Sommaire du N° 818 (2019 T2)

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Dossier du mois
L'engagement

Une Église engagée, mais comment ?

Notre pays est bousculé jusque dans ses institutions par un mouvement né de façon très singulière, à partir d’une goutte de carburant dont la taxe a fait déborder une coupe que personne n’avait vu si remplie.

Samedis après samedis, les analystes politiques et économiques tentent de donner un sens à un mouvement de contestation sans objet clairement identifiable, et aux revendications les plus variées.

Entre la légitime colère des plus précaires et la mauvaise foi des idéologues les plus opportunistes, difficile de s’y reconnaître.

Cette situation repose la question de l’engagement des églises dans les mouvements sociaux. En effet, si la laïcité nous oblige à rester réservés par rapport aux partis politiques, la foi nous incite à protester pour l’homme et pour l’amélioration de sa condition sociale. Et la couleur jaune revêtue par une partie de nos concitoyens doit nous alerter comme un trait de surligneur sur certains versets de nos Bibles.

Nos Églises protestantes, toutes dotées de partenariat avec des associations d’entraide, sont déjà engagées, pour la plupart, dans l’accueil des personnes les plus précaires : sans domicile, sans-papiers, sans droit, sans revenus suffisants ou sans famille. Mais ce mouvement de ras le bol se révèle malgré la citoyenneté reconnue, malgré le travail et le salaire, malgré les aides sociales, malgré le droit à la retraite. Ce qui suffit tout juste pour le présent ne permet pas d’envisager l’avenir et cette pauvreté-là, souvent, passe inaperçue.

Quelle que soit l’issue de ce mouvement, et les réponses politiques qui auront été envisagées, notre Église a à s’engager, non seulement auprès des plus précaires, comme elle le fait déjà, mais aussi auprès de ces concitoyens, qui, à force de supporter une pauvreté devenue ordinaire, ont fini par disparaître de la liste de nos soucis.

Sans doute, comme les disciples du Christ ayant eu du mal à rester éveillés au jardin de Gethsémani, aurons-nous du mal à veiller à ce que la vulnérabilité de nos contemporains ne devienne insupportable, mais il nous faut essayer. Si l’engagement apparaît souvent comme un acte manifeste de courage et de force, veiller, pour une Église, reste un véritable engagement de foi, et la réponse à un appel de Dieu, car c’est souvent sans bruit que sont déposés en son sein les sentiments d’exclusion ou d’indignité.

Pasteur Béatrice Cléro-Mazire


Le pasteur Werner Goll (1911-2003),
un irréductible de l’Eglise confessante allemande

Lors de l’Assemblée du Désert 2017, le groupe de l’Oratoire était proche de celui de l’église de Domat-Ems, venu des Grisons (CH).

Leur pasteur Hans Walter Goll, parfaitement francophone, me parla de son père dont il venait de publier la biographie en allemand. Frank Bridel a écrit en français à partir de cette recherche l’histoire d’une résistance non violente, mais périlleuse.

Sous le nazisme, dès 1933, des pasteurs ont osé s’élever au péril de leur vie contre le régime et l’Église officielle du Reich. Le théologien Karl Barth (1886-1968) a invité les protestants à une réflexion en profondeur sur le sens de l’Église, la fidélité à la parole de Dieu et la confession de foi en Jésus-Christ. Des pasteurs adhérèrent à l’Église confessante et se firent résistants, protestataires, par les prédications. En mai 1934, lors du Synode de Barmen, dans la Ruhr, les réfractaires proclament que l’Église d’Allemagne n’est pas un « organisme d’Etat » et n’a d’autre fondement que la parole de Dieu. Ce sera le début des persécutions. Karl Barth sera expulsé vers son pays natal, la Suisse.

