sens, de la part de notre
église. Mais dans un autre sens, c'est peut-être ce
qui est plus fidèle à la pensée de Calvin.
L'esprit, ou plutôt l'Esprit qui l'animait est bien le plus
important pour nous, c'est plus utile pour nous aujourd'hui que
le point où en était arrivé la pensée
particulière de Jean Calvin au milieu du XVIème siècle.
Ce qui est remarquable, c'est qu'il a été capable
de réforme, capable de cette mobilité et de ce courage,
capable aussi d'une réforme non seulement personnelle, ce
qui est déjà bien, mais d'une réforme qui n'oublie
pas les autres, d'une réforme pour les autres, d'une réforme
communicative.
C'est cet esprit qui est l'essentiel et si nous nous arrêtions
aux simples fruits de la recherche de Calvin plutôt qu'à
ce qui anime sa recherche nous passerions à côté
de l'essentiel, nous renierions ce mouvement, cette vie.
Nous savons combien il est difficile d'évoluer, de nous réformer
intelligemment. Nous avons plutôt tendance à garder
les mêmes options politiques, religieuses, le même mode
de vie et d'éducation que nos parents. Ou, au contraire d'en
changer radicalement, par réaction.
Calvin n'a pas cherché à changer pour le plaisir de
changer, mais il a simplement, si je puis dire, évolué,
pour garder ou retrouver ce qu'il y avait de meilleur, pour se recentrer
dessus, le débarrasser de ce qui le parasitait et inventer
de nouveaux moyens pour le mettre en valeur. C'est ce mouvement
de réforme qui est intéressant pour nous et qui est
évidemment à poursuivre sans cesse dans bien des domaines.
Jean Calvin a trouvé cet élan dans le travail, bien
entendu, il a appris les langues bibliques, et étudié
à peu près tout ce que les théologiens des
siècles et millénaires précédents ont
pu écrire. Ce gros travail d'étude et de réflexion
apparaît bien dans l'œuvre de Calvin. Mais il y a un
autre travail qui existe derrière son génie, un travail
qu'il ne dissimule pas mais dont il ne parle que fort peu, c'est
celui de la foi, le travail de l'Esprit en lui.
C'est en quelques mots seulement dans son introduction à
son commentaire du livre des Psaumes que Calvin déclare que
l'expérience spirituelle a été décisive
pour lui. Il explique qu'il était tout dévoué
à ses études de droits, lorsque " Dieu par sa
providence secrète, me fit tourner bride d'un autre côté
", il fit alors de plus en plus place à l'étude
de la théologie et de la Bible dans son emploi du temps.
Du point de vue des idées, il était, nous dit-il,
" si obstinément adonné aux superstitions de
la Papauté " qu'il a fallu un miracle " pour le
tirer d'un bourbier si profond ", et c'est par une conversion
subite que Dieu changea son cœur, lui donnant de goûter
à la vraie piété, à cette douceur, à
la connaissance de Dieu par l'expérience.
Du point de vue de sa personnalité, Calvin explique qu'il
était d'un naturel timide, aimant à étudier
tranquillement et solitairement dans les livres, que c'était
pour lui une souffrance de parler en public, et donc qu'il n'avait
aucune aspiration ni qualité pour devenir l'homme public
qu'il est devenu. Et Calvin il explique qu'il est un peu comme David,
qui a été tiré par Dieu de son humble travail
et de la solitude des champs pour accomplir un service. Calvin se
compare à Jonas qui tout fait pour refuser sa vocation de
prophète envoyé par Dieu pour sauver ses ennemis.
Il en a fallu à Dieu des prodiges pour l'exercer et l'accompagner
dans cette route. Calvin dit combien ce travail de Dieu pour lui,
en lui, avec lui est essentiel, mais il se contente de signaler
qu'il y a là l'essentiel sans rien en dire d'autre, par pudeur
et timidité, mais aussi parce que ce qui est de l'ordre de
l'expérience est difficilement partageable : " si je
voulais raconter les divers combats par lesquels le Seigneur m'a
exercé (…), ce serait une longue histoire. Mais afin
que je n'ennuie pas de paroles inutiles les lecteurs, il me suffira
de dire (…) qu'il me semblait qu'à chaque pas Dieu me
montrait le chemin, et que cela m'a été un merveilleux
soulagement. "
Le moteur de cet esprit de réforme est donc bien résumé
dans cette devise de Calvin " Ora et Labora ", "
Prie et travaille ". Dans l'une et l'autre de ces deux activités
il y a une recherche de fidélité à quelque
chose d'essentiel qui nous précède mais aussi un élan
pour avancer. La prière et le travail sont essentiel, mais
la prière vient en premier. Pour Calvin, l'expérience
spirituelle est essentielle comme point de départ décisif
mais aussi à chaque moment de notre cheminement pour éclairer
notre route et pour avoir la force de dépasser nos faiblesses.
Le grand commencement
Le Réformateur nous initie à une modernité
encore à découvrir
Disons le d'abord : mon propos
n'est pas d'arrondir les angles, ni de brosser le portrait moderne,
libéral, démocratique, et gentillet du Réformateur
en pasteur végétarien. C'est d'abord de comprendre
en quoi la Genève de 1550 n'est pas une Calvingrad glaciaire,
mais un volcan, une ville en état de révolution, attirant
des réfugiés de toute l'Europe, et qu'il a fallu canaliser
cette énergie - quand elle n'y est plus on ne comprend pas
comment on a pu avoir besoin de canalisations aussi contraignantes,
ni l'énergie qu'il a fallu pour briser les liens de l'ancien
monde et instaurer nos tranquilles libertés. Calvin malgré
lui n'a pas été un humaniste en robe de chambre, mais
le refondateur d'une cité-école, d'une internationale
entourée d'ennemis acharnés.
Tout commence avec le sentiment radical de la grâce divine.
Quand le cardinal-évêque de Carpentras, Jacques Sadolet,
exhorte les Genevois à se soucier du prix infini de leur
âme et de leur salut éternel en revenant à l'Eglise
romaine, Calvin répond que la question n'est pas là
mais simplement d'obéir à Dieu sans s'occuper de soi
- seule façon de trouver un rapport authentique à
soi-même. La grâce, c'est l'insouci de savoir si on
a la grâce. Il faut se vider de tout souci de soi, et de tout
souci de son propre salut, et " détourner notre regard
de nous-mêmes ". Il ne s'agit plus d'être sauvé,
mais de reporter ce souci sur les autres, sur le monde.
La grâce n'est donc plus pour lui le couronnement de la nature
ni de l'histoire, un achèvement, mais ce par quoi tout commence.
C'est le perpétuel recommencement du monde. Tout est par
grâce. Le monde n'est qu'un chant, qu'un rendre grâce.
