Une conviction, une foi plus forte que le mal

Josué 24:1-15 , Matthieu 12:38-45

Culte du 8 janvier 2012
Prédication de pasteur Marc Pernot

(Josué 24:1-15 ; Matthieu 12:38-45)

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Culte du dimanche 8 janvier 2012 à l'Oratoire du Louvre
prédication du pasteur Marc Pernot

Nous aimerions que les choses progressent, dans le monde et en nous-mêmes. Mais ce n’est pas facile, ce n’est facile pour personne. Le mal nous résiste. Comment faire pour chasser de notre vie ce qui ne va pas ? Il me semble qu’on ne peut le faire qu’avec des attachements plus forts encore, plus vivants.

Il est question d’esprits mauvais et méchants dans cette parabole de Jésus, il ne s’agit pas d’une sorte de créatures invisibles et mystérieuses qui nous infecteraient ou qui infecteraient le monde. C’est une façon de parler de ce qui ne va pas, dans le monde et en en nous-mêmes, comme quelque chose de vivant qui nous résiste et qui nous fait du mal. Les esprits mauvais sont une dimension de nous-mêmes. C’est pour cela qu’ils sont difficiles à chasser, tout progrès est de l’ordre de la guérison, de la croissance voire de la résurrection.

La question n’est donc pas de faire des exorcismes pour chasser les esprits méchants. Mais la question est de progresser. Ce n’est donc pas un travail qui peut être fait d’un coup de baguette magique de l’extérieur. Même Dieu ne peut pas nous faire avancer sans notre participation. Cela demande un vrai travail au cœur de nous-mêmes, pas un geste magique d’un charlatan. Les esprits méchants sont une part de nous-mêmes, ce sont nos faiblesses et celle de notre société humaine. Elles viennent parfois de blessures anciennes, parfois c’est un travers que nous avons, un mauvais pli. Parfois c’est un manque de développement. Il n’existe pas d’autres démons que cela qui nous habitent, et ce n’est pas bon de laisser croire et encore pire de faire croire à ces fables de créatures invisibles qui nous infecteraient. Une vraie libération ne peut venir qu’avec un travail en profondeur de la personne elle-même ou avec la personne elle-même. Et pour notre société également, elle en changera pas avec une prière magique mais avec une prise de conscience des individus, avec des convictions, avec une foi plus forte que le mal.

Il est bon de regarder avec clairvoyance et bienveillance en nous-mêmes pour y reconnaître des causes de souffrances et de trouble. Si on les personnifie dans des personnages mythologiques, des diables, des démons, des esprits mauvais, des envoûtements… cela n’aide pas à la clairvoyance, cela n’aide pas à reconnaître ce qui nous empêche en réalité d’avancer, nous personnellement et l’humanité. Et puis quelle image de Dieu cela serait que d’imaginer qu’il laisse libre d’agir de telles créatures purement malfaisantes ?

Et pourtant oui, nous avons des mauvais travers que nous aimerions éliminer, des esprits qui nous animent et qui font du mal, qui sont infidèles à la vie, au bien, au bonheur.

Nous voudrions nous débarrasser de ce mal, mais comment faire ? Jésus nous met en garde : c’est dangereux de mettre la charrue avant les bœufs. Voulant bien faire, une fois que nous avons identifié le problème, nous voulons le chasser, avec un effort de bonne volonté, comme on prend une bonne résolution de nouvel an. Avec parfois un succès, nous dit Jésus, mais de courte durée en général : l’esprit mauvais s’en va mais revient peu après avec sept autres encore plus méchants que lui et notre condition est pire. Là encore, le langage de Jésus est imagé et l’on comprend bien ce qu’il veut dire quand il compare l’homme qui a chassé temporairement un mauvais démon à une maison vidée, balayée et ornée… Le nettoyage par le vide n’est pas la bonne méthode, même si le ménage est fait à fond, ne laissant pas une miette de l’ancien levain de méchanceté, allant même jusqu’à bien enjoliver notre intérieur, lui donner un aspect pimpant, joyeux, agréable. Ça ne marche pas, bien au contraire.

On ne guérit pas des mauvaises choses qui nous animent par le vide, mais par le plein. On ne peut chasser nos mauvais démons qu’avec des attachements encore plus forts et meilleurs. Alors seulement, les mauvaises choses qui nous tirent vers le bas pourront être vraiment chassées hors de nous-mêmes.