Le pasteur Paul Schneider (1897-1939), arrêté à plusieurs reprises, torturé à mort en1939, protestait depuis la fenêtre de sa cellule. Le pasteur théologien Martin Niemoller (1892-1984), arrêté en 1937, vécut en prison puis en camp de concentration durant toute la guerre avec le titre de prisonnier personnel d’Hitler ; il a survécu. Le pasteur théologien Dietrich Bonhoeffer (1906-1945) est plus connu car il a voyagé à l’étranger et fait connaître les réalités du régime nazi. Il a écrit en prison avant dêtre déporté et pendu en avril 1945 sur ordre du Führer, juste avant l’armistice.

Toutefois, n’oublions pas les milliers de marginalisés, d’anonymes, pasteurs et fidèles, qui surent s’engager, résister, combattre pour la liberté de leur foi sous la terreur nazie. Le jeune Werner Goll a fait partie comme suffragant de la jeune Église Confessante allemande. Il s’est engagé ne pouvant adhérer à la pensée qu’il n’y a pas de vie en Allemagne en dehors du Führer, selon le dogme de l’Église du Reich dont les pasteurs sont assermentés. Dans sa résistance, le pasteur Goll se rappelle qu’il est le descendant d’huguenots nîmois, achète des livres français et sait accompagner ses paroissiens de Metzels en Thuringe. Il est assez vite interdit d’éducation de la jeunesse, puis de culte, donc sans accès à l’église ni au cimetière. Ses paroissiens et lui organisent des assemblées dans des lieux profanes. Tel fut le quotidien des « confessants ». Mais la Gestapo s’en mêle et Werner Goll doit quitter sa paroisse pour protéger ses paroissiens qui continueront à résister.

Il s’engage alors comme fourier dans la Wehrmacht ; l’indépendance relative de cette position lui permet de rencontrer les populations et de comprendre leurs souffrances. Il passera deux ans sur le front de l’Est puis sera envoyé en Italie. Il ne peut ignorer les horreurs de cette guerre, les pillages, humiliations, exécutions, massacres et destructions de tout ordre qui chosifie l’humain. En lui commence à mûrir le moyen de lutter contre cette armée et ses exactions. Sa rencontre en France avec l’abbé Carlotti, résistant de la première heure et ami indéfectible, lui permet d’y réfléchir. Il prend alors la décision la plus grave de sa vie en Italie. Fut-il convaincu par un prêtre, l’abbé Ferro, pivot de la résistance de Voltri ? Il rejoindra les partigiani, résistants italiens ; il ne peut cautionner plus longtemps les horreurs dont il est témoin. Ce ralliement l’empêcha, presque jusqu’à la fin de sa vie, de s’exprimer à ce sujet ; cet acte d’héroïsme était punissable de mort ; il dut supporter l’infamie attachée à la désertion et à la trahison. En effet, il fut jugé coupable dans une parodie de justice. Werner Goll restera silencieux sur ce qu’il a vécu. Il a connu le mépris mais il réalisa enfin sa vocation pastorale dans une Église libérée.

Ce n’est qu’à la fin du siècle qu’une réhabilitation semble possible grâce aux jeunes générations. L’Église allemande proclame, en 1996, lors d’un synode : Celui qui refuse de participer à un tel crime mérite le respect. Étant donné le caractère criminel de la dictature national-socialiste et de la guerre qu’elle a menée, il est absurde de maintenir les condamnations des hommes qui s’y sont opposés. En mai 1998, le Bundestag réhabilite tous les objecteurs de conscience ; en juillet 2002, cette réhabilitation est étendue aux déserteurs de la Wehrmacht. Le pasteur Werner Goll a 91 ans, il est lavé de l’opprobre ; il décède un an plus tard habité par une sérénité indifférente aux jugements des hommes. Il fit promettre à son fils de ne rien dire de son histoire avant sa mort.

Laurence Tardy-Trouvers

Vous pouvez lire L’irréductible Pasteur Goll, combattant de la foi sous la terreur nazie, de Frank Bridel, Editions Ampelos, 2014.