En quoi la nature rend-elle grâce ? Comprendre cela c'est
comprendre la nature entière. En quoi nos Etats et nos Eglises
rendent-elles grâce, les uns par la joie des humains de se
témoigner leur amour mutuel, les autres par leur joie commune
de chanter la louange de Dieu ? En quoi est-ce que je rends grâce
d'exister ? Comprendre ma propre gratitude c'est me comprendre moi-même,
de la tête aux pieds.
D'où l'incroyable énergie que Calvin met à
tout recommencer. Comment l'arrêter ? Il n'est pas au port,
en train d'arriver, il vient tout juste de commencer. D'où
ce titre, Institution de la religion chrétienne ; carrément.
Il s'agit aussi de mettre fin aux dérives qui menacent de
l'intérieur la Réforme d'une sorte de dilution dans
le n'importe quoi. Il sait que c'est cette menace intérieure
qui disperse les forces et la légitimité de la Réforme.
Il faut de toute urgence rappeler les limites. On ne peut laisser
les dissidents dissider tout seuls. Il faut qu'ils dissident et
diffèrent ensemble, dans certaines limites.
C'est ici qu'interviennent les Ecritures rendues à la parole
vive et à ceux qui la reçoivent. On sent chez Calvin
une confiance immense dans la parole, à elle seule capable
d'ouvrir un monde : on se presse au culte, à Genève,
on y vient de partout, il faut interdire de réserver des
chaises, c'est comme un grand théâtre en train de s'ouvrir
autour du Livre, qu'il s'agit d'interpréter, non au sens
théorique, mais dans l'existence. Et il ne faut pas s'étonner
si les enfants s'appellent Abraham, Ruth ou Samuel : on est "
dans " le texte, et l'on s'interprète au miroir des
Ecritures.
Au passage, la langue française s'élargit pour supporter
une parole souveraine, une voix dont s'empare des milliers de nouveaux
locuteurs. Il faut donc redire que Calvin est un protestant latin,
formé au droit romain, penseur de l'institution et de la
mesure, faisant rayonner dans l'Europe entière la langue
française, et préparant Montaigne et Descartes. Avant
Montaigne, Calvin, qui avait étudié Sénèque,
se sépare du stoïcisme, dont il trouve qu'il prône
un Homme imaginaire, aussi insensible qu'une bûche, et refusant
les joies et les tristesses, les passions et les limites de l'homme
ordinaire. Avant Descartes, Calvin affirme la transcendance, l'extériorité
absolue de Dieu au monde, tout entier devenu mesurable. Calvin,
c'est la France.
Calvin a longtemps réussi à tenir ensemble, par sa
gouaille mordante et l'ampleur ordonnée de ses vues, le camp
des rieurs qui se moquent des superstitions et des raisonnements
creux des théologiens, et le camp résolu de ceux qui
ont retourné leur vie sans crainte de se séparer,
parce ce que l'amour de Dieu est plus grand que toutes les observations
religieuses dans lesquelles on voudrait l'enfermer. Mais bientôt
la panique et la persécution explose, tout bifurque et chacun
doit choisir son camp. Calvin choisit l'exil et invente une issue
géniale à l'alternative de se révolter ou d'accepter
le martyre. Dieu n'est pas enclos dans nos petites cérémonies
humaines, il est partout. Les individus sont ainsi déliés
pour contracter des alliances nouvelles, des libres alliances, et
Calvin prépare ainsi toutes les philosophies du pacte social,
de Hobbes à Rousseau, et c'est pourquoi Calvin est plus important
pour la pensée politique moderne que Machiavel.
On voit en Calvin le prototype du puritain austère et moraliste.
Mais jusqu'au début du XVIIème siècle, on lui
reproche sa vie dissolue, sa débauche, son amour du vin,
et il faut mesurer que c'est à cette propagande que Genève
a du répliquer, pour montrer que la Réforme ne conduisait
pas à l'immoralité, etc. Pour lui on ne peut recevoir
cette grâce qu'en manifestant de la gratitude, et il fonde
toute son éthique sur cette gratitude. C'est à la
gratitude que l'on mesure l'émancipation, l'autonomie d'une
sujet, sa sortie de la minorité : un sujet incapable de gratitude
est encore puéril, qui croit ne rien devoir qu'à lui-même.
Au contraire le sujet se tient " devant Dieu ", d'où
l'idéal moral de sincérité, si important pour
la formation du sujet moderne : ne pas se mentir à soi-même,
aux autres ni à Dieu.
Et la pragmatique de l'idée de prédestination chez
Calvin, bien loin de ce qu'on croit, indique cette confiance, mais
aussi cette limite libératrice : ni les prêtres, ni
les rois, ni même les sujets ne peuvent mettre la main sur
cette partie de nous qui n'appartient qu'à Dieu, et une réserve
est ainsi placée, un voile d'ignorance qui nous redonne chance,
puisque jusqu'à la fin nous ne saurons jamais entièrement
qui nous sommes, et qu'à la limite cela n'est pas notre affaire.
Oui, la modernité toute entière, aujourd'hui si incomprise,
est comme contenue dans cet intense commencement.
Olivier Abel
Castellion plutôt que Calvin
Les raisons du choix des protestants libéraux
Les protestants libéraux
placent souvent Castellion au dessus de Calvin. En 1914, le pasteur
Etienne Giran les oppose ; il voit en Castellion un véritable
protestant, délivré du dogmatisme et de l'autoritarisme
du Réformateur de Genève, encore très moyenâgeux.
De nos jours, les pasteurs libéraux P. Vassaux et V. Schmid,
tout en reconnaissant la valeur de ce qu'a apporté Calvin,
ne cachent pas qu'ils se sentent plus proches de Castellion.
Pourquoi cette préférence ?
Alors que Calvin redoute la liberté de conscience, Castellion
la défend. Le bûcher de Servet (dont il ne partage
pas les idées) le révolte. " Tuer un homme, écrit-il,
ce n'est pas défendre une doctrine ; c'est tuer un homme
". Il juge scandaleux de pratiquer le " forcement des
consciences " en persécutant et massacrant ceux qui
croient autrement. Il conseille de laisser chacun libre d'adhérer
à la religion qu'il juge la meilleure. Au XVIème siècle
catholiques et protestants rejettent avec indignation cette proposition
qui nous semble aujourd'hui la seule juste.
Grand érudit, Castellion définit les règles
d'une étude rigoureuse des textes bibliques : les comprendre
dans leur contexte historique, tenir compte de leur genre littéraire
(prophétie, enseignement, poésie), ne pas oublier
que les manuscrits comportent des omissions et des erreurs. Tout
dans la Bible n'est pas Parole de Dieu ; l'inspiration divine s'y
mélange avec des idées et des formulations humaines.
Alors que Calvin affirme leur parfaite clarté, Castellion
souligne l'obscurité et l'ambiguïté de nombreux
passages, ce qui rend légitimes des interprétations
diverses.
Pour Castellion, la foi est confiance en Dieu, amour du prochain,
et non savoir surnaturel. Les doctrines que les églises,
catholique comme protestante, veulent imposer sont discutables.
