Les 4 clefs de la vie : retour et repos, calme et confiance

Ésaïe 30:8-18

Culte du 29 janvier 2017
Prédication de pasteur Marc Pernot

Vidéo de la partie centrale du culte

film réalisé bénévolement par Soo-Hyun Pernot

Culte du dimanche 29 janvier 2017
prédication du pasteur Marc Pernot

Pour ce dimanche, je vous propose d’ouvrir notre Bible au livre du prophète Ésaïe pour y trouver un petit bijou de théologie et de sagesse.

Dans la Bible, il arrive qu’un auteur cherche à condenser en une phrase ce qui lui semble être le plus fondamental dans la vie. C’est ce que nous avons ici dans le livre d’Ésaïe.

« Ainsi a parlé le Seigneur, l'Éternel, le Saint d'Israël :
C'est dans le retour et le repos qu’est votre salut,
C'est dans le calme et la confiance qu’est votre force. »(30:15)

Ésaïe insiste lourdement sur l’importance à ces yeux de cette phrase : c’est Dieu, avec tous ses titres qui en est l’origine, et l’enjeu n’est rien de moins que les clefs du salut et de la force ! Cela tient en quatre mots : être dans le retour, dans le repos, dans le calme et dans la confiance.

Ésaïe est sympa, c’est tout simple et doux. Ça donne envie d’essayer, de se poser, de méditer. De chercher à nous calmer, de reprendre confiance. Les 4 clefs qu’ils nous donne pour vivre sont simples et vraies, transmises de génération en génération.

Une sagesse en 4 mots

Ce qui saute aux yeux dans ce beau passage, c’est d’abord une sagesse, avec cette invitation au calme et à la sérénité face aux difficultés de l’existence. Cette sagesse rejoint celle des stoïciens, ou plus exactement la précède puisque Zénon commence à enseigner 400 ans après ce texte d’Ésaïe. Il y a dans cette sagesse quelque chose d’universel et de salutaire. Face aux difficultés, nous pouvons être parfois comme une personne tombée à l’eau et qui panique, se noyant dans son agitation alors qu’il suffirait de s’allonger sur le dos bien à plat sur l’eau pour flotter et se reposer.

Le « retour » évoqué en premier peut alors signifier un retour vers l’essentiel, vers le fondamental, retour vers ce qui est une source de mieux.

Il est vrai que le terme même de « retour » dans le texte biblique évoque ce que l’on traduit parfois par « la conversion », le retour de la foi, nous y viendrons tout à l’heure, mais ce n’est pas spécifié ici, alors qu’il aurait été facile de mettre « C'est dans la conversion à Dieu et le repos en lui qu’est votre salut, c'est dans le calme et la foi en l’Éternel qu’est votre force. » Mais non. Ésaïe est plus large que cela.

« C’est dans le retour et le repos qu’est votre salut ». Retour vers quoi ? Et en quoi m’étais-je éloigné, dispersé ? Bonnes questions que nous invite à nous poser Ésaïe. La question n’est pas seulement spirituelle, elle est aussi à vivre avec lucidité en ce qui concerne nos préoccupations, notre façon de vivre, nos agendas, notre budget, nos paroles et nos actes. Des questions très pratiques que nous aimerions peut-être éviter. Ésaïe nous prépare à ce questionnement en nous mettant en garde contre ce penchant très naturel, il relève que les fidèles demandent à leurs prophètes « Dites-nous des choses flatteuses, Ayez des visions chimériques ! » et que surtout la présence de Dieu ne se mette pas en travers de notre façon de vivre (Ésaïe 30:11). Dans un sens, on comprend les paroissiens d’Ésaïe, c’est tellement plus simple de vivre dans la théologie abstraite, dans la philosophie spéculative, dans la politique politicienne, dans les idéaux fumeux, dans la religion religieuse. Que ces rêves nous bercent et ne viennent pas en travers de notre chemin de vie, n’interrogent pas nos actes, nos compromissions, nos illusions.