Jésus nous montre deux bons exemples, pour nous nous donner des pistes pour avancer.

Il évoque d’abord les ninivites de l’histoire de Jonas. Le thème de cette histoire est le même que dans cette parabole de Jésus, la question est de savoir comment guérir de nos mauvais penchants. Le livre de Jonas nous présente une Ninive pleine de méchanceté, de violence et d’infidélité (Jonas 1:2, 3:8), comme l’esprit mauvais dont parle Jésus ici. Et il ajoute que les Ninivites nous invitent à la conversion. La traduction est trompeuse si elle indique que cette histoire nous invite à la repentance car il s’agirait là encore d’essayer de balayer seulement nos actes mauvais, ou les esprits de méchanceté qui sont en nous. Mais dans le texte, les ninivites nous invitent à la conversion, c’est-à-dire à un changement d’orientation, un changement de notre regard, de notre visée. Cela n’est possible que si l’on a, précisément, une certaine visée dans notre existence, pas seulement de vagues principes ou une croyance en quelque chose. Ce n’est possible que si cette visée nous oriente, si elle tourne non seulement notre regard du coin de l’œil mais oriente notre tête, puis nos épaules, notre corps qui est alors comme déjà comme tendu dans cette direction que nous avons choisie. Alors oui, il peut y avoir le miracle de Jonas. Jonas était entraîné par sa propre méchanceté dans une spirale descendante vers le vide et le chaos, mais par son attachement au Dieu de bonté et de vie, il va finalement vivre et aider les autres. C’est le même miracle que vivent les ninivites ensuite. C’est ce même miracle qui nous est donné, nous dit Jésus. Et ce n’est vraiment pas rien : c’est le miracle d’être délivré de nos démons intérieurs. Progressivement, un à un, parfois peu à peu, comme on remonte du fond de l’abîme.

Le deuxième exemple que donne Jésus est celui de la reine de Sabba qui est venue des extrémités de la terre pour entendre la sagesse de Salomon. Et donc, si nous n’avons pas ou pas encore la foi de Jonas capable de prier Dieu dans les entrailles du Léviathan, si nous n’avons pas le début de foi des ninivites, nous pouvons au moins nous mettre en mouvement à la recherche de la sagesse comme la reine du midi. Cela, tout le monde peut le faire. D’autant plus qu’il ne s’agit pas de sa part d’avoir compris, ni même d’avoir accepté et intégré ce que dit Salomon. Ce que Jésus montre en exemple dans cette femme c’est le fait de chercher à entendre, ce qui est salutaire c’est de se mettre en marche, en mouvement, de sortir un peu de soi-même, s’ouvrir à une recherche d’un progrès positif : une recherche d’aide de Dieu comme avec Jonas, mais au moins une recherche de sagesse. Et dans le genre, les philosophies bibliques me semblent vraiment pas mal du tout, particulièrement la synthèse personnelle qu’en fait Jésus-Christ, mais bon, c’est effectivement question de choix et le minimum vital est d’avoir au moins une recherche personnelle de sagesse, et que cette recherche soit engagée, et même un peu militante.

Une recherche de Dieu, ou au moins une recherche de sagesse supérieure, cela soigne notre mal à la racine, en profondeur, c’est un travail sur la qualité, sur la dynamique de notre évolution. Le progrès passe par un supplément de bien, par des attachements plus forts. Ce qui est pourri en nous pourra être enlevé plus tard, ou disparaîtra tout seul.

Dans ce sens, je suis optimiste pour l’humanité en ce début d’année 2012, malgré les terribles crises, malgré les tensions, malgré la montée des intégrismes. J’ai sincèrement l’impression qu’il y a aujourd’hui un poil plus de profondeur qu’hier. Certes il y a une crise écologique préoccupante mais au moins nous commençons à nous en préoccuper. Certes il y a une crise économique, mais au moins nous commençons à nous rendre compte que nous ne sommes pas seuls au monde, que d’autres moins bien lotis que nous ont droit à de meilleures conditions de vie, que d’autres générations nous suivent et que ce n’est peut-être pas une bonne idée de nous goinfrer aujourd’hui en faisant payer la note aux générations futures… Il y a une prise de conscience. Je suis également optimiste car très souvent, chaque semaine, nous rencontrons des personnes qui, comme la reine de Sabba, se mettent en route de loin, de très loin, pour aller chercher dans la Bible une sagesse supérieure, ou des personnes qui, comme les ninivites, comme Jonas, portent un regard vers Dieu pour qu’il les aide face à leurs propres travers.