Des Justes à l’Oratoire du Louvre

Dans notre imaginaire, les lieux protestants d’aide et de refuge pour les juifs face à la Shoah se trouvent dans des terroirs ruraux, isolés, montagnards, les Cévennes au premier titre, ou le plateau du Chambon-sur-Lignon (ou les vallées vaudoises en Italie), etc. Et pourtant des juifs ont pu être secourus et sauvés au coeur des villes, y compris (et surtout ?) à Paris. L’Eglise réformée de l’Oratoire du Louvre, son temple, son « annexe » de La Clairière, s’imposent à cet égard, même si leur histoire est encore mal connue, alors qu’elle constitue l’une des plus belles pages de ce que le protestantisme français a osé faire face à l’Etat de Vichy et aux autorités d’Occupation.

Elle a valu à l’un des trois pasteurs en place dans les années 1940, Paul Vergara, la reconnaissance des juifs américains (dès 1957), puis de l’Etat d’Israël qui l’a déclaré Juste parmi les nations (avec son épouse). « Juste » également, Marcelle Guillemot, l’assistante sociale en charge de la Clairière, que Vergara admirait suffisamment pour lui consacrer un petit livre. « Juste », encore, une autre femme, qui n’était ni protestante ni française, et qui est morte assassinée par la Gestapo, la Belge Suzanne Spaak, que nous allons retrouver. Ce ne sont pas les seuls Justes, dans ce milieu qui a compté une série de femmes remarquables - elles ont été nombreuses, du reste, ces femmes protestantes qui ont sauvé l’honneur au cours des années 1940, dans les rangs de la Cimade, de l’aide aux juifs, de la Résistance, de la déportation.

Autour de l’Oratoire, il importe de citer deux paroissiennes (également Justes), Lucie Chevalley, la fille du grand théologien Auguste Sabatier, et Odette Béchard, épouse de l’un des directeurs des établissements Kuhlmann (Juste lui aussi). Ces deux femmes oeuvraient aux côtés de juives au sein de L’Entraide temporaire. Cette association au titre anodin a organisé l’exfiltration de Paris de peut-être 500 enfants et adolescents juifs et les a placés en banlieue et surtout dans une série de départements du centre de la France (en zone occupée). Parmi les convoyeurs d’enfants, et d’argent, un paroissien de l’Oratoire, Maurice Nosley.

Le plus joli « coup » de ce milieu a consisté à faire sortir des foyers d’orphelins dirigés par l’Union Générale des Israélites de France (UGIF), rue Lamarck et rue Guy-Patin, quelques dizaines d’enfants. L’idée est de Suzanne Spaak. Prévenues à la sortie d’un culte à l’Oratoire, le 14 février 1943, et volontaires, des dames sont allées le lendemain chercher les enfants sous le prétexte d’une promenade (autorisée) et les ont rassemblés à La Clairière où tout était organisé : les étoiles jaunes ont été décousues, les vêtements changés et détruits si nécessaire, les enfants ont été dispersés pour la nuit dans des familles protestantes et juives puis emmenés par des éclaireuses unionistes de l’Oratoire (mobilisées par leur cheftaine, Simone Chefneux) vers la province, notamment la Normandie d’où était originaire l’épouse de Vergara (fille du grand pasteur de l’Oratoire, Jules-Émile Roberty). La liste des enfants et de leurs nouvelles adresses a été mise au point et cachée chez une épicière du quartier. L’opération a parfaitement réussi et reste l’exemple d’un sauvetage collectif, au coeur de Paris occupé : peut-être 63 enfants le lundi 15 février, au total environ 90 car d’autres ont suivi.

Marcelle Guillemot a agi également au sein de la Résistance « classique », en liaison avec Londres, la Clairière devenant le point d’attache du secrétariat de la Zone nord de la Délégation Générale dirigée par Daniel Cordier. Un fils de Vergara, Sylvain, et son gendre, Jacques Emile Bruston (1909-1944) ont été déportés à Mauthausen, dont seul le premier est revenu.

