Je suis le chemin et la vérité et la vie

Jean 14:1-10 , Ezéchiel 17:22-24 , 1 Corinthiens 3:18-23

Culte du 17 juin 2018
Prédication de Bertrand de Cazenove

Vidéo de la partie centrale du culte

Résumé de la prédication:

Je suis le chemin et la vérité et la vie, dit Jésus dans cet Evangile selon Jean.
C’est une parole difficile à entendre quand on y pense. Pourquoi faudrait-il qu’un jeune, une famille, une Eglise se constituerait ainsi, contre d’autres possibles ? Entendre dire qu’il y a un chemin, une vérité, une vie, n’est-ce pas une prétention démesurée de la foi chrétienne ? Comment entendre cette Eglise johannique pour qui Dieu ne pouvait être connu qu’en Jésus le Christ ? N’est-il pas fou ou scandaleux de s’engager ainsi, de se séparer, d’opérer une discrimination entre les religions, les philosophies, les cultures, pour ne faire confiance qu’à un seul ? N’y a-t-il pas là quelques traces et promotions d’un mouvement sectaire ?

Cette parole que nous entendons ce matin nous place devant des choix. Il me semble que cette parole se donne d’abord, et c’est primordial, comme un chemin. Et qu’ensuite, la pratique de ce chemin bouleverse nos images, nos représentations de Dieu. Et donc qu’elle touche à notre vie.

Le mot primordial, ici, c’est le mot chemin. Ce mot vient en tête, en premier. Dans la Bible hébraïque et le nouveau testament, ce qui vient en premier, en tête d’une énumération, donne le sens de ce qui suit. (Cf. par exemple : le décalogue, les béatitudes… - c’est le début qui est déterminant il n’en va pas de même dans d’autres cultures). C’est donc le chemin qui nous guide. Si Jésus avait commencé par dire : « Je suis la vérité », cette affirmation centrale aurait privilégié le dogme, l’idéologie, le fondamentalisme, l’intégrisme. S’il avait dit d’abord : je suis la vie, l’affirmation aurait privilégié une pensée morale unique, que ce soit dans le sens « pro vie » ou transhumaniste.
Je suis le chemin. Quand la communauté johannique dit cela à propos de Jésus le Christ, c’est dans un contexte difficile, où cette communauté a été exclu des synagogues (car plus assez juive) mais non encore reconnue par les communautés qui se constituées en réseaux puis en Eglise à partir des années 70, en s’étendant dans tout le bassin méditerranéen jusqu’à Rome.

Je suis le chemin, mot primordial de cette série, le chemin et la vérité et la vie. L’importance de cette affirmation fait de la foi en Jésus Christ une recherche, une démarche, espérons : une progression, ou un approfondissement. Chacune, chacun est appelé à emprunter ce chemin, d’une vie en Christ qui nous fait rencontrer Dieu et grâce à lui nos prochains. Chacune, chacun est ainsi invité à avancer, découvrir un nouvel horizon. Non point une fois pour toutes, mais pas à pas, comme lorsque l’on prend un nouveau chemin. « Je suis le chemin » : nous voici avec cette parole, cette image, cette invitation. Il ne s’agit pas d’une définition, d’une loi, d’une obligation, Jésus est le chemin, celui qui, excusez l’expression qui peut être mal entendue, « celui qui pratique Dieu ». (Parce qu’il ne faut pas inverser : Dieu n’est pas pratique pour nous, ou ne devrait pas l’être). Le Christ n’est pas un modèle humain à imiter, ni un despote à subir, mais celui qui nous fait avancer.

Pour les jeunes et les moins jeunes, la foi chrétienne ne se donne pas comme une opinion valable une fois pour toute, que l’on aurait ou que l’on n’aurait pas (l’expression « avoir la foi c’est une contradiction qui n’a rien à voir avec les paradoxes des Evangiles - La foi chrétienne, c’est une relation, une démarche, un chemin que Jésus le Christ ouvre en compagnie du Dieu vivant).

Ce chemin, on ne sait pas vers où il peut conduire, vers quelle demeure il risque de nous emmener. La foi chrétienne se donne non comme une assurance, mais comme un saut et une marche dont on ne connaît pas les suites.
« Je suis, le chemin, et qui m’a vu a vu le père » dit Jésus dans cet Evangile selon Jean.
Deux disciples réagissent. Il y a Thomas, qui objecte : « Seigneur, nous ne savons pas où tu vas », et Philippe qui demande carrément l’impossible : « Seigneur, montre nous le Père et cela nous suffit ».

Je me demande si nous n’avons pas souvent aujourd’hui l’une ou l’autre de ces réactions quant à notre relation au Dieu vivant de Jésus le Christ. Thomas, dans l’Evangile c’est celui qui est là depuis le début, mais qui ne peut croire à la résurrection. C’est l’agnostique d’aujourd’hui, sincère et septique et qui a besoin d’une raison de croire. Et Philippe, dans l’Evangile, c’est une de ces personnes qui habite à la frontière, proche des grecs, qui ont une multitude de dieux. C’est le syncrétiste d’aujourd’hui, pour qui il y a quelque chose de vrai dans toutes les religions et les cultures, à condition qu’on puisse donner une fonction, un visage, un destin, le dieu qui porte chance, santé, beauté, réussite…

Ces tendances nous traversent sûrement aussi. Face aux questions de sens, de la condition humaine et de ses choix, nous pouvons avoir tendance à nous retrancher dans des certitudes où à des modes qui semblent ou proposent de nous aider.
Entendons à nouveau cette parole d’Evangile : « Je suis le chemin, et qui m’a vu a vu le Père ». En Jésus, Dieu s’est révélé à l’encontre d’évidences, d’opinions qui prête au divin toute surpuissance. En Jésus le Christ, nous sommes invités à accueillir un Dieu vivant qui se donne dans la fragilité de la condition humaine, contre-image de nos besoins de sécurité ou désirs de narcissisme. En Jésus le Christ, Dieu peut être aimé, parce qu’il se révèle à nos cœurs troublés comme Père, comme le Dieu qui nous aime, qui tient à nous, qui nous attends comme le père de la parabole pour son fils perdu.

