Dossier du mois
Église et Homosexualité : la réflexion du Conseil presbytéral

Lors du Synode national de l’Église reformée de France (ERF) à Soissons, du 24 au 27 mai 2001, sur les « Sacrements » (« Soissons, une Église à l’écoute et porteuse d’Évangile », Information-Evangélisation, juillet 2001) deux décisions concernant les personnes homosexuelles et leur place dans l’Église étaient adoptées.

La décision numéro 36 concernant les ministres du culte demandait « au nouveau Conseil national, à l’issue de ce Synode, de ne pas différer la demande qui lui est adressée d’accepter que la question homosexuelle soit travaillée par les différents synodes pour que les pasteurs et paroisses puissent s’appuyer sur une réflexion et des décisions communautaires sur la question du ministère des personnes dans l’Église et en particulier du ministère pastoral ». Ce vœu fut adopté par 60 voix pour et 5 voix contre. La décision numéro 37 sur les couples homosexuels demandait au « Conseil national [..], à l’issue de ce Synode, de ne pas différer la demande qui lui est adressée d’accepter que la question de l’homosexualité soit travaillée par les différents synodes pour que les pasteurs des paroisses puissent s’appuyer sur une réflexion et des décisions communautaires sur notre réponse aux demandes de bénédiction de couples homosexuels, PACsés ou non ». Ce vœu fut voté par 51 voix pour et 11 contre.

À l’issue du Synode, le Conseil permanent luthéro-réformé (ECAAL, EELF, ERAL, ERF) a mandaté un groupe de travail composé de 4 pasteurs Gérard Krieger, Bernard Sturny, Mayanga Pangu, Michel Cordier, d’un théologien Jean-Daniel Causse, d’un psychiatre Raymond Heintz, d’un médecin Nadine Davous pour rédiger un document de travail « Église et Homosexualité ». Ce texte fut finalisé en juillet 2002 par les pasteurs Michel Cordier et Gérard Krieger.

Ce document de 56 pages, devait suivre alors le calendrier suivant :

• octobre 2002, diffusion et mise à l’étude du document de base,
• juin 2003 retour des réflexions, réactions et observations.

Une synthèse sera alors élaborée par un groupe ad hoc. De même une concertation avec les directions des Églises et le CPLR aura lieu, enfin en janvier 2004, l’avis de chaque Église sera sollicité sur les suites à donner.

Le dossier « Église et Homosexualité » est composé de quatre parties :

1. Une Introduction et contexte socio-historique,
2. Des remarques préliminaires,
3. Trois angles d’approche pour traiter la question, selon trois points de vue : biblique, psychanalytique, psychosociologique,
4. Il découle de ses analyses trois orientations qui sont suggérées aux Églises, premièrement l’accueil inconditionnel des personnes homosexuelles, deuxièmement des réserves à l’égard d’un culte public de bénédiction de couples homosexuels, troisièmement les pasteurs homosexuels et leur ministère dans l’Église.

Le dossier est complété  par une riche bibliographie et une série d’annexes :
Annexe 1 : « Pour aller plus loin dans l’approche biblique » (dans l’Ancien et le Nouveau Testament). Sont ici rappelés : Pour l’Ancien Testament : Genèse 19, 1-11, Juges 19, Deutéronome 23, 185, Lévitique 18, 22 et 20, 13, Samuel I, 16-20, Samuel II, 1, [Sagesse 14, 26] ; Pour le Nouveau Testament Corinthiens I, 6, 9, Timothée 1, 10, Romains 1, 26. Un extrait des « Réflexions suite à la décision 29 du Synode national de Fréjus-Saint-Raphaël du 13-16 mai 1999 » de la Commission « Couple-Famille-Société » de l’ERF, point 1-3 ; Un extrait de « L’Église et les homosexuels » de A. Nouis ; Un extrait de la partie « Bible et homosexualité » texte adopté par le Conseil et rédigé par la Commission d’éthique de la Fédération Protestante de France en juin 1997 ; Un extrait de « Le jugement sur l’homosexualité dans le Nouveau Testament » de E. Cuvillier , Colloque IRE, 1999.