Et pourtant, là est le salut.

Qu’est-ce qui en moi s’est détourné ? Pour répondre à cette question, je suis amené à chercher quel est le cœur de mon moi, quel est l’essentiel de l’essentiel. Peut-être qu’en me posant cette question je serai amené à creuser la question de la source et de l’ultime, la question de la transcendance et de Dieu ? Mais de toute façon, que ce soit d’abord ou après, il faudra bien un jour faire le lien avec mon monde, et donc m’interroger sur ce qui en moi s’est perdu loin du cœur de mon être. Avez-vous déjà vu un chien de berger veiller sur son troupeau de mouton, dans l’alpage ? Il cherche un point d’où il voit l’ensemble, il veille et quand il le faut il court rassembler les brebis qui s’éloignent. Comme lui, nous pouvons faire le tour des éléments de ne notre vie et ramener les égarés.

Mais pour ramener au cœur, il faudra bien se demander quel est l’essentiel de l’essentiel dans notre vie ? Tant de choses nous semblent indispensables de notre point de vue présent. Sans doute tant de choses paraissaient aussi indispensables à une famille juive en 1930 ou dans la Syrie d’il y a 10 ans... Qu’emporterions nous dans une seule petite valise que nous pouvons sauver ? Que garderions nous dans notre espérance, dans notre cœur et nos pensées dans notre prière ? Comme mémoire chérie si tout nous était ôté ?

Tant de chose nous paraissaient importantes, très trèèèès importantes avant que le résultat d’un bilan de santé nous inquiète pour notre vie ou celle d’une personne que l’on aime ? La couleur du papier peint ? L’injure du collègue, le mépris du patron, l’ambition d’un autre, le voisin mal luné ? La carrosserie de notre voiture ?

Comment saisir, comme nous y invite ici Ésaïe, ce qui fait le cœur du cœur de notre être, de notre vie, de notre espérance, de notre bonheur ?

Chercher quel est ce cœur du cœur. Y retourner.

Regarder son agenda. Comment est-ce que, concrètement, j’affecte les 24h/jour de mon temps ? Analyser vraiment ce qui a mobilisé ma préoccupation dans la journée, est-ce que vraiment c’était important, indispensable à mon bonheur, à ma vie ?

En même temps, cette recherche de revenir à l’essentiel ne doit pas être frénétique, au contraire, Ésaïe nous indique qu’elle peut, qu’elle doit se faire dans le calme, la sérénité, la confiance.

Je ne pense donc pas que cette recherche nous invite à se dépouiller de ce qui n’est pas l’ultime nécessaire. Pourquoi pas si c’est le chemin de quelqu’un, mais en général non. Un centre est beau quand il est le centre de quelque chose. La question me semble de bien distinguer l’essentiel du secondaire pour nous. Pour un autre il en serait peut-être autrement, demain, nous évoluerons peut-être, mais aujourd’hui et pour moi, où est l’essentiel. Ensuite, faire que ce qui n’est pas essentiel soit vraiment secondaire pour nous. Aussi bien dans nos buts que dans nos moyens. Concernant nos buts, nous sommes professionnels des rêves chimériques, nous dit Ésaïe, dans les moyens qui nous semblent justes nous avons aussi à faire du tri. Trop souvent, nous dit-il, c’est à la violence et les détours que nous faisons confiance, nous cherchons le salut dans les coups tordus (Ésaïe 30:12) et dans la fuite (Ésaïe 30:16). Ce n’est pas un bon plan, nous dit Ésaïe. Ce n’est pas que Dieu nous en voudrait (ce n’est pas son genre) mais c’est que cette façon d’être n’est pas sage. C’est comme si on construisait tout de travers une muraille sur laquelle on compte pour nous protéger, cela va nous retomber dessus. C’est juste de la physique élémentaire.