Quant aux trois pasteurs de l’Oratoire, si seul Vergara a été nommé Juste, on n’oubliera pas qu’il est revenu à son collègue André-Numa Bertrand de monter en chaire le dimanche 7 juin 1942, premier jour du port obligatoire de l’étoile jaune pour les juifs en zone occupée. Bertrand a publiquement évoqué cette humiliation imposée aux juifs et son sermon a marqué les paroissiens. Le troisième homme, le Cévenol Gustave Vidal, a prêché durant ces années avec autant de courage et de force.

Ce n’est pas trébucher dans l’hagiographie, me semble-t-il, que de souligner ce qu’ont fait des femmes et des hommes de l’Oratoire, et qui nous évoque ce que d’autres chrétiens ont pu faire en Europe, des huguenots de France aux membres de l’Eglise confessante allemande et au petit groupe d’étudiants munichois de la Rose blanche (Die Weisse Rose).

Patrick Cabanel

Lire P. Vergara, Une assistante sociale. Marcelle Guillemot (1907-1960), 1961 ; Anne Nelson, La vie héroïque de Suzanne Spaak. Paris, 1940-1944. L’audace d’une femme face à la barbarie nazie, Robert Laffont, 2018 ; Pierre Drai, La mémoire déverrouillée. Histoire d’un enfant caché 1943-1945, Gaussen, 2011.


Résister, voix protestantes

Ils s’appellent Manen, de Pury, Theis, Trocmé, Vergara, et ont été proclamés Justes parmi les nations. Il est important de noter que 10% du corps pastoral de l’époque fait partie des Justes.

Le livre de Patrick Cabanel regroupe neuf prises de paroles entre le 23 juin 1940 et le 11 avril 1943 dans des lieux très divers comme le Chambon-sur-Lignon, le Temple lyonnais des Terreaux, l’Oratoire du Louvre ou le micro de la BBC.

Toutes ces prises de paroles, prédications ou discours, ont en commun le projet de donner au peuple protestant de l’époque les « armes de l’Esprit », pour résister avec la Bible, à la haine, au désespoir et conserver coûte que coûte la liberté d’être fidèle à Dieu dans son humanité.

Dans sa préface passionnante, Patrick Cabanel met en lumière le courage de ces pasteurs devenus prophètes dans une période où la complaisance aurait été sans doute plus sûre. Mais c’est au risque de leur propre vie que ces ministres de la Parole ont prêché l’Évangile du salut de l’homme.

Certains en sont morts mais leur engagement a permis de sauver la vie de beaucoup d’hommes, de femmes et d’enfants, traqués parce qu’ils étaient juifs et des autres, qui ont découvert la force de la foi. Ce livre est un visage de la résistance spirituelle, un livre absolument utile aujourd’hui où la nuit du fascisme ressurgit un peu partout en Europe.

Le pasteur Béatrice Cléro-Mazire


L’engagement dans le scoutisme

L’engagement est quelque chose de fondamental dans le scoutisme. On le retrouve à différents moments et toujours avec une signification nouvelle et particulière.

« La promesse est une force »

Quand un enfant est amené à prononcer sa promesse, cela vient donner un premier sens à son engagement au sein du scoutisme. En effet, dès 8 ans aux louveteaux ou 12 aux éclaireurs, on propose aux enfants de faire de leur mieux pour respecter leur promesse ou aux éclaireurs de faire tout leur possible.

Dans les deux textes de la promesse on retrouve 3 éléments majeurs : écouter la parole de Dieu, venir en aide aux autres et enfin obéir à la loi de l’éclaireur ou de la meute. La promesse est l’adhésion par l’enfant à l’idéal scout qui lui est proposé et de le reprendre pour guider sa vie. Bien que dans sa forme elle soit des plus solennelles, la promesse n’est pas un engagement irrévocable, à tout moment un enfant peut dire non et arrêter le scoutisme.