Nous ne sommes plus, alors, dans une intériorité vide, balayée et ornée, nous ne sommes plus dans la seule légèreté, ni dans l’insouciance, ni dans un moralisme aliénant mais dans une recherche d’une plus grande authenticité de vie.

Et ça, c’est prometteur.

Ce miracle-là nous sera donné : de voir reculer nos esprits méchants et infidèles quand nous ouvrons notre intériorité par attachement à une vraie recherche.

Déjà, Josué nous proposait : « Choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir » Personne n’est obligé de choisir de rechercher l’Éternel Dieu, nous dit-il, déjà à l’époque, on peut aussi choisir d’autres orientations, mais au moins il faut s’engager, et choisir un attachement supérieur, avoir foi en quelque chose. Et Josué ajoute que cet attachement doit être fait dans la sincérité et dans la fidélité, pas juste une petite décoration pour orner notre vide intérieur, mais un véritable attachement qui soit source d’une dynamique.

Josué ajoute cette phrase célèbre : « Moi et ma maison, nous servirons l’Éternel ». Et il explique pourquoi. C’est que ce Dieu fait des miracles. Il y a de toute façon quelque chose d’intéressant dans le fait de se choisir une foi qui nous oriente, au moins une philosophie de vie comme la reine de Sabba. Mais Josué montre qu’il y a en Dieu plus qu’une philosophie. Il est source d’une évolution qui nous dépasse infiniment. Josué dit que ce ne sont pas seulement une belle idée, ou de belles promesses mais que c’est un fait d’expérience, expérience partagée par une foule innombrable de témoins.

Mais même cette puissance qu’a l’Éternel pour nous aider ne marche que si la personne le choisit personnellement, si elle y investit non seulement son regard mais sa maison, au sens où Jésus nous comparait à une maison vide ou habitée. C’est-à-dire le cœur ne notre être qui abrite notre moi intime.

Josué nous propose donc de choisir personnellement de s’engager à la suite de l’Éternel, il montre que ce n’est pas obligatoire, qu’il y a d’autres options possibles. Il le dit parce que c’est vrai et pour que notre choix soit libre. Mais il témoigne du choix qu’il faut lui, et il dit pourquoi, que c’est pour lui un bon choix car l’Éternel est vivant, qu’il est plus qu’une bonne philosophie, il est un principe actif qui travaille en nous pour nous sonner la vie :

  • Il nous donne, dit Josué, il nous donne par grâce tant de bonnes choses :
  • d’être mis en route comme Abraham
  • et d’avoir une fécondité de vie,
  • il nous donne d’être libéré de ce qui nous enchaînait, du matérialisme qu’évoque l’Égypte dans ce contexte,
  • il nous donne un espace pour vivre un espace où nous sommes en paix,
  • il nous donne une vie, évoquée par la vigne féconde,
  • il nous donne la sagesse qu’évoque le fruit du figuier.

Bien entendu, nous ne pouvons pas lire ce Dieu qui chasse des peuples de leur terre pour la donner à un autre peuple d’une manière littérale, c’est spirituellement que nous lisons ce texte, où Dieu, effectivement, nous débarrasse de ce qui nous tuait, les égyptiens et leurs dieux, c’est une part de nous-mêmes, ainsi que les ammonites.

Alors, et alors seulement, nous pourrons faire disparaître ces dieux qui nous aliénaient, nos esprits de méchanceté et d’infidélités qui nous menaient pas le bout du nez. Les faux dieux qui viennent des mauvaises adorations des générations passées, et les faux dieux qui sont dans notre présent.

Nous le savons très bien, ni ces dons, ni ces libérations, rien de tout cela n’est facile à conquérir par la seule force de notre volonté et de notre sagesse, même la solidarité humaine peine à nous faire faire quelques progrès.

Qui nous fera avancer ? Moi et ma maison, nous servirons l’Éternel.

Amen

Lecture de la Bible

Josué 24:1-15

Josué assembla toutes les tribus d’Israël à Sichem, et il convoqua les anciens d’Israël, ses chefs, ses juges et ses officiers. Et ils se présentèrent devant Dieu.

