EB Marc 15:34 : Vendredi Saint confiné 10 avril 2020
Ironie du sort… : le groupe biblique œcuménique Oratoire / Saint-Eustache avait prévu sa réunion de lancement le mardi 17 mars dernier, et à cause de la crise sanitaire sans précédent, nos paroisses Saint Eustache et l’Oratoire ont été obligées de différer leur projet.
Ironie du sort… : nous avions prévu de réfléchir et méditer ensemble sur le silence de Dieu.
Ironie du sort… : j’aurais dû vous présenter le Psaume 22 (21), contenant cette interrogation : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27/46 et Marc 15/34) qui est la quatrième parole du Christ en croix.
Nous voici en ce Vendredi saint 2020, calfeutrés chez nous, pour cause de confinement, mais relayés par les réseaux sociaux et Internet. S’il y a une célébration qui peut nous rassembler, orthodoxes, catholiques et protestants, indépendamment de nos différences ecclésiologiques et théologiques, c’est justement celle du Vendredi Saint. Le rituel est le même pour nos trois confessions et d’une grande simplicité : la lecture de la Passion, entrecoupée de silence et de musique, de psaumes et de cantiques. Pour terminer, il y a cette longue prière d’intercession, les uns pour les autres, s’élargissant aux dimensions du monde.
Nous nous souvenons ensemble de la mort de Jésus. Dans les récits des Évangiles, la mort de Jésus n’est pas idéalisée. Ce n’est pas une mort héroïque, c’est une mort tragique. C’est la mort injuste d’un homme innocent, dans les pires conditions de souffrances physiques et morales, liées à la solitude et à l’abandon. Comme tant d’autres aujourd’hui.
Dans l’Evangile de Marc, la vie de Jésus s’arrête sur son cri d’effroi lancé de la croix. Ce cri nous rassemble aujourd’hui, parce qu’en lui sont contenus tous les cris d’abandon vécus par notre monde, terrassé à ce jour par le Covid 19. Mais ce cri a déjà été hurlé depuis l’aube de l’humanité, chaque fois qu’elle fut en proie aux aberrations, à la douleur, au désespoir, à l’échec, à la peur, à la révolte, à la torture, à l’emprisonnement, à la guerre, au viol, à la colère, à la violence, à l’injustice, à la pandémie, à la mort.
Jésus a connu l’absence et le vide. Il a fait l’expérience du silence. Comme tant d’autres aujourd’hui. On peut tenter d’expliquer, de justifier, d’argumenter, mais c’est inutile. Juste pour ce soir, avec Dieu, comme Dieu, il n’y a qu’à se taire. Juste pour rester solidaires de tous ceux qui pleurent. Il n’y a pas de doute : la croix, comme le mal, restent une énigme. C’est vendredi saint sur le monde. Il y a cette traversée des ténèbres, avant de retrouver la lumière.
Agnès Adeline-Schaeffer.