Mais il faut aussi voir cela comme un engagement comme nul autre. Parmi les trois points de la promesse, celui d’obéir à la loi peut amener à des interrogations. La loi que nous portons n’impose rien en soit, c’est un idéal que l’on tend à suivre d’abord au scoutisme, puis dans la vie de tous les jours.

« Toujours prêt ! »

La promesse comme n’importe quel engagement n’est pas grand-chose sans des actes. Au fur et à mesure que les enfants grandissent, ils sont amenés à être de plus en plus acteurs dans leur expérience du scoutisme. Ainsi nous les amenons à se dépasser et à s’engager. Participer aux activités scoutes tout au long de l’année est déjà s’investir d’une manière significative pour les jeunes ; la meilleure preuve qu’il peuvent accomplir pour manifester leur engagement est de participer activement à la vie de l’unité et de son clan ou de sa patrouille. Ces derniers sont pour cela un très bon outil avec les postes de patrouilles et l’investissement personnel demandé aux chefs de patrouilles.

Il est proposé ensuite aux enfants devenus des aînés, après les éclaireurs, de créer une Route. Il s’agit là d’un voyage humanitaire élaboré et monté de toutes pièces par des jeunes de 16 à 18 ans. Il est une fois de plus, au vu de l’important travail et investissement qui est demandé, une très belle preuve de l’engagement que l’on peut faire dans le scoutisme. Il s’agit là d’appliquer son scoutisme aux problèmes de la vie et d’avoir l’occasion de le faire dans la pratique.

« Rendre »

Lors de ma première formation au BAFA où j’ai pu participer, je me souviens de cette question qui avait été posée : « pourquoi êtes-vous chefs aujourd’hui ? » A cette question, un stagiaire avait simplement répondu ce mot : « rendre ».

C’est quelque chose qui m’avait marqué et que je comprenais tout à fait. La première raison pour laquelle je suis aujourd’hui Chef de Troupe est avant tout que les activités de la Troupe perdurent comme des bénévoles bien avant moi ont pu donner de leur temps.

Mais rendre quoi dans ce cas ? Le scoutisme est avant tout une méthode d’éducation et notre première tâche en tant qu’actuel chef est de transmettre aux enfants ce goût du scoutisme et ses valeurs qui nous sont chères.

Ainsi n’hésitez pas à inviter vos enfants à s’engager dans le scoutisme, peu importe l’âge, le moment dans l’année : il est toujours possible de nous rejoindre, alors surtout n’hésitez plus.

S’engager dans le scoutisme ne demande pas un effort surhumain, il suffit de sauter le pas, de faire vivre sa promesse et le reste vient tout seul. De plus, les fruits de cet engagement sont inégalables, pour ma part jamais je ne pourrai rendre autant que ce que le scoutisme à l’Oratoire m’a apporté, je tâche simplement de faire tout mon possible …

Pierre Primault, Chef de la Troupe de l’Oratoire



Être jeune,
et s’engager sur le chemin de la vie

A l’aube de mes vingt ans je me vois encore confronté à cet âge de la vie qu’est l’adolescence.

« Confronté » car cette période transitoire comprend son lot de difficultés qu’il est nécessaire de surmonter pour entrer pleinement et de manière épanouie dans l’âge adulte. C’est une sorte de mue qui se réalise pour comprendre qui nous sommes et où nous voulons aller. Le doute s’installe donc fortement autour de questions essentielles auxquelles nous devons répondre pour pouvoir avancer. Je choisis aujourd’hui d’en évoquer l’une d’elles :

Dans quelle vie je souhaite m’engager ?