Que celui à qui elles conviennent les adopte, mais qu'il
admette que d'autres en soient insatisfaits et cherchent à
exprimer leur foi différemment. S'il ne faut pas donner aux
doctrines et aux rites une valeur inconditionnelle, par contre la
pureté de la vie et l'amour du prochain sont des impératifs
absolus qu'on ne doit jamais enfreindre, même sous prétexte
de rendre gloire à Dieu.
Liberté de conscience, interprétation critique de
la Bible, pluralisme doctrinal, primat de l'éthique, voilà,
ce qui, aux yeux de nombreux protestants libéraux, fait la
supériorité de Castellion sur Calvin.
André Gounelle
Calvin plutôt que Castellion
Castellion le semeur d'idées, Calvin le fondateur,
le créateur génial
Nul doute, pratiquement seul à
l'époque, Sébastien Castellion s'est dressé
contre le principe même de la mise à mort pour cause
d'hérésie. Avec une modernité assez étonnante,
Castellion écrit contre Calvin cette sentence magnifique
et d'une évidence absolue pour les consciences du XXIème
siècle " Tuer un homme, ce n'est pas défendre
une doctrine, c'est tuer un homme ".
Sauf que l'ami Castellion n'avait pas beaucoup de chances d'être
entendu au XVIème siècle. Sur ce plan, Calvin - contrairement
à cette fausse réputation, tenace et complaisamment
répétée - n'est pas l'horrible et froid persécuteur
de Servet et autres " sorcières " mais le produit
d'un temps où l'on exigeait que les compétences civiles
et ecclésiastiques restent " conjointes et distinctes
". C'est dire que pour Calvin, comme pour tous les théologiens
catholiques ou protestants du XVIème, le magistrat avait
compétence pour punir l'hérésie.
Mais rappelons que Castellion est un fervent admirateur et disciple
de Calvin qu'il rejoint à Strasbourg après avoir lu
sa première version de l'Institution chrétienne. Mais
aussi qu'il dirige quelque temps le Collège fondé
par Calvin à Genève. Le brillant Sébastien
prend cependant quelque ombrage de telle ou telle critique de son
maître à propos de ses traductions bibliques. Les controverses
théologiques ou d'exégèse biblique s'enveniment
et les opposent sérieusement. Le différend prend même
des allures de conflit familial au moment Castellion mène
querelle contre un certain Pierre Musard qui n'est autre que le
beau-frère de Calvin.
Au vrai, le contenu de ces différends est assez loin de conforter
l'opposition entre " libéraux " et " orthodoxes
calvinistes ". Deux exemples, Castellion rejetait du corpus
biblique le Cantique des Cantiques qu'il tient pour un chant profane,
mais soutient que Christ était bien allé aux enfers
après sa mort, ce que Calvin considère comme une image
ou une " fable ", selon le langage du temps!
Sur le fond, Castellion estime effectivement que l'exigence véritable
de l'Evangile ne se situe pas sur le terrain métaphysique
ou théologique, mais éthique. Pour lui, la foi chrétienne
est plus une manière d'être et de se comporter qu'une
certaine manière de croire. Une thèse d'essence libérale.
Reste que sa tolérance renferme quelques limites : il suggère
qu'on a le droit d'être chrétien, d'être mahométan
ou juif, mais pas d'être athée, car la révélation
de Dieu s'est faite dans le cœur de tout homme. De même,
pour lui, celui qui a été chrétien a connu
la vérité ne peut plus y renoncer. Nul n'a le droit
d'être relaps, de changer de religion quand il a été
chrétien. Un discours dont les relents d'intolérance
n'ont visiblement pas totalement disparus.
C'est Pierre Bayle qui à la fin du XVIIème siècle
développera un véritable discours sur la tolérance.
Et la "conscience errante". La conscience peut errer,
mais il n'y a pas de liberté sans la liberté de se
tromper.
A propos de la comparaison entre ces deux hommes, c'est Castellion
qui émet la plus juste sentence : " Non seulement Calvin
s'est livré à une véritable débauche
d'innovations […] ; en fait, il a plus innové lui-même
en dix ans que l'Eglise catholique en dix siècles "
écrit-il. Et il a parfaitement raison. Calvin en quelques
moments n'a probablement pas été à la hauteur
de ses propres intuitions ou visions prophétiques. Ainsi,
si Sébastien Castellion est bien un semeur d'idées,
justes, modernes, il n'a rien de cet immense bâtisseur qui
a abordé tous les domaines de l'existence, politiques, sociaux,
économiques, culturels et spirituels. Il n'est pas ce briseur
d'idoles, iconoclaste et indomptable qu'est Calvin. Il n'est pas
ce lutteur de la foi évangélique, cet homme suspecté
et traqué par toute l'Europe qui se bat sur tous les fronts
à la fois. Si Castellion a des intuitions géniales,
Calvin est, lui, un géant de la foi.
Jean-Luc Mouton
Celui que Dieu a " dompté "
La Réforme comme dépassement de l'humanisme
Calvin parlait peu de lui-même.
Il ne se répandait pas en confessions concernant ses élans
les plus intimes. Néanmoins, dans la préface de son
Commentaire sur les Psaumes, il concède à révéler
les circonstances de ce qu'il faut bien appeler sa " conversion
". Il précise : " Dieu dompta et rongea à
docilité mon cœur ". Point de doute, Calvin reconnaît
bien là un tournant dans son existence. Une rupture avec
une forme de pensée adoptée jusqu'à présent.
Lui, dont le premier ouvrage paru est un commentaire du De Clementia
de Sénèque, en vient à reconsidérer
son adhésion aux idées humanistes alors florissantes
en ce 16ème siècle.
La Renaissance opère un retour aux valeurs antiques en se
ressourçant aux textes latins, grecs et hébreux. Cette
modernité se détourne de l'insistance sur la souveraineté
de Dieu qui avait caractérisé le Moyen Age pour se
centrer sur l'homme et sa grandeur. Cela se traduit théologiquement
par une identification de Jésus à la recherche d'un
noble moralisme.
Les humanistes cultivent un spiritualisme lié à des
valeurs profanes. Pour eux, il y a nécessité d'opérer
une réforme institutionnelle de l'Eglise afin de la rendre
plus conforme à l'esprit du moment.
Quant à Calvin, il demeure fidèle à la modernité
intellectuelle représentée par l'humanisme tout en
s'accordant la liberté de la subvertir dans ses fondements.
Par sa culture, il conserve la méthode tout en se démarquant
de l'exaltation de la nature humaine. On a pu dire que Calvin s'est
servi de l'humanisme pour combattre l'humanisme. Et, en effet, dans
Le Traité des scandales, il en vient à critiquer certains
Pères de l'Eglise d'avoir voulu " complaire aux sages
du monde ", ou, pour le moins, se gardant de leur déplaire,
" ils ont mêlé la terre avec le ciel ".
De par sa formation de juriste, Calvin a acquis un esprit clair.
