Né d’une femme : un évêque repense la place des femmes dans une Eglise dominée par les hommes
Conférence de John S. Spong à l'occasion de la parution de son dernier livre "Né d'une femme", traduit par Abigaïl Bassac. juin 2015
C’est le titre choc que mon éditeur américain, HarperCollins, a donné à mon livre aujourd’hui accessible en français. Ce livre examine les récits de
naissance de Jésus et l’impact que la figure de la vierge Marie a sur le statut des femmes dans le monde chrétien et sur la question de leur égalité. Cet
ouvrage est aussi directement issu de deux précédents livres et il a conduit à un quatrième, afin de compléter le quatuor.
Le premier de ce quatuor était intitulé Vivre dans le péché ? Un évêque repense la sexualité humaine. Il traitait de trois schémas nouveaux dans les pratiques sexuelles dans le monde occidental. Ces trois aspects étaient : 1) les jeunes couples vivant ensemble avant le mariage 2) des adultes plus vieux, veufs ou divorcés, qui sont dans des couples actifs sexuellement mais qui ne comptent pas se remarier et 3) les couples gays et lesbiens, qui à cette époque ne pouvaient être mariés légalement dans aucun pays occidental de tradition chrétienne. C’était donc le premier livre d’un évêque chrétien remettant en cause les schémas traditionnels dans le monde chrétien. Il a suscité énormément de controverse, mais le temps et l’Eglise ont tous deux évolué de manière très significative, dans la direction que j’avais indiquée.
Ce livre a été attaqué par de nombreux responsables d’Eglises, qui citaient la Bible de manière littérale comme source d’autorité. J’ai répondu à leurs critiques dans un livre intitulé Sauver la Bible du fondamentalisme, qui demeure à ce jour celui de mes livres qui s’est le plus vendu (j’ai vendu plus de 1 250 000 livres). Dans ce livre, je remettais en question la légitimité de se servir de la Bible pour défendre des schémas traditionnels de comportements humains lorsque ces derniers changent afin de refléter une nouvelle compréhension de la vie. Tout au long de l’histoire, la Bible a été citée pour défendre des choses aussi étranges que : la royauté de droit divin, l’institution de l’esclavage, un statut de seconde classe pour les femmes, et l’oppression continuelle des personnes homosexuelles, bisexuelles et transgenre. Ce livre en a entraîné certains à reconsidérer l’idée selon laquelle la Bible serait un livre à comprendre de façon littérale, censé régir les comportements d’aujourd’hui.
J’ai ensuite pris un chapitre de ce livre et je l’ai étoffé pour en faire deux volumes. L’un était consacré aux récits de naissance de Jésus dans le Nouveau Testament, qui incluent des éléments mythologiques tels que la naissance virginale, une étoile qui se déplace, le voyage des mages et un chœur angélique qui chante à des bergers sur des collines qui gardaient leur troupeau la nuit. Le second était consacré aux récits de Pâques que l’on trouve dans les évangiles, qui comportent également des éléments mythologiques tels que le tombeau vide, des tremblements de terre, des anges qui roulent une pierre et un corps ressuscité qui apparaît et disparaît jusqu’à ce qu’il connaisse une ascension vers le ciel d’un univers composé de trois étages. Lorsque les éléments mythologiques des récits de Noël et de Pâques eurent été exposés pour que tous les voient, certains commencèrent à comprendre la différence entre une lecture littérale de la Bible et une lecture interprétative. Les Eglises qui continuent à considérer ces histoires comme des faits historiques réels rendent leur message obsolète. Si les gens perçoivent qu’il n’y a pas d’autre manière de comprendre ces récits, ils commencent à trouver toute l’histoire chrétienne incroyable. J’écris pour ouvrir le monde chrétien à de nouvelles possibilités. Le dernier livre de ce quatuor était intitulé Libérer les évangiles : lire la Bible avec des yeux juifs. Il s’agissait de ma tentative de créer une nouvelle manière, profonde, de lire la Bible, qui nous délivre de la nécessité de la penser comme étant littéralement vraie.
Dans Né d’une femme, j’ai également abordé l’émergence du mouvement féministe dans le monde occidental et j’ai suggéré l’idée que la lecture littérale de la naissance virginale sert à maintenir les femmes dans un statut de citoyen de seconde zone. Je ne veux pas faire partie d’une Eglise qui encourage l’oppression des femmes et des personnes homosexuelles. Le fait que j’ai été et que je suis évêque de l’Eglise anglicane d’Amérique a donné à ces idées une exposition médiatique large.
Right Reverend John Shelby Spong
Evêque de Newark, retraité, Etats-Unis d’Amérique
(Traduction : Abigaïl Bassac)