Pouvoir et Autorité

Pouvoir et Autorité
Théophile, 14 octobre 2022

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PLAN

Préliminaires  p.1
   Comment distinguer pouvoir et autorité  p.3
   Articulation du religieux et du politique  p.4
Hobbes et la notion d’autorité  p.6
   Le trône vide du Christ  p.8
   En théologie chrétienne, le Dieu unique se décline en trois hypostases  p.8
Logique du pouvoir et logique de l’autorité  p.10
   Autorité et jeu de rôles  p.12
Deux conceptions de la loi  p.14
   La conception de Rousseau  p.14
   La conception de Bentham  p.15
   Loi et châtiment  p.15
   Moïse « rousseauiste » et Aaron « benthamien » ?  p.17
La continuation du pouvoir par d’autres moyens  p.18
   Pascal et les cordes de respect  p.19
   Une figure symbolique des liens qui constituent le pouvoir  p.20
Conclusion : les torsades du pouvoir et de l’autorité  p.21

Ensemble des textes pour la séance Théophile sur Pouvoir et Autorité  p.23


INTRODUCTION

Pouvoir et autorité sont deux mots que l’on prend volontiers l’un pour l’autre et qui sont pourtant distincts l’un de l’autre. On repère aussitôt, en effet, qu’un pouvoir peut s’exercer sans autorité et qu’un individu qui n’est plus au pouvoir, qui ne souhaite pas y revenir, voire qui ne l’a jamais exercé et n’a jamais souhaité l’exercer, peut néanmoins jouir d’une grande autorité et manifester une parfaite autorité. Le Christ est sans pouvoir, mais non sans autorité. Le pouvoir ne confère pas ipso facto l’autorité ; et moins encore, l’autorité le pouvoir. Certes, par quelques éléments, les deux termes s’apparentent, mais par beaucoup d’autres traits, non seulement ils diffèrent, mais ils s’opposent. Hobbes le fait aussitôt ressortir en référant l’autorité à ce qui autorise le pouvoir, l’investit, l’institue au moins partiellement, et qui, par conséquent, s’en distingue ; bref en faisant ressortir le verbe "autoriser" caché dans le substantif "autorité".
À l’appui de Hobbes, les langues – à commencer par la langue française – ne traitent pas l’autorité comme le pouvoir ; elles introduisent des disjonctions dans la syntaxe des usages des deux notions. Si on se tourne vers l’expression commune que nous venons d’utiliser, être au pouvoir, on s’aperçoit qu’elle caractérise bien le pouvoir mais pas l’autorité ; on n’est pas à l’autorité. On l’a, on peut l’acquérir, la détenir, comme on peut dire que l’on a le pouvoir d’ailleurs ou qu’on l’acquiert, qu’on le détient, mais on n’est pas à l’autorité comme au pouvoir. On peut bien quitter le pouvoir, de façon nette et statutaire : on est au pouvoir ou on ne l’est pas, selon une loi du tout ou rien, même s’il est des pouvoirs mieux autorisés que d’autres ; on ne peut pas quitter l’autorité. On peut peut-être la céder à quelqu’un, mais alors rien n’empêche qu’on la laisse sans rien perdre de la sienne. Ce qui n’est pas possible pour le pouvoir : laisser le pouvoir, c’est le quitter, c’est le perdre. Si je partage mon pouvoir, je suis obligé d’en céder une partie à un autre. Laisser l’autorité, en revanche, n’est pas la quitter, car on ne saurait comment la quitter. Elle ne disparaît pas au même rythme et de la même façon que le pouvoir ; elle se perd graduellement, ce que ne fait pas le pouvoir qui, même s’il décline, se perd d’un coup ou passe d’un coup de l’état indivis à l’état de partage. Il est vrai que l’autorité peut aussi se perdre d’un coup, par une affaire judiciaire, par la découverte d’une délinquance cachée jusque-là, par exemple, qui compromet toute l’autorité qui avait été engrangée auparavant. Mais on ne la prend pas comme on prend le pouvoir. On peut certes prendre d’autorité quelque chose, mais on ne saurait prendre l’autorité, laquelle n’est pas à prendre ; on peut prendre de l’autorité et ainsi l’acquérir. On a, au moins, ici, l’indice qu’une passation de pouvoir est forcément différente d’une passation d’autorité, beaucoup plus longue et moins spectaculaire.

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