Il classe et range les idées en se méfiant de toute
confusion préjudiciable à toute saine compréhension.
Le Réformateur se méfie de ce qui pourrait faire croire
à une identification entre le christianisme et les idées
païennes antérieures. De même, la christianisation
des Anciens lui semble tout aussi inacceptable. Calvin pourchasse
toute idée de liaison entre des idées qu'il juge de
plus en plus irréconciliables. Il pourchasse toute confusion
entre la terre et le ciel, l'annonce de l'Evangile et le recentrage
sur les capacités humaines.
Calvin opère un retournement à l'intérieur
de cette modernité dont il a été un des plus
fidèles propagateurs. Et c'est en connaissance de cause qu'il
en estime les limites et les prétentions. Il entrevoit dans
l'approche luthérienne du salut par la foi une autre modernité
bien plus radicale que celle consistant à faire de l'homme
un être quasi divin. Plus radicale et plus ouverte sur un
avenir de transformation et d'espérance. Cette gloire rendue
à Dieu seul peut paraître à certains comme un
retour au Moyen Age. Il s'agit effectivement des thèmes médiévaux
mais qui, loin de demeurer statiques, permettent de rebondir plus
loin, plus haut.
Ce qui semble, pour un temps, faire cause commune avec un retour
à des thèmes dépassés, s'inscrit en
réalité dans une modernité plus audacieuse.
C'est la mise en cause des approches conformistes parées
des couleurs d'une modernité de façade.
Calvin a eu l'audace de promouvoir une réforme de l'Eglise
sans crainte de décevoir les tenants des idées nouvelles,
mais pour un temps seulement. Ou plutôt, il a remis au devant
de la scène un vieux débat, toujours à reprendre.
Pour Luther, c'était avec Erasme. Pour Calvin, il s'agit
de tout un courant prônant un retour à la sagesse antique.
Le Réformateur est plus porté à souligner les
discontinuités que les continuités avec la proclamation
évangélique. Car, pour lui, avoir la conviction d'avoir
été " dompté " par Dieu lui-même
l'oblige à reconsidérer ses convictions de lettré
humaniste pour désormais rendre compte de ce salut libérateur.
Un salut qui n'est pas en l'homme mais en Dieu révélé
en Jésus-Christ.
Rémy Hebding
Calvin et l'Histoire
Le texte proposé
par Denis Crouzet, professeur à l'Université de Paris
IV-Sorbonne, sous le titre " Calvin entre angoisse et libération
", rappelle qu'à la différence de Martin Luther,
qui n'a cessé de se raconter, Jean Calvin a adopté
une position de retenue sur ses propres sentiments et combats spirituels
(" Si je vouloye reciter les divers combats par lesquels le
Seigneur m'a exercé et par quelles epreuves il m'a examiné,
ce seroit une longue histoire " ).
Pourtant, au coeur de l'identité chrétienne qu'il
partage avec ses contemporains, s'affirme une crainte de Dieu, qu'il
dénonce comme une " mauvaise crainte " et qui fut
la sienne : " servile et contrainte ", la foi se définissait
comme une lutte inconsciente contre un Dieu terrifiant que "
menus fatras et cérémonies de nulle valeur "
tentaient sans cesse d'apaiser. Ce Dieu était terrifiant
parce que " incertain " : toute la rhétorique des
sermons calviniens est au contraire fondée sur l'image davidique
d'un Dieu " rocher " ou " forteresse ", que
le chrétien peut regarder dans sa gloire avec confiance et
émerveillement. La religion " papistique " que
dénonce Calvin dans le Sermon sur le Psaume 119 est une religion
du doute qui ne permet pas au chrétien, malgré rites
et pratiques, de savoir si Dieu l'aime pour ses œuvres ou le
condamne pour ses péchés, " car ils enseignent
le povre monde qu'il faut tousjours estre en doute et en suspend
" ; cette crainte manifeste l'illusion que l'homme peut être
" maistre de sa vie " et se fabrique des " "
dévotions à plaisir ", lui retirant tout véritable
" courage de venir à Dieu ".
L'écho rencontré par l'immense travail de prédication
de Jean Calvin s'explique par le reversement dialectique qu'il a
opéré lui-même après sa " conversio
subita " et qu'il a su faire partager à ses contemporains
: à la piété de l'inquiétude, du "
suspens ", pour reprendre une expression de Pierre Chaunu,
répond la certitude d'un Dieu d'amour venu chercher l'homme
dans sa faiblesse et ses faux-semblants.
Philippe Braunstein
Calvin entre angoisse et libération
Quelle trace a t-il laissé pour les historiens ?
Cinq siècles après
sa naissance, Calvin demeure une énigme pour les historiens,
à la différence de Luther qui n'a cessé de
se raconter et de parler de lui-même. La vie intérieure
du réformateur de Genève semble avoir été
volontairement comme protégée par un écran
disposé par lui-même. Il en résulte que c'est
avant tout en tant que théologien ayant élaboré
un système dogmatique et ecclésiologique que Calvin
est abordé, comme s'il y avait, à son propos, une
nécessité de coupure entre l'"ego" de l'auteur
de l'Institution de la religion chrétienne et son travail
d'écriture ou de parole au service de la Gloire divine. Comme
si l'œuvre de réformation ne pouvait pas s'articuler
à l'aventure d'une subjectivité. Il n'y a, en guise
d'appui d'une tentative d'explication biographique de l'inspiration
créatrice du réformateur, que les quelques pages qui
ouvrent le Commentaire sur le Livre des pseaulmes ou celles de l'Epître
à Sadolet, et aussi les deux vitae rédigées
par Nicolas Colladon et Théodore de Bèze. Mais il
y a encore cette confidence du réformateur qui invitait à
savoir que le champ biographique se trouvait restreint du fait d'une
posture volontariste de retenue: "maintenant, si je vouloye
reciter les divers combats par lesquels le Seigneur m'a exercé
depuis ce temps là, et par quelles épreuves il m'a
examiné, ce seroit une longue histoire." Une longue
histoire que Calvin n'a pas relatée, précisément.
Calvin semble comme un absent non seulement de l'histoire mais aussi
de sa propre histoire.
Pourtant, au centre du regard que l'on voit Calvin porter sur la
religion romaine, il s'avère qu'il y a une crainte qu'il
dénonce comme une mauvaise "crainte". Une crainte
qui serait au cœur de son identité de chrétien,
qui serait sa crainte.
Ce qui frappe immédiatement, à la lecture des sermons
ou libelles de Calvin, c'est que la religion romaine, par-delà
les accusations de corruption de la Vérité, d'idolâtrie,
de mensonge qui la touchent d'emblée, est loin d'être
relatée ou dépeinte comme un univers serein, lisse,
confortant. Le chrétien qui vit dans les superstitions papistes
est aux yeux de Calvin un chrétien angoissé, en recherche
permanente d'une sécurité qu'il ne peut pas trouver
ou qui se défait de lui dès qu'il s'imagine l'avoir
rencontrée. Et ce sont peut-être les bribes d'une mémoire
autobiographique qui surgissent au fil de la rhétorique calvinienne.