Et quand Jésus dit : « Je suis le chemin », il indique un service. Il parle de ce qu’il vit, de ces chemins qui font croiser les routes des prochains à aimer, à aider, à défendre, à secourir (Cf. questions des migrations, accueil des réfugiés, Aquarius...). Pour lui, ce chemin sera celui d’une mort prématurée. Je vais mourir dit Jésus, je m’en vais. Oui moi qui suis le chemin… surprenant Evangile, bonne nouvelle qui vient à contre-courant de nos représentations culturelles de Dieu. Celui, qui devrait venir nous élever hors des limites de notre condition humaine, c’est celui qui vient nous rejoindre pour cheminer avec nous dans les aléas de nos vies comme dans ses bonheurs. C’est dire, pour revenir aux drames des migrants, exilés, que si Jésus que nous confessons comme Christ, en est mort, que nous sommes particulièrement invités à cet accueil de l’étranger, pour qu’il vive. (Engagement de l’Eglise protestante unie de France : « exilés, l’accueil d’abord », CASP...).
C’est ainsi que ce chemin qui bouleverse nos images de Dieu, touche aussi à notre vie. La demeure du Père, ce n’est pas d’abord un au-delà de la foi et de la vie, non pas l’attente d’une autre vie, mais la vie elle-même dans ce qu’elle est de relation d’amour et de confiance entre le Dieu vivant et chacune et chacun d’entre nous.

Peut-être somme-nous perdus dans une quête de sens, de Dieu, dans la peur, la rechercher d’une orientation évidente, identitaire, sécuritaire. « Je suis le chemin » dit Jésus : le chemin qui fait nous fait marcher en vérité et dans la vie. C’est un vrai chemin de vie à suivre, qui n’enferme pas dans une citadelle mais ouvre à la liberté et au service.

Lecture de la Bible

Jean 14:1-10
1 Que votre cœur ne se trouble pas. Croyez en Dieu, croyez aussi en moi.
2 Il y a beaucoup de demeures dans la maison de mon Père. Sinon, je vous l'aurais dit ; car je vais vous préparer une place.
3 Donc, si je m'en vais et vous prépare une place, je reviendrai et je vous prendrai avec moi, afin que là où je suis, vous y soyez aussi.
4 Et où je vais, vous en savez le chemin.
5 Thomas lui dit : Seigneur, nous ne savons où tu vas ; comment en saurions-nous le chemin ?
6 Jésus lui dit : Moi, je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi.
7 Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. Et dès maintenant, vous le connaissez et vous l'avez vu.
8 Philippe lui dit : Seigneur, montre-nous le Père, et cela nous suffit.
9 Jésus lui dit : il y a si longtemps que je suis avec vous, et tu ne m'as pas connu, Philippe ! Celui qui m'a vu, a vu le Père. Comment dis-tu : Montre-nous le Père ?
10 Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ? Les paroles que je vous dis ne viennent pas de moi-même ; le Père, qui demeure en moi, accomplit ses œuvres.

Ezéchiel 17:22-24
22 Ainsi parle le Seigneur, l'Éternel : Je prendrai, moi, (une branche) de la cime d'un cèdre élevé et je la mettrai en place ; j'arracherai du sommet de ses branches un tendre (rameau) et je le planterai moi-même sur une montagne haute et sublime.
23 Je le planterai sur la montagne qui domine Israël ; il dressera sa ramure et portera du fruit, il deviendra un cèdre magnifique. Tous les oiseaux de toute espèce reposeront sous lui ; à l'ombre de ses branches, ils reposeront.
24 Et tous les arbres des champs reconnaîtront que moi, l'Éternel, j'ai abaissé l'arbre qui s'élevait et élevé l'arbre qui était abaissé, que j'ai desséché l'arbre vert et fait fleurir l'arbre sec. Moi, l'Éternel, j'ai parlé et j'agirai.

1 Corinthiens 3:18-23
18 Que nul ne s'abuse lui-même : si quelqu'un parmi vous pense être sage selon ce siècle, qu'il devienne fou, afin de devenir sage.
19 Car la sagesse de ce monde est une folie devant Dieu. Aussi est-il écrit : Il prend les sages dans leur fourberie.
20 Et encore : Le Seigneur connaît les raisonnements des sages, (Il sait) qu'ils sont vains.
21 Que personne donc ne mette sa gloire dans les hommes ; car tout est à vous,
22 soit Paul, soit Apollos, soit Céphas, soit le monde, soit la vie, soit la mort, soit les choses présentes, soit les choses à venir. Tout est à vous ;
23 et vous êtes à Christ, et Christ est à Dieu.

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