Discours d'introduction par Béatrice Cléro-Mazire
Discours d’introduction à la journée d’hommage à Bernard Cottret par la Pasteure Béatrice Cléro-Mazire
Chère Monique, Chers amis historiens et historiennes, chers amis éditeurs et chers confrères pasteurs, nous sommes très heureux, à l’Oratoire du Louvre, de vous accueillir dans cette salle où les bustes de deux personnages restés dans la mémoire collective à des degrés divers, veillent sur nos débats et évoquent par leur présence la façon qu’à l’Oratoire du Louvre depuis sa création de faire église. Un chercheur en science : Théodore Monod, et un chercheur en témoignage de foi : Adolphe Monod ; l’un comme l’autre animés par cette recherche de la juste place de l’homme dans l’univers. C’est cette façon libérale et critique qui nous permet d’être ensemble aujourd’hui sans être les hérétiques les uns des autres mais dans l’amitié qui nous a motivés à être ensemble.
Sous les bons auspices de ces deux personnalités, nous allons évoquer ensemble le travail d’un homme, chercheur lui aussi, dans divers disciplines telles que, bien sûr, l’histoire, avec des livres qui sont aujourd’hui reconnus comme ouvrages de référence dans leur domaine, comme son histoire de l’Angleterre, mais aussi, inévitablement, la politique, avec des personnalités et des sujets qui impliquent d’étudier les forces qui animent le débat politique des états ; mais aussi la théologie, comment parler de personnages comme Jean Calvin sans entrer dans le débat théologique de la Réforme ; mais aussi d’anthropologie, car c’est souvent par la biographie et l’humanisme que Bernard Cottret est entré en recherche.
« L’homo Fidei » constituera sans doute, un des fils conducteurs de cette journée d’hommage et de dialogue, car la foi et son importance dans la construction d’une vie humaine, est sans doute l’énigme qui nous rassemble aujourd’hui entre nous et avec Bernard.
Cette journée n’est pas une journée d’étude traditionnelle et elle a sans doute dérouté les chercheurs habitués à rendre compte de leurs travaux sur un sujet donné ; mais elle est particulièrement accordée à la personnalité de Bernard qui avait une démarche originale dans les domaines où il travaillait et intervenait. En effet, les savoirs que la recherche de Bernard a fait émerger tout au long de sa carrière m’apparaissent davantage comme des relations plutôt que comme des certitudes. C’est dans la forme évangélique de la rencontre que Bernard vivait sa recherche, tant dans les séminaires rassemblant des chercheurs dans l’espace anglophone, que dans ceux qui réfléchissaient sur la place des femmes dans le monde religieux. (Il ne doit pas être très content, d’ailleurs, que si peu de dames soient représentées aujourd’hui dans cette journée. Marianne, vous aurez la lourde tâche de représenter celles pour qui Bernard réclamait une véritable reconnaissance là où elles ne l’avaient pas encore conquise).
C’est dans ce contexte que nous nous sommes rencontrés et entendus sur une admiration commune pour l’islam libéral qui a la belle audace d’accomplir sa réforme en redonnant, notamment, sa pleine et entière responsabilité à la moitié du genre humain pour lire et interpréter les textes fondateurs. C’est sans doute pour cette raison que Bernard confiait à mon époux durant les cultes, (preuve que je n’étais pas la seule à parler durant mes propres prédications), que l’Oratoire était sa véritable paroisse. Non pas pour exclure les belles relations qu’il avait dans beaucoup d’autres paroisses, mais parce que l’Oratoire lui apparaissait comme un carrefour où les chercheurs de Dieu pouvaient exprimer sincèrement les limites humaines de leur compréhension du divin sans être obligés d’occuper une position définitive dans la foi, si ce n’est celle d’un espace leibnizien, construit comme un tissu de relations.
Ce désir de faire cohabiter dans une même culture de liberté, dans une même « langue religieuse » ouverte et hospitalière, les aspects complémentaires des expressions de foi riches de complexité, aura été la terre commune que nous aurons habitée. Avoir le courage de chercher ce que l’on peut savoir et l’humilité de savoir que notre vérité n’existe qu’en un Autre, insu de nous et espéré, c’est peut-être cela, l’éthique de vie d’un « homo fidei ». Merci de votre attention.
C’est grâce à Franck Belloir et à notre présidente du Conseil Presbytéral Aurore Saglio Thebault, que cette journée a pu être organisée, qu’ils en soient tous deux remerciés.
Pasteure Béatrice Cléro-Mazire