La foi romaine que le réformateur dénonce depuis Genève,
est dite fondée avant tout sur la crainte et le doute, ou
plutôt sur ce qu'il nomme lui-même une " mauvaise
crainte ".
Premier point, cette crainte est négative et abominable parce
qu'elle est une perversion, un faux amour qui est une haine cachée
de Dieu.
Dès L'Institution de la religion chrétienne, Calvin
s'attarde ainsi à décrire comment la connaissance
de Dieu demeure corrompue par la "sottise" ou la "malice"
des hommes. Il distingue deux perversions capitales. Il y a tout
d'abord ceux qui, pour éviter de se savoir sous le regard
de Dieu, pour éviter d'éprouver la crainte et pour
vivre dans une sécurité de la vie d'ici-bas, ont la
tentation de distinguer un Dieu oisif au Ciel, désintéressé
du sort des hommes. Calvin discerne dans cette attitude un système
de défense, illusoire bien sûr à ses yeux, contre
l'imaginaire de la mort, puisque le péché, ajoute-t-il,
dans ces conditions d'un détachement de Dieu par rapport
aux hommes, reste impuni et qu'il suffit que l'homme se pardonne
ses fautes pour que celles-ci soient oubliées.
Mais il affirme primordialement qu'il y a ensuite ceux qui, à
l'opposé, font Dieu sur-présent dans le monde. C'est
la seconde perversion et c'est celle à propos de laquelle
la mauvaise crainte intervient. Il s'agit d'hommes tout aussi impies
que les précédents, mais sur un mode différent.
Ils n'ont pas en eux la crainte volontaire de Dieu qu'immédiatement
Calvin dit être la " bonne crainte ", ils sont traversés
et perpétuellement effrayés par une crainte que Calvin
qualifie de "servile et contrainte". Leur foi n'est pas
spontanée, elle est une foi contrainte par leur peur, qui
est, selon des gradations variables de conscience, la peur de la
justice divine. Leur Dieu les terrifie dans sa justice, et, en réalité,
ils ne vont vers lui que malgré eux, comme "trainez"
par leur peur. Ce n'est pas un amour spirituel qui règle
le cheminement de leurs consciences et qui leur fait multiplier
les intercessions, les pèlerinages, les offrandes, les prières,
mais une passion qui fait que le croyant pense plus, dans ses exercices
récurrents de piété, à lui-même
qu'à Dieu. Il se fait centre dans son obsession de sauver
son âme. Il s'aime lui-même. Il pense avant tout à
échapper à la figure terrorisante de Dieu qu'il s'est
façonnée ou qui lui a été imposée,
il ne pense pas vraiment à aimer Dieu.
Il est fondamental de voir que le décryptage que donne
Calvin de la foi de l'Eglise romaine le conduit à procéder
à une inversion du sens de la piété que les
papistes s'imaginent vivre. Ce qui leur semble de la piété
et de l'amour de Dieu repose sur la crainte, mais cette crainte
est impure au sens où elle cache, dans ses tréfonds,
obscurément ce qui est une haine de Dieu puisqu'elle soupçonne
sans cesse Dieu de ne pas être pleinement un Dieu d'amour.
Il est impossible d'aimer véritablement en ayant en soi la
peur à tout instant. La mauvaise crainte est une peur, une
passion qui s'ignore.
Ces hommes qui cultivent la mauvaise crainte détestent donc
secrètement Dieu, et leur vie sous le règne de la
tyrannie papale n'est, pour le réformateur de Genève,
qu'une longue et absurde bataille engagée inconsciemment
contre Dieu, un Dieu qui leur apparaît avant tout assis sur
son "siège judicial" afin de "punir les transgressions".
Cette lutte inconsciente contre Dieu se traduit par l'usage des
pratiques superstitieuses, l'adoration des "pollutions"
que sont les idoles, les "menus fatras et cérémonies
de nulle valeur", l'ordre extérieur de l'"apparence"
d'une religion qui n'est pas une religion du cœur. Une crainte
panique monte sans cesse dans l'esprit de ces hommes, une crainte
qui leur suggère toujours et toujours plus encore de chercher
à apaiser Dieu par des mérites qui se relativisent
au fur et à mesure qu'ils s'accumulent.
A la source des gestes de piété de l'Eglise romaine,
il y a une peur qui s'ignore mais qui se nourrit elle-même.
Il y a donc pour Calvin deux ordres dans la foi romaine: l'ordre
de l'apparence qui fait aller les papistes vers Dieu et leur en
donne l'illusion, l'ordre de la vérité qui fait qu'ils
ont tellement peur de la justice de Dieu qu'ils sont incapables
d'aimer Dieu, qu'ils haïssent Dieu en doutant de lui.
Le croisement avec les fragments autobiographiques livrés
par Calvin s'impose ici. Ce n'est pas un hasard si, à l'occasion
du court récit dans lequel il retrace son séjour parisien
au temps de ses études au collège de Montaigu, Calvin
rapporte que sa vie ne pouvait pas se maintenir sur une unique ligne
droite. En 1539, il écrit qu'il ne vivait pas alors en "tranquillité
de conscience". Certes, la clémence de Dieu lui était
prêchée, clémence envers les hommes se rendant
dignes de la recevoir par leurs œuvres et par la confession.
Certes, il était rempli de l'espérance d'une rémission
possible du péché. Mais il ressentait comme une fracture
entre ce qui lui était enseigné et la manière
dont il vivait cet enseignement.
Il ajoute, toujours en 1539, que Dieu lui apparaissait, dans ces
années de jadis, comme un juge de rigueur, au regard "épouvantable",
qui pouvait être, bien sûr, apaisé par l'intercession
du Christ, de la Vierge ou des saints, mais dont la justice avait
sur lui un effet angoissant, immensément angoissant parce
qu'elle lui demeurait indéterminée, fluctuante. Il
y eut une crainte calvinienne avant le temps de la conversion et
avant le temps des sermons genevois, que Calvin projette sans doute
dans la représentation des papistes qu'il donne dans ses
écrits et dans ses sermons. Avant l'événement
de la conversion, Calvin dit se souvenir avoir été
comme pris au piège d'un doute le plongeant dans l'effroi:
"Car toutes fois et quantes que je descendais en moi ou que
j'élevais le cœur à Toi, une si extrême
horreur me surprenait qu'il n'était ni purifications ni satisfactions
qui m'en pussent aucunement guérir. Et tant plus que je me
considérais de près, de tant plus aigres aiguillons
étaient ma conscience pressée, tellement qu'il ne
me demeurait autre soulas ni confors sinon de me tromper moi-même
en m'oubliant." À l'opposé de cette évanescence
de toute manifestation de foi, à l'opposé de ce Dieu
terrorisant parce qu'incertain, toute la rhétorique des sermons
calviniens sera fondée sur l'image davidique d'un Dieu "rocher"
ou forteresse, insensible précisément à tout
balancement, un Dieu que le chrétien peut regarder intérieurement,
sans peur, dans sa gloire. Un Dieu antinomique du Dieu papiste,
vers lequel le chrétien ne va que dans la haine qu'il se
dissimule à lui-même sous le voile de la crainte qui
le traverse et qu'il ne parvient jamais à surmonter ou épuiser.