2 Josué dit à tout le peuple: Ainsi parle l’Éternel, le Dieu d’Israël: Vos pères, Térach, père d’Abraham et père de Nachor, habitaient anciennement de l’autre côté du fleuve, et ils servaient d’autres dieux.

3 Je pris votre père Abraham de l’autre côté du fleuve, et je lui fis parcourir tout le pays de Canaan; je multipliai sa postérité, et je lui donnai Isaac,

4 Je donnai à Isaac Jacob et Esaü; je donnai en propriété à Esaü la montagne de Séir, mais Jacob et ses fils descendirent en Egypte.

5 J’envoyai Moïse et Aaron, et je frappai l’Egypte par les prodiges que j’opérai au milieu d’elle; puis je vous en fis sortir. 6 Je fis sortir vos pères de l’Egypte, et vous arrivâtes à la mer. Les Egyptiens poursuivirent vos pères jusqu’à la mer Rouge, avec des chars et des cavaliers. 7 Vos pères crièrent à l’Éternel. Et l’Éternel mit des ténèbres entre vous et les Egyptiens, il ramena sur eux la mer, et elle les couvrit. Vos yeux ont vu ce que j’ai fait aux Egyptiens. Et vous restâtes longtemps dans le désert.

8 Je vous conduisis dans le pays des Amoréens, qui habitaient de l’autre côté du Jourdain, et ils combattirent contre vous. Je les livrai entre vos mains; vous prîtes possession de leur pays, et je les détruisis devant vous.

9 Balak, fils de Tsippor, roi de Moab, se leva et combattit Israël. Il fit appeler Balaam, fils de Beor, pour qu’il vous maudisse. 10 Mais je ne voulus pas écouter Balaam; il vous bénit, et je vous délivrai de la main de Balak.

11 Vous passâtes le Jourdain, et vous arrivâtes à Jéricho. Les habitants de Jéricho combattirent contre vous, les Amoréens, les Phéréziens, les Cananéens, les Héthiens, les Guirgasiens, les Héviens et les Jébusiens. Je les livrai entre vos mains, 12 et j’envoyai devant vous les frelons, qui les chassèrent loin de votre face, comme les deux rois des Amoréens: ce ne fut ni par ton épée, ni par ton arc.

13 Je vous donnai un pays que vous n’aviez pas cultivé, des villes que vous n’aviez pas bâties et que vous habitez, des vignes et des oliviers que vous n’aviez pas plantés et qui vous servent de nourriture.

14 Maintenant, craignez l’Éternel, et servez-le avec intégrité et fidélité. Faites disparaître les dieux qu’ont servis vos pères de l’autre côté du fleuve et en Egypte, et servez l’Éternel.

15 Et si vous ne trouvez pas bon de servir l’Éternel, choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir, ou les dieux que servaient vos pères au-delà du fleuve, ou les dieux des Amoréens dans le pays desquels vous habitez.

Moi et ma maison, nous servirons l’Éternel.

Matthieu 12:38-45

Quelques-uns des scribes et des pharisiens prirent la parole, et dirent: Maître, nous voudrions te voir faire un miracle.

39 Il leur répondit: Une génération méchante et adultère demande un miracle; il ne lui sera donné pas d’autre miracle que celui du prophète Jonas. 40 Car, de même que Jonas fut trois jours et trois nuits dans le ventre d’un grand poisson, de même le Fils de l’homme sera trois jours et trois nuits dans le sein de la terre. 41 Les hommes de Ninive se lèveront, au jour du jugement, avec cette génération et la condamneront, parce qu’ils changèrent à la prédication de Jonas; et voici, il y a ici plus que Jonas. 42 La reine du Midi se lèvera, au jour du jugement, avec cette génération et la condamnera, parce qu’elle vint des extrémités de la terre pour entendre la sagesse de Salomon, et voici, il y a ici plus que Salomon.

43 Lorsque l’esprit impur est sorti d’un homme, il va par des lieux arides, cherchant du repos, et il n’en trouve pas. 44 Alors il dit: Je retournerai dans ma maison d’où je suis sorti; et, quand il arrive, il la trouve vide, balayée et ornée. 45 Il s’en va, et il prend avec lui sept autres esprits plus méchants que lui; ils entrent dans la maison, s’y établissent, et la dernière condition de cet homme est pire que la première. Il en sera de même pour cette génération méchante.

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