Ne pensez-vous pas que cette sagesse d’Ésaïe participe à notre salut ? Nous sommes tous égaux devant ce travail à faire, croyants et athées.

Une éthique en quatre mots

Mais à y regarder de plus près, ce n’est pas seulement une sagesse qu’Ésaïe nous appelle à chercher dans ces quatre gestes. Ésaïe nous invite aussi à une éthique. En effet, un au moins de ces quatre mots invite à l’action, le 3e traduit par « le calme » est en réalité un verbe qui est à un mode hébreu, le hiphil, qui est un factitif et devrait donc être traduit par « faire le calme ». C’est tout le contraire de la violence, des coups tordus ou la fuite, mais être, comme Jésus nous y invite, des « artisans de paix » (Matthieu 5:9). Et cela aussi est une sagesse. Nous ne sommes un animal social. Nul salut, nulle force possible sans les autres et encore moins contre les autres. L’image du mur donnée par Ésaïe prend son sens, pas seulement pour notre existence individuelle bien construite sur de bonnes bases, mais à travers la construction de bon liens entre nous. Sans fissures laissées par les personnes manquantes, sans porte-à-faux créés par les coups tordus.

Ces quatre clefs d’Ésaïe sont donc à entendre aussi comme une éthique, et pas seulement le 3e verbe. Revenir les uns vers les autres, veiller et nous aider mutuellement à ne pas nous perdre, être source de repos pour celui qui est éprouvé et artisan de paix entre nous, bâtir des liens de confiance.

Une foi en quatre mots

Mais même si Ésaïe laisse en blanc ce vers quoi nous pouvons retourner pour être sauvé et en quoi nous pouvons faire confiance pour avoir de la force, ce silence est assourdissant dans ce contexte. C’est évidemment à la foi qu’il nous appelle, et c’est donc sans surprise que cette prédication d’Ésaïe arrive à cette promesse « l'Éternel est un Dieu juste : Heureux tous ceux qui espèrent en lui ! » ( Ésaïe 30:18)

Bien sûr qu’il faut un retour sur l’essentiel, mais quoi de plus essentiel que la source de l’essentiel ?

Ésaïe nous propose donc quatre gestes fondamentaux, quatre états d’esprit : être dans le retour et le repos, faire le calme et être dans la confiance.

Les deux premiers apportent le salut, la vie plus profonde, plus vivante que tout ce qui peut arriver. Ésaïe associe deux gestes, l’un dynamique : retourner à Dieu et l’autre statique : reposer, calme et tranquille. C’est un temps purement spirituel, c’est un temps de shabbat où on ne crée rien si ce n’est ce lien qui peut s’établir entre Dieu et nous. Lien dont Dieu a l’initiative en se tournant vers nous, et nous appelant.

Établir ce lien, rien de plus. La confiance viendra peut-être après, elle est une force mais le salut est simplement dans ce oui qui accepte d’écouter ce que Dieu dit. Peut-être pour le discuter et le refuser après, mais au moins se tourner pour regarder et écouter sans rien faire d’autre. Pour l’instant, s’étendre là et rester un peu, essayer de faire silence devant cette source, cette présence d’un autre ordre.

Le salut est là, simplement là. Il frappe à la porte, celui qui entend et qui l’ouvre le reçoit, et il nous invite à partager tranquillement le pique-nique qu’il a apporté (Apocalypse 3:20).

Après le salut vient le secret de la force. On s’attend à un super héros gonflé de puissance divine ? Et c’est bien cela, mais cette force est d’être dans l’action pour faire le calme, en nous, entre nous et avec Dieu. Et cette force est dans la confiance. Là encore l’objet de cette confiance est ici d’abord la confiance en Dieu. Bien sûr. Mais pas seulement car sinon ce serait dit. Une confiance en Dieu qui nourrit une confiance en nous-mêmes et une confiance dans les autres, dans ce corps que nous formons ensemble. Confiance qui elle aussi doit être soumise à ce processus de salut évoqué en premier, passée au creuset pour écarter les scories et garder le meilleur, garder l’essentiel. Même dans notre confiance en Dieu, qui n’a pas à être aveugle non plus, elle est une interaction avec ce que nous sommes et ce que nous aimons.