Deuxième point: Une seconde image, après celle de
cette haine inconsciemment ressentie à l'égard Dieu,
surgit: celle d'une dérive. Tout, dans ce système
de la mauvaise crainte, gravite autour de l'illusion qu'entretiennent
les bonnes œuvres, autour du parcours sans terme qu'elles conditionnent.
Dans le vingt-quatrième sermon sur la Seconde épître
de Timothée, Calvin revient longuement sur les "corruptions"
forgées par l'esprit humain; il s'agit du jeûne à
la veille de certaines fêtes, de l'observance du Carême,
les prières aux saints et saintes, des parcours obligés
qui mènent d'autels en autels et de chapelles en chapelles,
de l'assistance aux offices, des fondations de messes, des pèlerinages…
Toutes ces œuvres sont des œuvres, observe-t-il, qui ne
profitent pas à l'homme, un "badinage" qui est
comparé à un voyage qui ne peut pas trouver son terme
parce qu'il repose sur une accumulation infinie.
Calvin décrit encore, dans le neuvième sermon sur
l'Epître à Tite, la piété comptable encouragée
par les traditions de l'Église romaine, dans une dénonciation
qui, sans doute, rapporte les données d'un regard de jadis
sur soi. Il y a, Calvin l'affirme, une contradiction essentielle
qui éclate dans le système des cérémonies
de la "papisterie". L'homme peut payer pour ses péchés,
il peut pécher tout en compensant son péché
par des œuvres; il peut même s'imaginer, facticement
et temporairement, être parvenu jusqu'à une situation
d'équilibre. Les œuvres des papistes sont censées
s'accumuler comme si Dieu s'achetait, comme si le péché
pouvait être évalué selon un principe d'économie
marchande, voire usuraire: "Quand ils font plus que Dieu ne
leur a commandé, il leur semble qu'ils s'acquittent envers
luy, et qu'ils le contentent d'un tel payement: il font leur conte
là dessus, quand ils auront jeusné leurs vigiles,
qu'ils n'auront point mangé chair en vendredi, qu'ils auront
ouy la messe dévotement, qu'ils auront prins de l'eau bénite,
il leur semble, di-je, que Dieu ne leur doit plus rien demander,
qu'il n'y a plus rien à redire en eux."
Mais surtout c'est une histoire sans fin qui est distinguée
par Calvin dans les tentatives papistes pour plaire par effet d'accumulation
comptable à Dieu non pas véritablement par amour,
mais par peur et par haine. Le papiste, écrira-t-il, écoute
une messe, mais celle-ci ne suffit pas à son désir
de se concilier Dieu, prima causa omnium, il doit assister à
une autre, puis à une autre et ainsi de suite. Jamais une
unique cérémonie ne lui suffit pour le rassurer sur
sa capacité d'atteindre Dieu. La dévotion à
un saint implique la dévotion à un autre saint, un
pèlerinage en nécessite un autre, une offrande en
exige une autre, et ainsi à l'infini. Se précise la
mémoire d'une fuite en avant, d'une dérive qui place
les papistes dans une situation de toujours réitérer
leurs gestes rituels: "Brief, on n'y trouvera ne fin ne mesure,
comme c'est un abysme […] Il est certain qu'ils entrent en
un labyrinthe si confus, qu'il surmonte tous les abysmes du monde."
Prières, confessions, aspersions, ambulations, "c'est
tousjours à recommencer", sans fin. L'amour divin se
révèle incernable et indiscernable, et, même
si elle n'est pas totalement consciente, la crainte est là,
immense, sans fin, elle fait dériver l'homme sans cesse,
sans point fixe.
Surtout, l'image à laquelle Calvin recourt est significativement
l'image d'un univers mouvant: "Il n'y a ne fond ne rive en
tant de loix et statuts que le diable a là forgez."
C'est à nouveau comme une transcription du drame que, sous
l'effet de la mauvaise crainte, il dut peut-être vivre lui-même
et qu'il voulut dénoncer à ses contemporains encore
plongés dans les ténèbres de l'ignorance _
ne jamais parvenir à savoir si Dieu recevait avec plaisir
ses œuvres, vivre dans la crainte de ce que les œuvres
accomplies précisément par crainte de la justice de
Dieu ne satisfassent pas Dieu; le drame d'un effritement de toute
tentative pour faire à Dieu les preuves de sa fidélité,
le drame de la mauvaise crainte, crainte égocentrique. Le
drame d'un imaginaire flottant… D'où une image de Dieu
que l'on peut deviner très incertainement miséricordieuse
parce que portant le chrétien à aller toujours plus
loin dans les œuvres, à rajouter œuvre à
œuvre, sans fin. L'image d'un Dieu toujours en balancement,
allant de la justice à la miséricorde, de la miséricorde
à la justice, balançant diachroniquement entre amour
et haine.
Il est possible de supposer que cette représentation se construisit
dans le cadre d'une mémoire personnelle. La découverte
de la mauvaise crainte fut d'abord une découverte individuelle,
une invention prenant sens dans la conversion, avant d'être
ce par quoi Calvin s'efforça de persuader ses contemporains
que leur fidélité à Rome était une infidélité
à Dieu, qu'elle les entraînait inconsciemment à
haïr Dieu en ne lui témoignant pas la totale confiance
qu'il exige. La parole calvinienne visa, dans cette articulation
virtuelle de l'expérience passée du réformateur
à sa parole de prophète de Dieu, à faire s'opérer
une prise de conscience en révélant aux papistes ce
qu'est leur foi. Le grand instrument dont usa Calvin pour stigmatiser
la religion romaine comme une religion de la mauvaise crainte, fut
peut-être sa propre expérience, la mémoire de
ses doutes et de ses angoisses. Le calvinisme fut une biographie
personnelle occultée par un discours instituant, enseignant
la volonté de Dieu, mais une biographie ayant valeur universelle.
Une des formes de diffusion de la réforme calvinienne, en
conséquence, fut la vie cachée de Calvin, vie cachée
dans des paroles et des écrits qui sont, même si cela
n'apparaît pas, des fragments autobiographiques. Et, dans
cette vie, il y a le souvenir d'une crainte face à l'errance
constante de Dieu, insaisissable, qui fait que l'homme lui-même
est dans l'errance. Et toujours, vient et revient le motif de la
haine que le papiste porte sans le savoir à Dieu. Il y eut
une crainte calvinienne avant le temps de la conversion et avant
le temps des sermons genevois, une "mauvaise crainte"
que Calvin n'eut ensuite de fin que de projeter dans la représentation
des papistes qu'il donna dans ses écrits et dans ses sermons.