Annexe 2 : « Pour aller plus loin dans l’approche psychanalytique ». Avec un extrait d’un texte de J. Ansaldi « L’apport analytique & Conclusion de “Entre l’interdit et la complicité : la place de l’homosexualité dans l’éthique chrétienne” », ETR, 1987 ; Un nouvel extrait de l’ouvrage d’Antoine Nouis.

Annexe 3 : « Pour aller plus loin dans l’approche psychosociale », avec un extrait de « La différence interdite » de T. Anatrella et un extrait de « La célébration religieuse du mariage étendue au PACS ou au concubinage ? » de M. Johner.

Annexe 4 : « Pour aller plus loin dans ce qui en découle ». De nouveau Antoine Nouis, les points 2 et 3 de la Commission « Couple-Famille-Société ».

Sous la présidence de Mlle Isabelle Veillet, le document « Église et Homosexualité » fut diffusé à l’ensemble du Conseil et si le débat fut reporté plusieurs fois c’était pour laisser aux conseillers le temps de la réflexion.

Notre Conseil a travaillé cette question conformément à la Discipline de l’Église réformée de France qui le lui demandait. Il va sans dire qu’un tel débat peut susciter des réactions diverses (rejet ou approbation a priori, ou véritable malaise) et que notre compréhension mutuelle dépend de l’écoute approfondie de chacun.

Lors du Conseil du 2 juin 2003 le dossier occupa largement nos travaux. A la demande du président Eric Michel et du pasteur Florence Taubmann, il fut demandé au pasteur Werner Burki de bien vouloir être le modérateur lors de ce long débat et d’aider le Conseil dans sa réflexion spirituelle et sociologique.

Chaque conseiller a pu s’exprimer longuement et au moment ou il l’a jugé opportun, faisant partager à tous ses doutes, ses espérances, ses questionnements et ses recommandations Ce fut un débat de très haute tenue spirituelle et morale guidé par la sensibilité et l’écoute de notre modérateur.

Ce dernier a longuement insisté lors de la présentation du dossier et durant nos échanges sur le fait que nous devions répondre à un questionnement qui nous est posé par des personnes homosexuelles elles-mêmes et par certains membres de leurs familles qui attendent de l’Église des réponses à leur recherche et parfois à leurs souffrances. Ce questionnement vient de la part de membres de nos communautés mais aussi de personnes détachées de l’Église qui sont également sensibles aux décisions que l’Église réformée de France sera amenée à prendre. N’oublions pas que les questions de société concernent aussi l’Église et peut-être particulièrement la nôtre car c’est d’elle, souvent, que la société attend des commentaires sur les réalités du monde.

À l’issue du débat, le Conseil a été amené à se prononcer sur les trois questions qui lui étaient soumises.

Dans la tradition libérale qui est celle de notre paroisse, le Conseil a réaffirmé que notre Église est ouverte à tous et que l’Église ne doit pas faire de discrimination de sexe (d’orientation sexuelle), de race, d’origine, etc... L’Église de Jésus Christ est appelée à être accueillante et ouverte et certainement pas frileuse et repliée sur elle même, et le Conseil pose comme exigence d’évaluer régulièrement son sens de l’accueil.

En ce qui concerne le ministère dans l’Église de pasteurs homosexuels, le Conseil a rappelé qu’il n’a pas pour mission de sonder les reins et les cœurs. Il n’y aurait aucun obstacle pour notre Église à appeler un ministre homosexuel à partir du moment ou sa sexualité reste dans la sphère du privé.

Pour ce qui concerne les bénédictions de couple. Le cas jusqu’à présent ne c’est pas présentés dans notre paroisse. Le Conseil a tenu à réaffirmer que cela relève de la pastorale et de l’accompagnement que nos pasteurs doivent avoir avec chacun.

Nous avons essayé de commenter, de critiquer, de faire nos observations et nos remarques sur ce document. Que chacun de vous, lisant ces lignes, se sente libre de communiquer à nos pasteurs (Florence Taubmann et Werner Burki) ses propres réactions car comme le suggère le pasteur François Claveroly « nous tâcherons de discerner et d’écouter la réflexion de chacun et comme toujours lorsque nous nous interrogeons sur l'“accueil”, nous saurons prendre le temps de la prière ».