Une théologie en quatre mots

Mais si le salut et la force sont dans ces 4 attitudes, Ésaïe nous offre aussi une théologie, car par définition, Dieu est salut et force.

« Ainsi parle le Seigneur, l'Éternel, le Saint d'Israël »
nous dit Ésaïe 30:15

« Ainsi parle », c’est le célèbre « coh amar » hébreu qui signifie « ainsi parle », c’est l’acte du Dieu créateur qui travaille à mettre en ordre le chaos, ce « ainsi parle... » est comme un début de genèse, une mise en lumière par ci et du plus vivant par là. Ce « ainsi parle », c’est le Dieu qui participe à ce retour, cette conversion à laquelle il nous invite.

« Ainsi parle le Seigneur ». Ce seigneur, c’est « Adonaï », il est la stabilité.

« L’Éternel », c’est le Dieu de tendresse et de pardon, celui qui fait la paix par l’amour, qui calme par son pardon.

« Le Saint d’Israël » est celui qui a scellé une alliance avec nous et qui ne s’en dédiera pas, celui qui travaille avec nous et pour nous, celui qui fait de l’humanité un peuple.

Ce Dieu que nous décrit Ésaïe,

  • il sauve par sa force créatrice inlassable,
  • et sa force est dans sa tendresse et sa fidélité.

Quelle façon d’être ! Contemplons le.

Prenons-en de la graine.

Calme et tranquille.

Amen

Lecture de la Bible

Ésaïe 30:8-18

Viens maintenant, écris ces choses devant eux sur une tablette, et grave les dans un livre, afin qu'elles subsistent jusqu'au dernier jour, éternellement et à perpétuité.

9 Car c'est un peuple rebelle, ce sont des enfants indociles, Des enfants qui ne veulent pas écouter la loi de l'Éternel, 10 Qui disent aux voyants : Ne voyez pas ! Et aux visionnaires : N'ayez pas pour nous de visions exactes, dites-nous des choses flatteuses, ayez des visions chimériques ! 11 Détournez-vous du chemin, écartez-vous du sentier, ôtez de notre présence le Saint d'Israël !

12 C'est pourquoi ainsi parle le Saint d'Israël : Puisque vous refusez cette parole, que vous vous confiez dans la violence et dans les détours et que vous les prenez pour appuis, 13 Cette faute sera pour vous comme une partie lézardée qui menace ruine et fait saillie dans une muraille élevée, dont l'écroulement arrive tout à coup, en un instant : 14 On la brise comme on brise la jarre des potiers que l'on casse sans ménagement et dont les débris ne laissent pas un morceau pour prendre du feu au foyer ou pour puiser de l'eau à la citerne.

15 Car ainsi a parlé le Seigneur, l'Éternel, le Saint d'Israël : C'est dans le retour et le repos que sera votre salut, C'est dans le calme et la confiance que sera votre force. Mais vous ne l'avez pas voulu !

16 Vous avez dit : Non ! nous fuirons à cheval ! C'est pourquoi vous fuirez. Nous monterons des coursiers rapides ! C'est pourquoi ceux qui vous poursuivront seront rapides. 17 Comme un seul homme, mille fuiront à la menace d'un seul, et, à la menace de cinq, vous fuirez, Jusqu'à ce que vous restiez comme un mât au sommet de la montagne, comme un signal sur la colline.

18 C'est pourquoi l'Éternel attend pour vous faire grâce, ainsi il se lèvera pour avoir compassion de vous ; car l'Éternel est un Dieu juste : Heureux tous ceux qui espèrent en lui !

Amen

(Cf. Traduction Colombe)

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