Une crainte qui était toujours réminiscente en lui
et dont il voulait faire prendre conscience à ses contemporains
pour les révéler à eux-mêmes et les faire
parvenir à la Vérité.
La troisième image corrélative de la mauvaise crainte
intervient en continuité de l'image de la dérive:
il s'agit de celle du doute: les papistes, tout en prononçant
leurs oraisons, "disent qu'ils ne doivent iamais estre asseurez".
La promesse, à leur yeux, n'est alors jamais certaine. Aux
yeux de Calvin, le papiste ne peut pas avoir confiance en Dieu dans
la mesure où il ne sait pas si Dieu écoute les paroles
"de vent" dans lesquelles il se complaît, qui sont
évoquées par Job et que Calvin interprètera
comme des paroles de "nulle fermeté, c'est-à-dire,
qui ne peuvent édifier un homme". Etre dans le mal de
la mauvaise crainte, c'est ne pas appliquer tous les "sens"
et les "esprits" à la parole de Dieu et, alors,
"sens" et "esprits" "voltigent cependant
d'un costé et d'autre, et la parole de Dieu s'en va comme
en vent". La religion "papistique" est, dans le cours
du dix-neuvième sermon sur le Psaume 119, à dénoncer
comme une religion du "doute", dans laquelle le chrétien
ne sait jamais le "profit" attaché à ses
prières, demeure toujours perplexe sur lui-même et
par voie de conséquence sur un Dieu dont il ne parvient pas
à savoir s'il l'aime pour ses œuvres ou le hait pour
ses péchés: "Pour cela nous voyons qu'en toute
la Papauté, on ne sauroit deuëment prier Dieu: ie di,
suivant la doctrine qui est là tenue. Et pourquoy? Car ils
enseignent le povre monde qu'il faut tousiours estre en doute, et
en suspend."
Il y a crainte et crainte, affirme encore Calvin en commentant le
Psaume 119: la crainte "libérale" de ceux qui sont
régis par l'Esprit de Dieu, et la mauvaise crainte, celle
des infidèles à Dieu, nourris de la peur de Dieu au
point d'être "esperdus et tellement abattus" qu'ils
n'ont pas le courage de chercher à "approcher"
réellement de Dieu parce qu'ils doutent de lui. Il leur paraît,
toujours, que Dieu est en instance de leur tourner le dos, de les
abandonner et ils essaient de faire pression sur Dieu.
Cette mauvaise crainte est un "enfer" de la conscience:
une crainte annihilante, destructrice, déterminant une absence
de véritable "courage de venir à Dieu".
Elle connaît d'ailleurs son instant de paroxysme lorsque l'homme
voit la mort approcher: instant critique parce qu'il pourrait y
avoir chez le croyant la peur envahissante et submergeante d'être
pour toujours séparé de Dieu, de perdre Dieu pour
l'éternité, Calvin affirme que l'angoisse doit se
défaire aussi vite qu'elle est venue, quand le mourant se
souvient de la "bonne volonté" de Dieu à
son égard et ne ressent aucun doute sur la grâce divine.
Chez les papistes, selon ce qu'il écrira, le doute ne peut
que demeurer en devenant angoisse, il ne peut pas y avoir de belle
mort sereine, malgré ce que certains avancent illusoirement:
"il est vray qu'on barbottera beaucoup, qu'on dira des Patres,
et meslera-on des Ave Maria parmy, et mesme on adressera bien son
Pater au marmoset de sainct Aguathe, ou de quelque autre sainct,
comme à Dieu." Mais en vain, car l'angoisse demeure.
Rien ne peut la réduire, parce que le mourant pense avant
tout à lui-même, s'aime lui-même alors qu'il
ne devrait aimer, avec la foi la plus grande, que Dieu.
Etre papiste, le réformateur ne cessera de le dire et de
le redire, c'est être hors de la constance, cheminer dans
le "doute" perpétuel qu'engendre une sorte de ruse
face au fantasme du regard de Dieu, une manière de se cacher
ce regard, et qui conduit les hommes à se fabriquer "leurs
devotions à plaisir" pour mieux tenter d'attiédir
ou de forcer une justice divine dont ils doutent. Et, à l'origine
de ce soupçon, il y a l'illusion que l'homme peut "estre
maistre de sa vie", en être le "conducteur",
l'illusion qu'il peut se commander à lui-même ce qui
est juste et ce qui est injuste, suivant ainsi "son semblant,
son cuider"; l'illusion qui fait qu'en s'imaginant aller vers
Dieu, il hait Dieu puisqu'il se met à la place de Dieu, il
pense qu'il peut plier Dieu à sa volonté. Et ici,
le quatorzième sermon sur le Psaume 129 semble recéler
de précieuses notations, lorsque Calvin s'attarde sur les
"pauvres incrédules qui pensent plaire à Dieu
en aimant et honorant Dieu "par contrainte […] comme forcez
et contraints", et qui ne retirent que du tourment de cette
relation dont ils ne peuvent jamais savoir si elle atteint vraiment
sa cible. Une relation qui désigne le salut personnel comme
but même de la piété et donc repose sur le concept
d'intéressement astreignant l'homme à se finaliser
égoïstement et orgueilleusement comme centre de lui-même,
alors qu'il est né pour Dieu et que seul Dieu détient
la puissance de sauver.
Et Job, comme David, est un miroir de la possibilité du dépassement
de l'être qui ne trouve de fermeté ou de stabilité
nulle part, qui ne vit que dans la mauvaise crainte, ne rencontrant
aucune assurance de ce que ses prières rencontrent l'écoute
divine. Il est l'homme qui s'est détourné de l'angoisse
de l'amour ou du désamour de Dieu, l'homme qui a ignoré
tout doute: même lorsque des afflictions et des malheurs,
des peines et des souffrances lui étaient envoyés,
Dieu demeurait pour lui un Dieu de consolation, de repos et non
pas d'effroi. Sont de faux prophètes, Calvin le dit et le
redit, tous ceux qui "foudroyent et tempestent" lorsqu'ils
parlent des desseins de Dieu et des péchés des hommes,
mettant "le pied sur la gorge aux gens craignans Dieu".
Le réformateur de Genève s'élève encore
contre les prédicateurs du présent français
aussi, qui, à l'opposé de Job et comme François
Le Picart, usent d'une "gravité inhumaine", d'une
"haultesse inhumaine pour abbatre les povres gens et les effrayer".
C'est, affirme Calvin, mépriser Dieu que de ne voir en lui
que violence et dureté, que d'enseigner qu'"en priant
il faut tousiours estre en perplexité et en doute".
Plusieurs hypothèses peuvent ici être suggérées.