Quand on pense à l’engagement, on se réfère très souvent à son usage militant en faveur d’une noble cause, d’un parti politique, ou encore dans l’armée. Cependant je l’appréhende de manière beaucoup plus large comme ce choix que l’on fait de s’engager dans une voie plutôt qu’une autre sur le chemin de la vie. Ce projet se construit autour de valeurs que l’on décide d’installer au coeur de notre action, de la place que l’on décide de donner à Dieu dans notre vie future, ou encore du rôle que l’on décide d’incarner au sein de la société. Bien sûr, cette voie peut évoluer par la suite mais l’adolescence est unique dans le sens où l’on est pour la première fois confronté à la nécessité de choisir. Choisir quel métier exercer, mais aussi quelle échelle des priorités instaurer, quel cadre donner à notre vie finalement. La mise en place de ce cadre inquiète, car bien sûr elle élimine certaines possibilités.

Dans mon cas, une véritable tension s’est installée entre une possible carrière dans le monde politique qui me passionne et une vie familiale épanouie que je souhaite de mes voeux les plus chers ; fonder une famille dans laquelle j’accorde du temps à ma femme et mes enfants étant pour moi essentiel. En effet j’ai compris à travers mes divers engagements dans des associations étudiantes de mon école que faire de la politique est un véritable sacrifice personnel, même à mon âge. Une autre tension a d’autre part émergé, celle de la compatibilité de la politique avec la religion : une pratique chrétienne de cette activité qu’on décrie beaucoup pour ses nombreux vices est-elle possible ? Alors qu’agir pour le bien commun en représentant mes concitoyens m’apparaît de plus en plus comme une vocation, comment concilier cela avec une vie familiale et spirituelle épanouie ? De cette incompatibilité manifeste est née une situation très inconfortable de ne pas savoir quoi choisir, dans quoi s’engager par peur de ce que j’aurais à y perdre.

J’ai pris le temps de la réflexion, non sans mal, en me sentant parfois complètement déboussolé. Le dialogue avec un certain nombre d’interlocuteurs d’expérience a été essentiel pour apporter des réponses à mes doutes et ainsi sortir considérablement mûri et renforcé de cette rencontre avec moi-même. J’ai dialogué avec mes proches, des hommes et femmes politiques, des pasteurs. Ceux-ci m’ont tous délivré des avis différents dont j’ai pris acte et ainsi pu me fonder ma propre opinion. Je ne souhaite pas renoncer au monde politique, néanmoins un certain nombre de garde-fous viendront encadrer mon engagement. On pourra m’objecter qu’une pratique de la politique selon une certaine éthique religieuse est impossible, je leur opposerai que de ne pas s’y essayer c’est renoncer à une alternative. Pour ce qui est de la peur de s’être trompé de voie, je suis aujourd’hui rassuré par le fait qu’un changement de cap est tout à fait possible au cours du voyage de l’existence. Rien n’est figé, au contraire.

Enfin, s’engager dans la vie, c’est assumer ses choix pleinement et en connaissance de cause pour que par la suite ils ne soient pas vecteurs de frustrations qui tuent toute satisfaction. Je pense qu’il faut donc en toute humilité accepter de douter et ainsi réfléchir sur soi-même avant de s’engager. Dans ces moments fondateurs, le dialogue intergénérationnel me semble essentiel. Il permet notamment, à nous les jeunes, d’être aiguillés et sérieusement armés afin de choisir le chemin de vie qui nous appartient.

Benjamin Hebding,
membre du Groupe de Jeunes de l’Oratoire



Et vous, souhaitez-vous vous engager ?

Si après la lecture de ces articles, vous avez envie de vous engager au service de l’Église, présentez-vous au conseiller d’accueil présent le dimanche matin, ou adressez un mail au secrétariat ou au pasteur Béatrice Cléro-Mazire.

Nous avons besoin d’aide, par exemple, lors des repas mensuels, pour l’accueil de nos expositions, de nos concerts, et lors de la Vente annuelle de fin d’année, et pour toutes sortes de tâches très simples, mais qui nécessitent plus ou moins de temps.

Merci par avance.