Le doute et l'angoisse, sous l'appellation de "mauvaise crainte",
sont au cœur de la représentation que Calvin façonne
et projette de la piété de l'Eglise romaine, au cœur
de la figuration qu'un chrétien réformé doit
avoir de la religion papiste. Ils sont ce que tout fidèle
doit dénoncer et révéler à ceux qui
sont encore dans les ténèbres de l'ignorance de la
Vérité évangélique, afin de les attirer
vers l'amour d'un Dieu qui ne balance pas diachroniquement entre
haine et amour, entre justice et miséricorde, mais dont la
justice est synchroniquement miséricorde et la miséricorde
est justice. La parole réformée est une parole qui
cherche à aller au-delà de la surface des mots et
des rituels, au delà des opinions reçues. Elle propose,
avant tout, un autre système de sens, ou plutôt une
inversion du sens. Elle enseigne à rejeter, selon une méthode
empruntée peut-être à la dialectique platonicienne,
un ordre de l'apparence et de l'illusion qui est l'ordre de la surface
des choses: l'homme qui s'imagine aimer Dieu en multipliant les
œuvres par crainte de la justice divine est un homme qui n'aime
pas Dieu, qui s'aime avant tout lui-même et qui se cache une
haine à l'égard de Dieu. Il ne voit en Dieu qu'un
juge effrayant. La didactique calvinienne veut porter l'homme, et
c'est là que réside la clef de la conversion, à
saisir que c'est dans la haine de lui-même qu'il peut, une
fois désengagé de la haine qu'il porte inconsciemment
à Dieu, rencontrer une sérénité aussi
positive que toujours néanmoins relative. Elle est donc une
autre manière de penser, une manière de penser les
données immédiates de la conscience comme les données
d'une illusion.
Mais l'expérience de la mauvaise crainte racontée
par Calvin possède aussi, sur le plan historique, une autre
implication. Elle permet de mieux comprendre les traverses empruntées
par les hommes qui firent le choix de rompre avec Rome. Calvin certifie
que la foi traditionnelle dissimulait ou portait en elle une puissance
anxiogène, puisqu'il décrypte, par ce qui projette
son propre et probable parcours biographique, l'angoisse comme ce
qui fait de cette foi une illusion, une "singerie". Malgré
tous les instruments qu'elle proposait aux chrétiens pour
les sécuriser dans leur quête du salut, elle avait
la capacité de se retourner ou de se convertir en une angoisse
eschatologique. C'est là où toutefois une certaine
complexité problématique surgit.
Certes, il y avait dans la religion "flamboyante" une
béance dans laquelle la parole calvinienne s'engouffre lorsqu'elle
décrypte que la crainte papiste de Dieu est une mauvaise
crainte. Cela peut laisser entendre que la religion romaine a pu
être vécue tragiquement, avec une intensité
d'angoisse plus ou moins forte selon les personnes croyantes, de
manière plus ou moins consciente, par les chrétiens
du début du XVIe siècle à tous les moments
de leur vie terrestre. Cela peut aussi signifier que Calvin, en
fonction de son propre parcours de conversion, se donna le rôle
d'accoucheur de la conscience individuelle ou collective de cette
angoisse qui serait demeurée latente. A partir de là,
on voit que c'est un faux problème que de nier qu'il y ait
une aptitude de la religion romaine, à la fin du XVe siècle
et au début du XVIe siècle, à emmener les chrétiens
vers une angoisse. Même si cette angoisse n'était pas
lisible sur la surface des imaginaires, même si elle ne se
laissait pas percevoir dans l'immédiateté des représentations
ou discours, elle était là, souterraine peut-être,
mais prête à se déverser dans le système
de résolution vécu puis élaboré par
Calvin.
Comprendre la résonance ou l'écho formidable que Calvin rencontra à partir de 1536, ce serait comprendre qu'eut lieu, par l'immense travail de discours du réformateur de Genève, comme un transfert introspectif, au cœur duquel un jeu de désangoissement fut matriciel. Le Calvin anxieux et dubitatif d'avant la prise de conscience d'un apostolat évangélique, d'avant la " conversio subita ", était, dans ses angoisses, comme un reflet des tensions de la piété romaine. Se laisse deviner, en parallèle des indices de sa désorientation singulière, un imaginaire au sein duquel se troublaient et se brouillaient, parallèlement, les frontières de l'humain et du divin, les limites entre l'amour et le désamour. Était venu le temps où, malgré une extraordinaire machinerie permettant aux chrétiens de se préparer au face-à-face eschatologique, malgré de multiples instruments de sécurisation relevant d'une " comptabilité de l'Au-delà ", il devenait de plus en plus difficile aux hommes de foi de savoir comment aimer vraiment Dieu et comment être aussi aimés de Dieu, de pressentir si Dieu les aimait ou ne les aimait pas, de deviner si Dieu demeurait proche d'eux ou s'éloignait d'eux, les écoutait ou était sourd à leurs prières, recevait leurs œuvres méritoires avec un regard de compassion ou d'insatisfaction. Une piété du "suspens" pour reprendre une expression de Pierre Chaunu, un âge du tragique, plus ou moins avivé et latent selon les individus, face à l'événement imminent du Jugement dernier.
Denis Crouzet
Bibliographie
Jean Calvin, Olivier Abel, Pygmalion, 298p. , 21,90 €
La pensée du réformateur ne cesse de nous interpeller
encore aujourd'hui.
Jean Calvin et la modernité de Dieu, Jérôme
Cottin, Ed. du Signe, 64 p. , 3 €
Une petite biographie de poche sous forme de mémento illustré.
Pour se souvenir des grandes étapes de la vie du Réformateur.
Pour comprendre la pensée de Jean Calvin, Rémy
Hebding, Olivétan, 134p. , 12,50 €
Les grandes lignes d'une pensée décapante, iconoclaste,
toujours actuelle. Une introduction claire à la théologie
du Réformateur.
Calvin, Olivier Millet, Infolio, 200p. , 10 €
Plus qu'un livre d'histoire, la description du contexte politico-religieux
propre à la Genève du temps de Calvin. Et la conception
nouvelle du rapport de l'homme et de Dieu.
Calvin, Jean-Luc Mouton, Folio Gallimard, 395 p. , 7,60 €
Calvin mérite beaucoup plus que la réputation de rigueur
qui lui est faite. C'est un prophète jeté dans le
monde moderne, chargé de ramener ses contemporains à
la pureté de l'Evangile.
Le protestantisme et Calvin, Que faire d'un aïeul si
encombrant ? Bernard Reymond, Labor et Fides, 134p. , 11 €
Un pamphlet pour montrer les hésitations à intégrer
Calvin dans la patrimoine libéral.
Jean Calvin, le réformateur de Genève, Giorgio
Tourn, Olivétan, 127p. , 12,50 €
Les grands moments du parcours de Calvin dans une Europe
saisie par les idées réformatrices.
Ces livres sont disponibles au Comptoir Librairie de la paroisse chaque dimanche avant et après le culte. Vous pouvez aussi commander les livres qui vous intéresseraient.